Depuis la loi Anti-Gaspillage pour une Économie Circulaire (AGEC) de février 2020, l’État a mis en place la Responsabilité Élargie du Producteur (REP). Cette réforme s’applique aux fabricants, importateurs, distributeurs qui doivent intégrer une éco-contribution au prix de leurs produits. Cette éco-contribution est destinée à financer la gestion et le recyclage des déchets. Mais cela entraîne inévitablement, une augmentation qui s’en ressent sur le prix des matières premières des entreprises et donc celle aussi des clients.
Une mise en pratique qui tarde
Depuis l’entrée en vigueur de la REP en 2023, les entreprises de construction paient l’éco-contribution. Cependant, la mise en œuvre effective du dispositif reste insuffisante, comme l'explique Stéphane Depeyre, secrétaire général de la FFB. " Les écotaxes ont bien été mises en place, mais le maillage géographique pour récupérer les déchets qui devait être un point de collecte à maximum 20 kilomètres les uns des autres n'a pas été mis en place et encore moins dans notre département rural. " Il était également évoqué une récupération de bennes directement dans les entreprises pour les gros producteurs.
Cette mission a été confiée l’Organisme Coordinateur Agréé du Bâtiment (OCAB) composé de quatre éco-organismes : Valobat (dont le groupe Saint-Gobain), Ecominero, Valdelia et Ecomaison doivent assurer la gestion du tri des déchets. Pourtant, seuls 7 % des déchets du BTP seraient effectivement repris sans frais, obligeant les entreprises à déposer les déchets en déchetterie comme elles le faisaient auparavant, payant à nouveau, malgré l’écotaxe déjà versée.
Dans d’autres secteurs, le dispositif REP est pourtant bien rodé. Lorsqu’un consommateur achète un appareil électroménager, l’éco-contribution intégrée au prix lui permet ensuite de déposer gratuitement son ancien appareil en magasin ou en déchetterie. Mais la filière du BTP est beaucoup plus complexe : elle repose sur sept flux de matériaux distincts à trier : inertes (gravats), bois, plaques de plâtre, menuiseries vitrées, plastiques, métaux, laines de roche et de verre.
Les entreprises du BTP se retrouvent à payer à la fois l’accès aux déchetteries et l’éco-contribution, qui ne cesse d’augmenter, sans bénéficier du service de collecte gratuit prévu par la REP.
Des hausses considérables
Selon la FFB, l’OCAB a augmenté les barèmes d’éco-contribution de 50 à 200 %, alors même que le service ne fonctionne pas. Avec de tels écarts, les devis faits aux clients deviennent obsolètes face à l’augmentation imprévue de l’écotaxe, " c'est de la marge en moins pour les entreprises " confie le secrétaire général de la FFB. Un impact direct sur le carnet de commandes de deux mille entreprises de Haute-Loire.
La FFB a donc alerté le Préfet dès le mois de mai 2025 pour mettre en garde l’Etat sur la gestion de la REP par l’OCAB, dont l’utilisation des fonds collectés n’est, à ce jour, pas renseignée, malgré la forte augmentation de la taxe. De plus, les éco-organismes ont annoncé qu’ils ne pouvaient plus assurer les collectes sur chantier ou en entrepôt.
Face à cette situation, la FFB a demandé un moratoire de " suspension du dispositif et une refonte totale pour la redéployer avec de la transparence " explique la FFB, accepté par la ministre de l’Écologie. Mais les éco-contributions restent dues, alors que les services associés ne sont pas fournis.
Malgré cela, "il y a une méconnaissance du dossier, c'est quelque chose qui crispe prodigieusement les entreprises " souligne Stéphane Depeyre. Cette situation, jugée contre-productive, pourrait pousser certaines d’entre elles, à terme, à rejeter leurs déchets de manière non conforme, comme cela s’est déjà produit par le passé, plutôt que de les déposer en déchetterie.
Des manifestations et un appel au dialogue
« Un peu de stabilité, ça ferait pas de mal. » Stéphane Depeyre
Le 27 novembre 2025, plusieurs départements ont manifesté pour dénoncer cette situation en déposant des bennes devant les préfectures. En Haute-Loire, la FFB privilégie le dialogue et demande au gouvernement de refondre le dispositif avant le 1er janvier 2026.