Depuis le début de la mobilisation, nous donnons la parole aux syndicats, aux manifestants, ceux qui participent à la mobilisation. Cette fois-ci, nous avons fait le parti-pris de faire parler ceux qui la regardent, depuis une fenêtre, un trottoir ou une voiture. Ceux qui sont au second plan, mais qui ont aussi des choses à dire.
Le cortège qui s'est élancé à 10h30 de la place Cadelade, en musique, coloré par les fumigènes, la fumée et les drapeaux syndicalistes, avance cette fois sur la N88 avec le bruit des tambours, des clochettes ou encore des pétards.
Il y a ceux que ça agace...
À partir de 10 h 30, jour de manifestation, on le sait, il vaut mieux éviter de se déplacer en voiture dans le centre-ville. Certains pensant pouvoir éviter le cortège s'aventurent sur les routes. Florian en a fait les frais : " Ils cassent les c***** là ! ". Le jeune ponot, se rendant au travail, s'énervait face au barrage devant lui. Participant habituellement à la mobilisation, il ne comprend pas pourquoi ils bloquent la route aux particuliers, et gênent les "gens lambda". "Je les soutiens, mais je ne comprends pas pourquoi ils nous bloquent comme ça ! On est comme eux !".
Derrière lui, coincé aussi, Daniel attend moins pressé la fin du passage du cortège. "Moi ça ne m'embête pas, je comprends pourquoi ils manifestent, c'est normal". Lui, ne sors pas manifester, pas par manque d'espoir, mais surtout à cause du temps. "Il ne fait pas beau, il ne fait pas assez chaud ! ", plaisante le jeune homme. Alors Daniel les soutient de loin et prend son mal en patience durant ces quelques minutes. Il sortira même de sa voiture fumer une cigarette avec Florian, "le temps que ça passe".
Et les curieux, hésitants, sur le trottoir
René, retraité, observait d'un œil attentif la mobilisation. Lui, qui habite loin, admirait " le courage des manifestants". Entendant et voyant depuis sa télévision les mobilisations, il était curieux de venir voir de ses propres yeux. "Je ne pensais pas qu'il y aurait autant de monde, je me suis dit aujourd'hui, je vais aller voir, c'est vraiment impressionnant".
Retraité, il comprend " le trop-plein" que peuvent avoir les manifestants. Pour l'heure simple observateur, il avoue toute de même être tenté de rejoindre la foule. "Je vais voir, je vais peut-être suivre !".
Christian aussi observe depuis le trottoir, un sourire aux lèvres. Il comprend leur colère. "Les gens en ont marre, je les comprends". Alors quand on lui demande pourquoi il n'est pas dans le cortège, sa réponse est immédiate : " Je peux y aller, ce n'est pas trop tard, je suis de tout cœur avec eux ! "
Le cortège s'est ensuite dirigé sur le N88 en passant par le lycée professionnel Jean Monnet et la Maison d'arrêt du Puy. Les manifestants en ont d'ailleurs profité pour taquiner le Ministre de l'Intérieur " Darmanin fait pas le malin, c'est toi qui vas bientôt finir là-bas!". Une manifestation bon enfant, malgré les nombreux coups de pétards qui retentissent dans la rue.
Et pour cause : il y en avait du bruit. Notamment la machine à pétard qui résonne dans les rues du Puy. Une manivelle est actionnée, le casque est mis sur les oreilles et il ne reste plus qu'à taper sur la machine à l'aide d'une grosse masse pour la déclencher.
Elles avaient plus de mal avec l'ambiance sonore du cortège. Love Micky et Royalle, deux adolescentes de 14 ans, se promenaient au Jardin Henri Vinay. Elles avouent ne pas bien cerner les revendications soulevées. "Je les trouve un peu fou, c'est un peu dangereux les pétards, ça nous fait un peu peur". Dans leur culture, travailler moins n'est pas vraiment un souhait. "En Afrique, quand on nous dit de travailler moins longtemps, c'est là qu'il y a des manifestations", explique l'une des adolescentes. "Deux ans, ce n'est rien, je ne comprends pas".
Une mobilisation qui ne passe pas inaperçue
Sur le boulevard du Président Bertrand, les manifestants affluent en masse. Depuis le début de la mobilisation, le cortège passe rarement par ce chemin. Alors forcément, cela attise la curiosité... même depuis les balcons...
Des habitants, commerçants, étudiants qui sortent de leurs occupations pour observer la foule. Devant le Greta du Velay, sur le Boulevard, Julien étudiant, s'ébahissait devant la foule. "Je profite de ma pause pour regarder la manif au soleil, ça me distrait". Il salue le nombre de manifestants, plutôt impressionnant à ses yeux. "C'est beaucoup d'humains qui se déplacent en groupe avec des drapeaux et des grosses enceintes, c'est rigolo !".
Et des drapeaux, il y en a. Quasi une personne sur deux en avait un. Et s'ils n'en ont pas certains préfèrent brandir des pancartes, toutes plus inventives les unes que les autres. Et pour ceux qui n'en avaient pas prévu, un petit stand proposait d'en créer une. Feutre, cartons, plastifiés. Tout pour créer une pancarte 100% personnalisé.
Place du Breuil, passants ou manifestants : tu finiras
Fin de mobilisation comme traditionnellement place du Breuil. Certains qui n'avaient pas pu venir dans le cortège se retrouvent sous les coups de midi pour partager une accolade, un verre de rosé ou une merguez de la CGT.
Une ambiance positive dont ont pu participer 15.000 manifestants selon la CGT, 2.800 selon la Préfecture.