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Le Lac de Naussac : touché mais pas coulé  

Par Ombéline Empey… , Mise à jour le 07/07/2023 à 06:00

L'été dernier, la situation était alarmante. On mesurait alors, le lac de Naussac, a seulement 30 % de sa capacité normale. En ce début de saison 2023, le lac atteint actuellement 50 % (sur les 185 millions de m³ qu'il peut contenir). C'est peu, mais cela ne décourage pas pour autant les acteurs du tourisme local qui ont choisi de s'adapter et d'être optimistes pour l'année en cours. 

"Dans vingt ou trente ans, il n'y en aura plus". Les paroles de Jean-Claude Van Damme évoquant l'eau n'ont jamais été autant d'actualité. En 2010, il était loin de se douter à quel point il avait visé juste. Treize ans plus tard, ses mots résonnent. Car personne ne souhaite revivre un été comme celui de 2022 qui a été ravageur tant par les sécheresses que par les restrictions d'eaux.

Naussac pas épargné

Des rivières asséchées, des niveaux inquiétants pour les nappes phréatiques. En termes de superficie touchée, 2022 a été l'année la plus sèche jamais enregistrée, 63 % des cours d'eau européens ont connu des débits inférieurs à la moyenne. Les lacs aussi font les frais du réchauffement climatique. À Naussac, l'année dernière, les images ont été impressionnantes tant pour les habitants que pour les touristes. 

Le lac de Naussac et son corps squelettique.
Le lac de Naussac et son corps en souffrance. Photo par Did Hebrard

Alimenté par l'Allier et le Donozau, un confluent de l'Allier, le lac colossal peut contenir 185 millions de m³ d’eau lorsque son réservoir est saturé. Fin juillet dernier, il ne compte plus que 60 % de sa capacité. Pire, en septembre, le chiffre baisse à 30 %. 

À ce jour, début juillet 2023, il reste 49% de son volume maximal. En terme de superficie, Naussac occupe actuellement 700 hectares sur les 1000 hectares initiaux.

Déjà 40 bougies. Le barrage de Naussac date des années 1980. Mis en service exactement en 1983. Au sud du Massif Central, le lac se situe dans le département de la Lozère, en région Occitanie, près de la Haute-Loire et de l’Ardèche. Il fait également partie du massif montagneux et de la région naturelle de la Margeride. Sur sa moitié sud-est, il se trouve sur le territoire de la commune de Langogne dont le centre historique et commerçant est à environ 1,5 km du lac. Quant à sa moitié nord-ouest, sur celle de Naussac Fontanes, Auroux et Chastanier.

La création du barrage a été un événement qui a marqué toute une génération. Il a été construit par SOMIVAL, puis est devenu propriété en 2007 de l'Établissement Public Loire. Pour le créer, des dizaines de hameaux présents ont été détruits. 

Naussac, rasé et noyé. Photo par DR

Dès sa mise en service il a eu une vocation unique, qui est aussi sa particularité, le soutien d'étiage de l'Allier et de la Loire. C'est son unique usage « réglementaire ». Cela veut dire qu'en période de basses eaux, on alimente le cours d'eau en aval pour garantir un débit minimum et permettre l'ensemble des usages pour la rivière et donc subvenir aux besoins du milieu. Un niveau minimum requis pour l'irrigation, les industries et en eau potable le long de l'Allier et de la Loire en cas de sécheresse plus sévère avec en particulier l'approvisionnement des centrales nucléaires ligériennes.

Par la suite, d'autres usages se sont développés comme le tourisme. 

En chiffres : 

  • 1980 : son année de création
  • 1983 : sa mise en eau
  • 1000 hectares : sa superficie maximale
  • 30 km : son périmètre
  • 2,7 km : sa largeur
  • 8 km : sa longueur 
  • 50 m : sa profondeur
  • 185 millions de m3 : son volume maximal de remplissage

Pourquoi le lac a-t-il un niveau aussi bas ?

Après deux hivers particulièrement secs en 2022 et 2023, l'apport d'eau dans le bassin en amont a été réduit. Le rôle du lac de Naussac étant donc le soutien et le maintien du débit de l’Allier, l'étiage 2022 a été particulièrement sévère et la mobilisation de Naussac importante pour garantir les usages à l'aval. L’hiver 2023 a été très sec sur le secteur avec des débits dans les cours d'eau historiquement faibles, mais les conditions hydrologiques, avec un printemps plus humide, ont néanmoins permis de remplir partiellement le barrage. Au vu du niveau actuel, le remplissage 2024 reste un enjeu. Un hiver favorable sera nécessaire pour remplir la retenue.

Doit-on s'inquiéter de la situation ?

"Non, ce n'est pas inquiétant, mais cela oblige à la plus grande vigilance. La gestion sera assurée et il y a eu une anticipation de nombreux acteurs, notamment d'une partie des agriculteurs qui ont adapté leurs politiques d'assolements en aval pour aller vers des cultures plus économes en eau", explique Emmanuel Lehmaan, chef du service barrage à l'Établissement Public Loire.

L'Établissement Public Loire, mais également l'Office de Tourisme se veulent rassurant sur cette année. Après une première année qui a posé beaucoup d'inquiétude, les acteurs du tourisme cette année sont optimistes et gardent le sourire avec une saison touristique déjà bien lancée. 

"Les voyants sont aux verts"

Ce jeudi 6 juillet 2023, l'Hôtel-Restaurant-Camping Terrasses du Lac, la base de loisirs Rondin Parc, et l'Office du Tourisme de Langogne ont convié la presse, avec une forme plutôt originale pour l'occasion. 

La conférence de presse a eu lieu sur des tapis de yoga. Photo par Ombéline Empeyta Brion

Le lac est un véritable lieu de vie. Mais aussi, et surtout, un site touristique phare avec de nombreux acteurs. Campings, restaurants, hôtels, activités de plein air, locations, commerçants. Ils sont nombreux à vivre grâce à ce géant de 1 000 hectares. "L'eau, c'est attractif", explique Isabelle Cavalier, directrice de l'Office de Tourisme. Et même si l'année dernière, l'inquiétude a été bien présente, la saison a été plutôt bonne. "La chaleur a apporté du monde, on a eu une bonne saison, plutôt longue, on n'a pas perdu en fréquentation finalement". 

Le maitre mot : s'adapter 

100 %, 60 %, 49 %. Malgré la baisse du niveau, les activités continuent et permettent même de se renouveler. "Ça demande de se réinventer, de faire preuve d'imagination, on trouve de nouvelles idées", explique Gaetan Defay, co-gérant de la base de loisirs Rondin Parc, aux abords du lac. Pour lui, le niveau ne change pas grand-chose, malgré ses nombreuses activités nautiques proposées. 

Gaétan, au gré du vent. Photo par Ombéline Empeyta Brion

"Naviguer sur 700 hectares, ça reste agréable"

Lui, reste optimiste et pense à demain. "Dans un lac, il n'y a pas que des activités nautiques. On peut aussi faire du V.T.T, de la trottinette, du cheval, ou juste randonner, marcher, courir", explique le jeune gérant. "Puis tant qu'il reste de l'eau, on peut toujours naviguer. En septembre, il restait 27%, et pourtant, ça ne nous en a pas empêché. Naviguer sur 700 hectares, ça reste agréable". 

Des enfants randonnent sur les berges du lac. Photo par Ombéline Empeyta Brion

Même constat, du côté de Margaux Zouagui, directrice des Terrasses du Lac de Naussac. L'essentiel est de s'adapter. "L'année dernière, c'était la première saison comme ça. On avait des inquiétudes, des doutes. Aujourd'hui, on est beaucoup plus serein, plus préparé", positive-t-elle, "Le paysage change, il y a plein de couleur, plein de senteur, ça nous offre un nouveau point de vue. Ce n'est pas mieux ou moins bien, c'est juste différent"

Une mutation qui a aussi ses avantages

Durant 40 ans, la faune et la flore ont pu s'épanouir. Il est un écosystème à lui tout seul. La création de cette étendue d’eau a permis de voir apparaître des espèces d’oiseaux qui repèrent l’immense tache bleue au loin dans le ciel. Le lac accueille des foulques macroules, des poules d’eau, des grèbes huppés, ou encore le goéland leucophée, des mouettes rieuses, des cormorans ou encore des hérons cendrés. Dans l'eau, on trouve notamment des truites arc-en-ciel, des sandres, quelques truites fario ainsi que des vairons, des perches et des brochets.

Des pécheurs cherchent la truite, bien cachée dans les profondeurs du lac. Photo par Ombéline Empeyta Brion

La flore est aussi somptueuse et captivante. Le lac est peuplé d’épilobes, de gentianes, de genêts, de scabieuses, de campanules, de gesses, de narcisses, d’anémone pulsatilles et même de nénuphars ou encore de renoncules. Les forêts aussi sont habitées par de majestueux arbres, les tilleuls, les sorbiers, les alisiers, les noisetiers, les frênes sans oublier les pins sylvestres, les épicéas et les mélèzes.

"On ne va jamais se retrouver avec un lac vide"

Alors cette baisse du niveau de l'eau permet aussi à la flore de se renouveler, comme l'explique Gaetan Defay. "On compte bien que le lac remonte, c'est sûr, mais d'ici là, les herbiers vont permettre de pousser et par la suite de filtrer l'eau, c'est une bonne chose pour le renouvellement naturel de l'eau". Pour lui, le lac ne mourra jamais : "On ne va jamais se retrouver avec un lac vide, il y a trop d'enjeu autour. D'autres territoires seront en crise bien avant nous à mon avis."

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