L'imprimerie d'Yssingeaux : D'une ascension fulgurante au profond naufrage

Passé en commission mixte paritaire avant sa mise au vote à l’Assemblée. Ce projet de loi, examiné le 26 mai, pourrait bien marquer un tournant dans la politique agricole française.
Avant la mobilisation des agriculteurs organisée ce matin devant la préfecture du Puy, Renaud Daumas a souhaité s'exprimer sur la loi qui fait tant parler.
« C’est un texte qui va complètement à l’envers de ce qu’il faudrait faire aujourd’hui », alerte Renaud Daumas, maraîcher et élu écologiste. Le projet est perçu comme « un texte idéologique qui émane largement des rêves de la FNSEA », déplore-t-il, avec un axe principal tourné vers l’agro-industrie et l’exportation.
Une lettre ouverte signée par plus de 1000 scientifiques
Alors que les alertes scientifiques et sanitaires s’accumulent, le projet de loi semble ignorer les effets néfastes des pesticides. « La MSA reconnaît de plus en plus les maladies liées à ces pesticides », souligne-t-il. « Les premières victimes sont les agricultrices et agriculteurs eux-mêmes », qui manipulent souvent ces substances.
Selon Renaud Daumas les effets des néonicotinoïdes sont largement documentés : troubles neuro développementaux chez le fœtus, cancers du foie, de la thyroïde ou des testicules, mais aussi l’impact sur la faune et la flore.
Une lettre ouverte signée par plus de 1000 scientifiques, médecins et soignants réunis par l’ANSES a été adressée début mai aux quatre ministères de tutelle (santé, agriculture, environnement et travail) pour alerter et rappeler le caractère toxique de certains produits.
Un texte revu à la baisse
La commission des affaires économiques a travaillé sur la proposition de loi et y a apporté plusieurs modifications.
Parmi celles-ci, l'utilisation des néonicotinoïdes sur les cultures est autorisé s’il n’y a pas de méthodes alternatives pour lutter contre les ravageurs ainsi que sur des zones exposées à la concurrence des pays voisins européens qui utilisent ces mêmes pesticides. Le texte prévoit également une contrainte de temps d’une durée de trois ans.
L’élevage : une autre source d’inquiétude
Les installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE)
Les seuils ICPE sont des seuils réglementaires qui fixent, en fonction de l’activité d’une exploitation (nombre d’animaux, volume de stockage, capacité de production, etc.), le niveau de contrôle environnemental auquel elle est soumise.
L’élevage intensif inquiète aussi : le relèvement des seuils ICPE faciliterait la création de structures promouvant l’élevage hors sol, au détriment des fermes à taille humaine.
« Ces normes sanitaires détruisent les fermes qui font de la qualité », dénonce le maraîcher. Et pour ceux qui se sont engagés dans le bio, les nouvelles réglementations trop contraignantes forcent déjà six exploitations de Haute-loire à se réorienter.
Les petites structures peinent à survivre dans un modèle pensé pour les grandes exploitations. « Les agriculteurs sont pris dans un étau, un retour en arrière est extrêmement difficile. » Sans pour autant les blâmer, beaucoup reconnaissent que l’agriculture est aujourd’hui submergée de normes et de contraintes.
Des alternatives pour une agriculture de qualité
Face à l’annonce de ce texte, certains défendent un changement de cap : « Cette loi nivelle l’agriculture par le bas », s’indigne encore Renaud Daumas. Cela passerait par des mesures de protection du marché, comme une clause de sauvegarde, avec l’instauration d’un prix minimum d’entrée pour les importations : « Ces prix minimum d’entrée, notamment sur les fruits et légumes, disent qu’aucun produit qui arrive en France ne doit être vendu en dessous du prix de revient de ce que l’on produit ici ».
Un tel dispositif permettrait de renforcer les droits sociaux et environnementaux des pays exportateurs, tout en protégeant les producteurs français de la concurrence déloyale.
Les cerises ont fait boule de neige
L’exemple du diméthoate, pesticide interdit en France depuis 2016 pour la culture des cerises, illustre l’impact d’une telle interdiction. Après la France, ce produit a aussi été banni en Espagne et en Italie, preuve que des choix politiques peuvent avoir un effet domino sur les pays européens, voire mondiaux.
Deux visions de l'agriculture
La loi Duplomb confronte deux visions de l’agriculture, l’une est tournée vers l’exportation et l’agro-industrie ; l’autre, axée sur la qualité, la santé publique et la durabilité environnementale.
Derrière ces mesures, c’est un choix politique fort qui se dessine : faut-il produire toujours plus, à moindre coût, ou repenser une agriculture durable et de qualité.
Vos commentaires
Se connecter ou s'inscrire pour poster un commentaire
1 commentaire
Ne votez pas cette loi, c'est un appel au secours. Est-ce l'orgueil de graver son patronyme dans une loi qui en ferait oublier le bon sens ? La bêtise et la mégalomanie devrait elle dicter la santé de tout un chacun ?