Parmi quatre recours déposés contre l'autorisation environnementale concernant l'aménagement de la RN 88 par la déviation entre Saint-Hostien et Le Pertuis, une seule a été considérée comme recevable par le rapporteur public, Carine Trimouille.
Au sein du tribunal administratif de Clermont, elle a, « en seulement 40 minutes, donné son avis sur la recevabilité ou non des cinq recours. Seul celui porté par les associations a été approuvé », précise Renaud Daumas.
« Sous prétexte que nous ne serions pas impactés directement par l'arrêté et le projet, on rejette notre recours ». Myriam Laïdouni
Quatre irrecevabilités, pour "non-intérêt à agir"
Selon Myriam Laïdouni, conseillère régionale écologiste, qui a assisté à l'audience, la considération de non-intérêt à agir vis-à-vis de son recours représente une décisions "inconcevable." Elle souligne : « Sous prétexte que nous ne serions pas impactés directement par l'arrêté et le projet, on rejette notre recours. Or, la Région est le maitre d'œuvre, ce qui donne à ses élus la responsabilité de sa légalité. »
Et d'ajouter : « Par ailleurs, le peu de délibérations qui se sont déroulées à l'assemblée régionale étaient antérieures à la prise de l'arrêté. Il s'agissait alors d'une convention État/région (2018), puis d'un mandat État/Région (2020). Nous n'avions pas les éléments pour repérer les irrégularités. »
Pour elle, cette décision pose un réel « problème quant aux droits des élus, et représente une entrave à leur rôle. »
« Le coût des travaux, annoncé à 226 millions d'euros, est aujourd'hui estimé à plus de 400 millions ». Renaud Daumas
Quel avenir pour le projet ?
À l'issue de l'audience, les délibérations et la décision du juge ne seront rendues que dans une quinzaine de jours, peu avant les fêtes de fin d'année.
Le recours associatif de FNE AURA, FNE 43, AUTA et SOS Loire Vivante est donc le seul a avoir abouti, et seulement sur les points 14.3.2 et 15.6, concernant le calendrier des mesures compensatoires.
En effet, les mesures compensatoires auraient dû être mises en œuvre dès le début du chantier. « Quand on détruit des espaces naturels protégés, on doit, en contrepartie, mettre en place des mesures compensatoires. C'est-à-dire que les zones que la Région aurait acquises ou aurait eues en gestion pour renaturaliser, pour recréer des espaces de vie, avec toutes leurs fonctionnalités écologiques », complète le vice-président de FNE43 et conseiller régional écologiste, Renaud Daumas.
Poursuite, suspension ou annulation ?
Pour les partisans d'une annulation totale du projet, les conclusions de la rapporteure sont insuffisantes.
« Le dur du sujet, c'est la considération de l'intérêt public majeur. C'est aberrant qu'il n'ait pas été remis en cause », insiste Renaud Daumas
« On sait que dans près de 90 % des cas, le juge suit les conclusions du rapporteur public. » Une décision qui aura un impact direct sur la poursuite ou non du chantier, puisqu'une annulation partielle de l'arrêté pourrait entrainer la suspension des travaux, « le temps d'une régularisation ».
À l'inverse, si le juge décide « d'aller plus loin et de remettre en cause l'utilité publique majeure et le non-travail sur les alternatives, il peut faire abroger l'arrêté préfectoral ».
Le représentant de FNE 43 détaille ainsi que les calculs de l'intérêt public majeur ou non, s'évaluent de manière arithmétique selon le gain et la perte liés au projet. « Lorsque l'arrêté a pris fin en 2020, la balance était déjà proche de la bascule. Alors, on considère que ça serait le cas aujourd'hui, en faveur d'une annulation, puisque le coût des travaux, annoncé à 226 millions d'euros, est aujourd'hui estimé à plus de 400 millions. »
Myriam Laïdouni dénonce ainsi : « Ce qui était attristant lors de cette audience était de voir que le rapporteur et les défenseurs du projet portaient un "œil d'avant". On ne peut plus nier les impacts de la perte de biodiversité. »
« Un retour en arrière est toujours possible. C'est arrivé pour le contournement du bourg de Beynac-et-Cazenac en Dordogne. Plus on avance, plus l'argent public et dépensé, et plus ça coutera cher à remettre en état. Si le projet est arrêté, autant que ce soit le plus tôt possible. Aujourd'hui, on estime que le chantier a déjà couté 50 millions. C'est minime par rapport au budget total », termine-t-elle.
Et Renaud Daumas de conclure : « On ne s'interdit pas de faire appel. »