Quand la route se dérobe à Saint-Pierre-Eynac

Ce 6 mai, à l’occasion d’une mobilisation nationale, les professionnels du SPIP 43 tirent la sonnette d’alarme. Ils dénoncent un service public à bout de souffle, victime de politiques sécuritaires et de coupes budgétaires massives.
Les SPIP (Service Pénitentiaire d'Insertion et de Probation) ont été créés en 1999 par la fusion des Comités de Probation et d'Assistance aux Libérés (CPAL) et des Services Sociaux Éducatifs (SSE) des établissements. Gérés à l’échelle départementale, ils contribuent à la prévention de la récidive et favorisent la réinsertion des personnes condamnées.
Pierre Goubet, Conseiller Pénitentiaire d'Insertion et de Probation (CPIP) au SPIP 43 et secrétaire local du CGT Insertion et Probation du 43 (ainsi que du 42 et du 63), a pris la parole ce mardi 6 mai devant les portes de la maison d’arrêt du Puy, lieu hautement symbolique en cette journée de mobilisations.
« Le coup d'envoi de ce mouvement vient de la dénonciation de Gérald Darmanin quant aux activités socioculturelles en prison »
Tient à préciser une mobilisée qui rajoute que cela a été pris pour un manque de respect total sur les missions des SPIP, en plus d’une instrumentalisation populiste d’un sujet complexe.
Une surpopulation carcérale très critique
A l’échelle nationale, ce sont « plus de 82 000 personnes qui s’entassent dans les établissements pénitentiaires, dans une indifférence consternante », peut-on lire sur le communiqué national de la CGT et de la SNEPAP-FSU, les deux organisations syndicales à l’initiative de cette mobilisation.
« Aujourd’hui, la maison d’arrêt du Puy c’est 80 personnes détenues pour 31 places », s’indigne le représentant du syndicat CGT IP, Pierre Goubet.
Soit une surpopulation de 258 % qui fait du Puy la prison la plus surpeuplée de France.
Entassés à 2 ou 3 dans 9m² avec un matelas au sol pour le 3ᵉ, le syndiqué dénonce des conditions de détention inhumaines. Le gouvernement reste silencieux sur un rapport commandé par Gérald Darmanin concernant la surpopulation pénale.
Un service pénitentiaire d’insertion et de probation asphyxié
Aujourd’hui, en Haute-Loire, c’est à peine 9 équivalents temps plein pour plus de 780 personnes suivies en milieu fermé (80 condamnés et prévenus) et ouvert (environ 700 probations).
À la rentrée 2025, ce sont 3 à 4 postes qui seront supprimés. Principalement des non-renouvellement de CDD qui étaient jusqu’alors embauchés pour 3 mois renouvelables, mais également un arrêt maladie non remplacé. C’est pareil dans toute la France. Sans parler des départs en retraite par ailleurs non remplacés. « C'est une politique qui est assumée », d’ajouter Pierre Goubet.
Un recul des missions sociales au profit du tout-sécuritaire
« Il y a 25% de collègues sur la dernière promotion qui sont partis au renseignement pénitentiaire, pour faire un travail qui n'est pas du travail social », dénonce le conseiller.
« Le ministre utilise les détenus étrangers comme une variable d’ajustement, incitant ainsi à la délation auprès des préfectures, brouillant les frontières entre les missions des ministères de la Justice et de l’intérieur, participant ainsi à la fragilisation de la séparation des pouvoirs et de l’État de Droit » annoncent les syndicats.
« La politique actuelle produit - au contraire - de l’insécurité, y compris pour les professionnels »
« Les orientations politiques restent ultra-sécuritaires, mais créent surtout de l'insécurité au sein de nos professions, pour les usagers, pour les professionnels, quels qu'ils soient, surveillants, travailleurs sociaux, administratifs… », s’insurge Pierre Goubet.
Un manque criant de moyens pour la prévention, notamment des violences conjugales
« La vraie urgence, ce sont les féminicides. Une thématique émergente qui est encore sous-traitée par le système pénal », met en avant le conseiller, qui déplore une prévention et une prise en charge pas du tout à la hauteur de l’urgence, alors même que peu sont poursuivis.
« 25 % des mesures en milieu ouvert concernent des auteurs de violences conjugales. Il est impossible d’organiser des prises en charge collectives, individuelles, en fonction des besoins, d’aller sur les secteurs pour ceux qui ne peuvent se déplacer, faute de temps et de moyens. »
Un sentiment d’abandon, à l’image des autres services publics
Les partenaires du SPIP (France Travail, santé, mission locale…) sont aussi en difficulté. Les délais de prise en charge psychiatrique sont de plusieurs mois. L’action du SPIP est entravée par un effondrement général des services publics.
Des conditions de prises en charge et de détention pourtant condamnées par la CEDH (Cour Européenne des Droits de l’Homme).
« On continue à appuyer sur les plus en difficulté, les plus pauvres, les plus précaires. Alors que le service pénitentiaire est un service public comme les autres, comme l'école, comme les hôpitaux… et tout le monde doit y avoir accès de manière digne avec des options de sortie qui puissent permettre à chacun de pouvoir se dire qu'il va pouvoir avoir une vie en dehors du système judiciaire », rappelle le syndiqué.
Des revendications claires
• Recruter massivement des travailleurs sociaux.
• Investir dans la prévention plutôt que dans de nouvelles prisons.
• Offrir un accompagnement digne et efficace, en particulier pour les populations les plus vulnérables
« On commence par taper sur les plus fragiles - détenus, étrangers, allocataires - mais demain, ce seront (encore plus qu’aujourd’hui) les salariés, les fonctionnaires, tous ceux qui bénéficient encore de protections sociales. C’est ça qui nous inquiète », de conclure une mobilisée.
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1 commentaire
C'est le reflet malheureusement de notre pauvre France qui tombe en RUINE sur la plan économique et sociale GRAVE !!!!!!!!!!!!