Nous arrivons aux trois ans des gilets jaunes. Où en est le mouvement?
Le mouvement des gilets jaunes est toujours bien présent. Ceux du départ sont toujours là. Il a un peu mué. Il s'est transformé. Sa forme a évolué. même au Puy-en-Velay on a vu une convergence avec les soignants et les syndicats. Ailleurs cela s'est passé autrement. C'est très bien et c'est tout à fait normal. Le mouvement des Gilets jaunes a été le réceptacle d'un climat de révolte qui était en sommeil. Ce n'est pas du tout la fin c'est plutôt le début de quelque chose.
"Cette lame de fond s'est étendue à toutes les catégories sociales"
Sociologiquement il a pourtant bien changé...
Beaucoup de choses se sont agglomérées. Certes au début c'était surtout une question de pouvoir d'achat. La taxe carbone a été la goutte d'eau qui a fait déborder le vase. Ensuite les esprits ont évolué. De plus en plus de gens ont pris conscience de l'ampleur des problèmes, de leur diversité et de leur complexité. Maintenant cette lame de fond s'est étendue à toutes les catégories sociales. C'est logique puisque tous les sujets sont liés.
Est-ce que le mouvement des gilets jaunes n'a pas souffert d'un manque de représentativité clair?
Oui mais cela a été sa force et sa faiblesse en même temps. Il a certes été fragilisé par ce manque d'organisation. Des opportunistes comme Francis Lalanne ont fait beaucoup de mal au mouvement. Mais, d'une part son manque de structure peut se corriger maintenant et d'autre part, cette organisation un peu floue a permis à certaines personnes de rejoindre le mouvement sans avoir peur de l'étouffement. Ils y ont trouvé plus de liberté d'expression que s'il s'était tout de suite mis en place de façon rigide.
"La prise de conscience est planétaire"
Comment voyez-vous son évolution?
Il y aura certainement à nouveau des pics de mobilisation. Mais le mouvement va se transformer de plus en plus. Ce ne sera pas toujours les Gilets Jaunes, ce sera autre chose. Le mouvement a pris de l'ampleur et continue de le faire. Il se développe dans tous le pays et même à l'échelle du monde entier. On le voit bien dans l'actualité. La prise de conscience est planétaire.
C'est pour cela que vous avez rejoint le REV? (Révolution écologique pour le Vivant)
Mes motivations sont complexes et multiples. Avant les Gilets Jaunes j'étais même anti-partis politiques. J'ai lu "Utopia 21" d'Aymeric Caron. C'est en soi un véritable programme politique. Il y décrit en quelque sorte mon monde idéal. Le REV est un projet de démocratie révolutionnaire. Nous prônons la reconnaissance du vote blanc, la révocation des élus. Nous avons même un projet antispéciste. J'y suis depuis 2018. C'est dans cette logique que je suis devenue leur porte-parole et que j'ai publié cette tribune anti-chasse avec Aymeric Caron dans Le Monde récemment.
"Il ne faut pas mésestimer l'importance des petits partis"
C'est une structure de petite taille. N'est-ce pas un handicap?
Non. Il ne faut pas mésestimer l'importance des petits partis. On a une place sur la scène politique. Sur beaucoup de sujets on va plus loin que les Verts. Nous ne somme pas seulement animalistes, nous voulons un autre rôle pour l'humain. Nous avons nos idées mais nous discutons avec les autres partis, quels qu'ils soient.
Est-ce la littérature qui vous a menée à la politique ou l'inverse?
Ce sont les deux. Cela fait cinq ou six ans que j'écris. Il est plus facile manifestement d'écrire ou de transposer ses idées dans une fiction que dans un essai ou dans la vie politique. Pour moi les deux univers se rejoignent, s'interpénètrent et se complètent même si je me dirige vers des sujets plus politiques.
"Je crois qu'il faut parler à tout le monde"
Vous avez aussi participé à l'émission de Frédéric Taddéi avec un autre invité: Alain de Benoist. Est-ce votre manière de concevoir le forum politique et littéraire?
On a beaucoup parlé de cette émission. C'est même à cause d'elle que j'ai été virée du Monde Libertaire. De Benoist est un opposant, et alors? On parlait surtout de littérature. Je crois qu'il faut parler à tout le monde.
Quel est votre monde idéal?
Avant je militais dans beaucoup d'associations séparées. Je crois à présent que l'on doit changer le monde globalement. D'où le REV. Mon monde idéal c'est plus de démocratie, d'égalité, un recentrage et une attention accrue pour le vivant. Ne pas laisser l'argent nous guider. Les perspectives sont vastes.
Dernière question. Arrivez-vous à vivre de votre plume comme vous vouliez le faire?
Non, j'ai un travail alimentaire à côté. Je suis rédactrice web. Il faut savoir que moins de 10% des auteurs vivent de leur plume..