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Utilisation du plomb à la chasse : après l'inquiétude, l'incertitude
Le 15 février 2023, l'Union européenne interdisait par un règlement l'utilisation ou la possession des grenailles de chasse formées de plomb pour 1 % de son poids, à l'intérieur et jusqu'à 100 mètres des zones humides. Depuis près d'un an, comment les chasseurs de la Haute-Loire se sont-ils emparés de cette loi ? Hugues Giraud, de la "fédé" de chasse du département, nous répond.
Alors que la France interdisait déjà depuis 2006 l'utilisation de grenailles en plomb dans et jusqu'à 30 mètres des zones humides. En 2023, le règlement européen a non seulement redéfini le périmètre d'interdiction, mais aussi la définition d'une zone humide.
Ce règlement est le résultat d’une volonté poussée par la Commission européenne depuis des années. C’est une première étape avant de tenter d’interdire partout l’utilisation de la grenaille de plomb, bien au-delà des zones humides. En effet, en 2017, l'agence européenne des produits chimiques (ECHA) a rendu des conclusions sur les risques du plomb dans ces espaces. Dans cet avis, l'agence y préconisait l'interdiction de l'utilisation et de la détention de munitions de plomb à moins de 400 mètres. Et en février 2020, la Commission européenne a intégré ces mesures au projet de révision du règlement européen n°1907/2006 (REACH).
Ainsi en juillet 2022, Jean-Noël Cardoux, alors Sénateur du Loiret écrit au Ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires : « Dans la pratique, il paraîtrait incohérent de sanctionner un chasseur à proximité d'une pièce d'eau, ayant des munitions au plomb sur lui alors qu'il n'en fait pas usage. De plus, la limite de 400 mètres semble disproportionnée, puisqu'au vu du nombre de zones humides dans notre pays, cela reviendrait à interdire purement et simplement l'utilisation du plomb sur l'ensemble du territoire. »
Qu'est-ce qu'une zone humide ?
Le règlement de la commission européenne concerne les zones humides telles que définies dans la convention de Ramsar.
Réglementairement, d’après l’article L211-1 du Code de l’environnement, « on entend par zone humide les terrains, exploités ou non, habituellement inondés ou gorgés d’eau douce, salée ou saumâtre de façon permanente ou temporaire ; la végétation, quand elle existe, y est dominée par des plantes hygrophiles pendant au moins une partie de l’année ».
L’article R211-108 du Code de l’environnement précise que : « Les critères à retenir pour la définition des zones humides […] sont relatifs à la morphologie des sols liée à la présence prolongée d’eau d’origine naturelle et à la présence éventuelle de plantes hygrophiles. Celles-ci sont définies à partir de listes établies par région biogéographique. En l’absence de végétation hygrophile, la morphologie des sols suffit à définir une zone humide. »
Davantage de détails à retrouver sur le site du gouvernement.
« Cela aurait rendu la chasse au plomb impossible », Hugues Giraud
« Ce règlement a d'abord causé beaucoup d'inquiétude chez les chasseurs »
Hugues Giraud, technicien de la Fédération de chasse de Haute-Loire explique : « Ce règlement a d'abord causé beaucoup d'inquiétude chez les chasseurs, puisqu'il étendait la définition des zones humides aux ruisseaux et prairies inondées. Ce qui aurait rendu la chasse au plomb impossible dans notre département. »
En effet, en raison de ses reliefs, la Haute-Loire est en grande partie traversée par de petits cours d'eau et est constituée de 6 000 km de cours d'eau et 20 000 hectares de zones humides.
L'homme tient d'ailleurs à souligner que les décrets d'application nationaux n'ont toujours pas été modifiés en France, et que « la seule détention de grenailles de plomb dans les zones humides ne serait finalement pas sanctionnée. Seul un chasseur pris en train de tirer avec ce type de munitions dans ou à 100 mètres d'une zone humide se verra puni d'une amende ».
« Des munitions de substitution peu efficaces ou très coûteuses »
« Cela concerne a minima 650 000 chasseurs directement impactés en France »
Lors de la publication du nouveau règlement de l'Union européenne, la Fédération Française de chasse (FNC) a étudié son impact économique. « Cela concerne a minima 650 000 chasseurs directement impactés en France. Les armes détenues, à raison d’une moyenne de 2 par chasseur, deviendront tout simplement inutilisables car leur transformation est presque impossible. En effet, seules deux entreprises en Europe sont en mesure de traiter ce type de demande. »
« L’achat d’une nouvelle arme obligera les chasseurs à consacrer environ 1 000 euros »
Outre la transformation des armes, Hugues Giraud complète : « L’achat d’une nouvelle arme obligera les chasseurs à consacrer environ 1 000 euros pour une seule arme. »
En effet, le chasseur explique : « Et au-delà de cela, il existe des munitions alternatives, mais elles sont soit peu coûteuses mais peu efficaces, soit incompatibles avec un grand nombre d'armes. En effet, nombreux sont les chasseurs qui possèdent des matériels anciens, pas assez puissants pour compenser l'absence de plomb. »
« Cet enjeu réclame des moyens financiers conséquents »
C'est pourquoi la FNC demandait en février à l'organisme international, d'investir largement et de financer la recherche pour trouver un matériau de substitution, respectant trois préalables : un prix quasiment équivalent au plomb, un matériau qui puisse être utilisé avec les fusils anciens et qui ait la même efficacité que le plomb.
« Si la Commission européenne impose une interdiction totale à terme, les conséquences seront catastrophiques pour la chasse populaire. Cet enjeu réclame des moyens financiers conséquents de la part de l’Union européenne, pour obtenir ce substitut qui doit rester accessible financièrement aux utilisateurs. »
3 sons de cloche
Dès la publication de ce règlement pas la commission européenne, la FNC voyait en lui l'objectif, à terme, d'une interdiction totale du plomb dans les munitions de chasse. En ce sens, face à la menace d'une interdiction totale de la grenaille de plomb, Hugues Giraud confie : « Les chasseurs ne sont aucunement hostiles à une telle interdiction. Il faut en revanche qu'un substitut soit accessible, avec la même efficacité et sans surcoût. »
Si les chasseurs français pensent à cette solution, c'est parce que la Ligue de protection des oiseaux (LPO) lutte depuis de nombreuses années pour l'interdiction du plomb dans les zones humides, et demande aujourd'hui une extension de cette interdiction, à tous types de munitions contenant du plomb, et à l'ensemble du territoire national.
Responsable du saturnisme, l’ingestion de plomb affecte les fonctions cérébrales et cognitives, provoque des états d’anémie, perturbe les systèmes reproducteur
En effet, l'organisme souligne : « La grenaille de plomb consiste en de minuscules billes rondes contenues par centaines dans les cartouches que les chasseurs utilisent pour tirer sur les oiseaux et autres petits animaux. Responsable du saturnisme, l’ingestion de plomb affecte les fonctions cérébrales et cognitives, provoque des états d’anémie, perturbe les systèmes reproducteur, nerveux et digestif, et s’avère souvent mortelle. »
Pourtant, dans son rapport, l'Agence européenne des produits chimiques ne préconisait « que » l'interdiction de l'utilisation et de la détention de munitions de plomb à moins de 400 mètres des zones humides.
En somme, une situation toujours à élucider pour les chasseurs face à une lutte qui se poursuit pour les défenseurs de l'environnement.
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1 commentaire
La mesure ne concerne pas que les "défenseurs de l"environnement "mais bien la santé publique en général.
La quantité de plomb lancée dans la nature n'est pas tolérable , il est temps d'en prendre conscience ..