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Agriculture : « Dans 3 ans, il sera trop tard »

Par Clara Serrano , Mise à jour le 21/11/2023 à 17:00

Vous aurez peut-être été surpris de voir des panneaux tête à l'envers ce matin. Il s'agit d'une réponse des agriculteurs de Haute-Loire et de France, face « à l'incohérence des discours de l'État ». À l'issue de deux journées de mobilisation ces 20 et 21 novembre, la FDSEA  43 et JA 43 ont d'ailleurs rencontré le préfet Yvan Cordier.

Alors que plusieurs panneaux ont été retournés sur les routes et dans les communes du département, les Jeunes Agriculteurs et la FDSEA de Haute-Loire ont voulu montrer leur désarroi. « C'est une façon de symboliser le fait que l'on marche sur la tête. On ne sait plus ce que les politiques veulent de nous, mais il faut qu'on sache où on va avant qu'il ne soit trop tard », lance Philippe Châtain, secrétaire général de la FDSEA 43. 

En effet, l'homme souligne des décisions contradictoires de la part du gouvernement et de l'Union Européenne, qui prônent l'autonomie alimentaire, mais ne cessent d'importer des produits étrangers, vendus à des prix défiant tout concurrence. 

« Les banquiers nous rattrapent », Philippe Châtain, secrétaire général FDSEA 43.

Le secrétaire général de la fédération départementale souligne ainsi certains non-sens : « Les discours politiques sont incohérents. D'abord, les lois Egalim 1 et 2 devaient nous aider à maintenir des prix raisonnables pour nous, agriculteurs, mais elles sont mal appliquées, et se retournent souvent contre nous. »

Autre exemple : « Les aides de la PAC (Politique agricole commune, Ndlr) ont été créées pour compenser la baisse des prix, mais elles diminuent de plus en plus, alors que les contraintes de production ne cessent de se multiplier. De plus, on nous avait promis qu'il n'y aurait aucun retard cette année, ce qui n'a pas été le cas. »

Des retards de versement à l'impact non négligeable pour les agriculteurs, puisque celles-ci représentent des sommes très importantes. « On base nos emprunts sur les dates prévisionnelles de versement de ces aides. Lorsqu'il y a du retard, ce sont les banquiers qui nous rattrapent, et pour des sommes très importantes », explique Philippe Châtain avant de préciser que, en ce sens, l'administration altiligérienne « tente de nous aider, alors que les soucis viennent surtout de l'échelle nationale ou européenne ».

« Un bâtiment agricole représente un investissement sur deux générations »

Ainsi, les agriculteurs demandent aujourd'hui au gouvernement une ligne de conduite claire. « Pour avancer, nous avons besoin de savoir où l'on va. Ce qu'il faut, c'est une ligne directrice, des choix forts qui détermineront le mode d'agriculture que l'on souhaite pour la France. »

Il souligne d'ailleurs que l'agriculture nécessite du temps pour évoluer, et donc de l'anticipation : « Nous nous sommes toujours adaptés et nous le ferons encore. Mais cela nécessite du temps. Par exemple, une vache, avant de produire du lait, doit atteindre les trois ans de vie. »

« On marche sur la tête. Agriculture française = qualité » Photo par Marjolaine Fournet-Fayard

« Les produits français sont haut-de-gamme, ça a un coût. »

« Le gouvernement annonce vouloir développer la souveraineté alimentaire du pays. Mais elle poursuit et intensifie même l'importation de produits dont la qualité est médiocre, venant de pays où la main d'œuvre est très peu chère et où les contrôles n'ont pas les mêmes exigences » dénonce le secrétaire général, avant de poursuivre : « Les produits français sont haut-de-gamme, mais forcément, ça a un coût. On ne peut pas demander à un agriculteur de vivre avec la moitié d'un SMIC. Nous devrions être capables de vivre normalement. »

« Dans 3 ans, il sera trop tard. »

Un mobilisation conclue en Haute-Loire par une entrevue avec M. le préfet Yvan Cordier ce 21 novembre. Les responsables des organismes agricoles du département se rendront donc à la préfecture pour demander au préfet les intensions réelles et concrètes de l'État. 

Mais ils demanderont tout de même des réponses urgentes. En effet, en Haute-Loire, pour une cinquantaine d'installations cette année, ce sont environ 200 à 250 personnes qui sont parties à la retraite. Des chiffres qui restent dans la lignée des années précédentes, malheureusement, puisqu'entre 1980 et 2020, la France a perdu plus d'un millions d'agriculteurs. 

Philippe Châtain se montre d'ailleurs alarmant : « Dans 3 ans, il sera trop tard. Le renouvellement des générations, c'est maintenant, sans quoi on va perdre l'agriculture. »

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