Bien soignés à Clermont-Fd ? Le CHU arrive 13ème des 50 meilleurs hôpitaux
Marguerite Dumont-Arlaud : une héroïne auvergnate
Résistante, militante, mère, grand-mère, mais surtout Thiernoise et Auvergnate, Marguerite Dumont-Arlaud est décédée, vendredi 8 septembre 2023, à l'âge de 97 ans. Le plus bel hommage possible, reste encore de raconter sa vie et ses combats.
"On m'a oubliée. J'espère que ce que j'ai fait a servi à quelque chose", a dit un jour Marguerite Dumont-Arlaud à sa fille, Dominique Leray-Arlaud. . Elle ne parlait pas de la Résistance, ce n'était pas non plus d'avoir sauvé des vies pendant la Guerre. Elle ne parlait pas de sa propre personne, mais du rôle des femmes dans la Résistance. Surtout, elle souhaitait transmettre son message de paix, de conserver le souvenir des atrocités du passé.
En mai dernier, elle a encore donné une conférence au lycée de Montferrand. Elle était présidente d'honneur de l'association des résistants de Thiers. "Chaque fois qu'elle a pu témoigner, elle l'a fait. Quand des gens venaient à la maison, elle racontait son histoire. Elle ne manquait jamais une occasion de rendre hommage à l'un de ses anciens camarades", explique sa fille. Dominique, a d'ailleurs repris le flambeau de sa mère et de son oncle (René Dumont, autre figure de la Résistance), pour parler de la Guerre, en tant que secrétaire départementale de l'ANACR (Association Nationale des Anciens Combattants). Son petit-fils, est le porte-drapeau de l'ANACR, comme quoi Marguerite, a su transmettre ses valeurs.
Dans la Résistance, dès ses 17 ans
Née le 3 janvier 1926, à Thiers bien entendu, Marguerite rentre dans la Résistance à l'âge de 17 ans. "Quand son frère, René Dumont a dû s'enfuir de Thiers, parce qu'il allait être arrêté. Il s'est mis dans le brouillard, comme il disait. Dans l'Allier, où il est devenu responsable de la Résistance locale", raconte Dominique Leray-Arlaud. Marguerite, qui devient Line, de son nom de Résistante, commence à distribuer des tracts contre le régime de Vichy, puis devient agent de liaison pour les territoires du Llivradois-Forez.
"Elle a créé le réseau des FUJP (Forces Unifiées de la Jeunesse Patriotique), elle a élargi le réseau local, créé des actions, organisé des caches, des points de relais. Elle a passé la ligne de démarcation, déguisée en Auvergnate, avec une valise bourrée de tracts et de munitions", donne comme exemple sa fille. Ses actions sont multiples, "il y aurait de quoi faire un film", plaisante Dominique. "C'était quelqu'un de très intrépide, de très fougueuse. Elle avait chevillé au corps la Liberté, son combat permanent. Elle a été contre le fascisme toute sa vie, et toutes les autres formes de guerre. Elle a également été très attachée à son pays", a-t-elle témoigné.
De tous les combats
Pourtant, le destin l'obligera à s'éloigner ponctuellement de sa terre natale. "À la fin de la guerre, elle est devenue journaliste à Clermont, pour Libération. Elle a couvert les procès d'assises des collabos et des miliciens. Elle a contracté la tuberculose pendant la Guerre, qui était souvent mortelle à l'époque. Elle s'est mariée, avec un Résistant FTP (Francs-tireurs et partisans), en décembre 45 et a eu deux enfants. Ma grande sœur Monique et moi", explique Dominique.
Marguerite suivra son mari, originaire de Marseille dans le sud. "Mais son Auvergne lui manquait trop, ils sont vite remontés et se sont installés à Thiers. Mon père est devenu polisseur en orfèvrerie. Elle ne pouvait pas travailler avec la tuberculose, par contre, elle militait sur tout. Elle était là dès qu'il y avait des actions, pour les droits des femmes, des enfants, à l'avortement, la guerre d'Algérie", énumère sa fille. Pendant les événements d'Algérie, Marguerite Dumont-Arlaud a même organisé des réunions chez elle, pour réaliser des tracts et les distribuer dans les boîtes aux lettres, pour protester contre la guerre.
"On m'a oubliée"
"Elle est devenue veuve en 1999, elle s'est alors autorisée à parler plus souvent de ce qu'elle avait vécue. Elle se rendait dans les écoles primaires, les lycées, elle recevait des étudiantes en master pour parler de sa vie. Elle ne se sentait pas écoutée. Elle disait, "On m'a oubliée", elle trouvait que les gens comme elle (les anciens Résistants), n'étaient pas assez utilisés pour rendre des témoignages vivants", décrit Dominique.
Plusieurs fois décorée, titulaire du Certificat de reconnaissance de la Nation, de celui de la bravoure, des médailles du combattant, du combattant volontaire de la Résistance, ainsi que décorer pour son courage exceptionnel par la Ville et l'Assemblée nationale. Ce que voulait Marguerite, c'était prévenir, sensibiliser, empêcher de nouvelles atrocités. "Quand la Guerre en Ukraine a commencé, elle est restée prostrée et en pleurs pendant plusieurs jours. Cela avait fait resurgir beaucoup de traumatismes, elle a dit : "Ils n'ont rien compris"." Les traumatismes d'alors n'ayant pas été traités. "Il n'y avait pas de psychologues, de services post-traumatiques à l'époque", déplore Dominique.
Un héritage caché
"Lors d'une interview avec la Ligue des droits de l'Homme, son dernier, à l'Ehpad. On lui a posé la question : quand vous êtes montés à Paris, que vous est il arrivée ? Elle a donc raconté, j'étais présente, qu'elle avait dû s'échapper par les toits. Le journaliste a insisté, dites-nous tout, qu'est ce qui vous est vraiment arrivé ? Elle s'est mise à pleurer, à paniquer. On a repris l'interview plus tard, elle a dit : " Je ne peux pas, c'est trop dur. J'ai écrit beaucoup, dans des cahiers d'écoliers, mes filles les trouveront un jour, mais aujourd'hui, elles ne savent rien. Je lui ai dit, mais Maman, c'est dur, on aurait pu t'aider, on a des questions à te poser. Elle m'a répondue : "Elles resteront sans réponse". Par respect pour elle, avant son décès, je n'ai jamais cherché les cahiers. Je respectais trop sa confiance pour ça", dévoile sa fille.
La vie de Marguerite a encore des secrets à dévoiler. Mais, plus que jamais, c'est le devoir de mémoire qui prime aujourd'hui. La mémoire de ce que Line et ses compagnons ont réalisé pour la ville de Thiers. Seule commune du Département à s'être libérée seule, par les armes, le 25 août 1944. La mémoire de ce qu'elle a fait pour sauver des Résistants ou des Juifs. Les obsèques auront lieu le 18 septembre, au cimetière des Limandons à Thiers, à 15 heures. La mairie de Thiers a prévu une cérémonie laïque sur le parking du cimetière. Pour, espérons le, graver le souvenir des Marguerite Dumont-Arlaud.
Vos commentaires
Se connecter ou s'inscrire pour poster un commentaire
1 commentaire
Bravo pour ce reportage,qui nous rappelle que certains ont donné pour nous tous.