Colère agricole : actions coup de poing de la Coordination Rurale
St-Hostien : « Ce qu’ils ont fait hier soir est honteux ! »
Dans la nuit du lundi 24 au mardi 25 mai, les deux structures en bois construites à Ouillon par les anti-déviation de la RN 88 ont été totalement rasées. Dans le champ saccagé par les engins, quelques débris de verre et des morceaux de panneaux témoignent de la violence de l’opération.
Durant tout le week-end de la Pentecôte, ils ont été des centaines à se retrouver sur cette parcelle de terrain privée pour parler de ce combat qui les oppose au grand chantier de la Région, la déviation de la RN 88 entre Saint-Hostien et le Pertuis. Avec l’accord du propriétaire du champ, ils ont fusionné leurs compétences pour construire deux cabanes charpentées. Pendant trois jours, défenseurs de la nature et du territoire, agriculteurs et sympathisants, associations et collectifs, ont ainsi bâti ce qui devait être, d’après eux, le symbole d’une résistance face aux machines et au goudron.
« Avec ce qu’il vient de se passer, nous avons atteint un niveau de mépris incroyable ». Celline Gacon
Il n’a fallu que quelques heures pour que ce symbole s'accompagne d’un autre : « Les cabanes représentaient une installation éphémère, légère, quelque chose qui se voulait être un symbole fort pour nous avec un impact faible pour la nature, explique, la voie tremblante, l’élue municipale du Puy-en-Velay EELV Celline Gacon. Le donneur d’ordre de cette destruction est de montrer la toute puissance des machines. » Elle ajoute : « Mais qu’est-ce que cela va générer ? Un réveil de la colère et une plus grande détermination de la Lutte des Sucs. Car, avec ce qu’il vient de se passer, nous avons atteint un niveau de mépris incroyable ».
« Ils nous ont fouillés et sortis de la parcelle privée pour nous mettre sur la voie publique. Une fois sur la route, ils nous ont dressés une amende de 135 euros pour non respect du couvre-feu sur la voie publique ». Julien
La préfecture à l'origine de la destruction
Nous avons demandé à la préfecture des explications sur l'opération nocturne en question. Voici le message :
"A l'issue de la manifestation du week-end et contrairement aux engagements des organisateurs de laisser les terrains tels qu'ils les avaient trouvés, des structures légères en bois ont été érigées et non démontées. Après vérifications effectuées auprès des services compétents, il s'avère que la parcelle sur laquelle ont été érigées ces structures, a fait l'objet d'une promesse de vente avec prise de possession immédiate par l’État. Il a donc été procédé à leur déconstruction."
« On avait peur que des pro-déviation y mettent le feu »
D’après l’une des deux personnes présentes dans les cabanes en question, les premiers gyrophares bleus ont éclairé le champs vers 21 heures ce lundi 24 mai. « Avec un ami, nous avions décidé de rester sur place pour surveiller les cabanes, explique Julien. On avait peur que des pro-déviation y mettent le feu. À 21 heures 05, tout un attroupement de gendarmes a envahi la parcelle. Ils étaient entre 30 et 40 autour des cabanes et autant sur la route. »
Julien indique encore : « Ils nous ont vus et nous ont contrôlés aussitôt. Ils nous ont fouillés et sortis de la parcelle privée pour nous mettre sur la voie publique. Une fois sur la route, ils nous ont dressés une amende de 135 euros pour non respect du couvre-feu sur la voie publique ».
Il ajoute : « Les gendarmes nous ont escortés sur le haut du site pour que nous ne puissions pas filmer. La destruction des cabanes a commencé après. Il y avait deux pelleteuses Mécalac et un camion d’une entreprise du Chambon-Feugerolles pour récupérer les matériaux. Vers 3 heures du matin, ils sont repartis, laissant le champ complètement saccagé par les chenilles. Tout était détruit ».
« Car on nous a clairement forcés la main ! Que si nous ne signions pas, l’affaire allait se terminer devant le tribunal et qu’on serait exproprié quoi qu’il en soit ». Jean-Michel Simon
« Il est marqué que l’État pouvait en faire ce qu’il voulait même si la vente n’était pas effective »
Le lieu où ont été montées les structures appartient à Jean-Michel Simon, agriculteur à Ouillon à Saint-Hostien. Il a donné l’autorisation au Collectif des Sucs de bâtir ces cabanes dans sa parcelle de 2 000 m². « Le 20 octobre 2020, j’ai signé une promesse de vente de ce terrain à l’État, livre-t-il. Je croyais encore être le propriétaire mais apparemment ce n’est pas le cas. Sur le document, malgré la simple promesse de vente, il est marqué que l’État pouvait en faire ce qu’il voulait même si la vente n’était pas effective. » Il s’offusque des méthodes engagées lundi 24 mai par les forces de l’ordre : « Ce qu’ils ont fait hier soir est honteux ! Et ils ont fait ça après le couvre-feu pour que personne ne puisse intervenir. Ils ont tout anéanti. C’est n’importe quoi ! »
« J’aurais dû résister et tant pis si je devais subir une fois encore leurs méthodes indignes »
Fervent défenseur de ce territoire depuis plus de 20 ans, Jean-Michel Simon explique pourquoi il a tout de même promis à l’État son terrain à la vente. « Car on nous a clairement forcé la main ! Que si nous ne signions pas, l’affaire allait se terminer devant le tribunal et qu’on serait exproprié quoi qu’il en soit. C’est pour ça que j’ai signé. » Il confie encore : « Maintenant, je pense avoir fait une grosse bêtise. Ils m’ont déjà exproprié de mes terrains en 2007. J’aurais dû résister et tant pis si je devais subir une fois encore leurs méthodes indignes ».
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18 commentaires
Si cette action coup de poing type barbouze n'est pas la bonne, l'action insidieuse des anti déviation (et surtout sa médiatisation disproportionnée) est antidémocratique. Il y a eu un enquête publique qui a plébiscité le projet. Tout le monde est informé de son tracé et des enjeux écologique
Il y a aussi des enjeux économiques capitaux pour le bassin du Puy (et il y a aussi ldes questions de sécurité routières). Ces mêmes "écolos" n'ont pas bronché au sujet du maillage autoroutier autour de clermont, ni pour le viaduc de Millau, ni autour d'une deux fois deux fois intégrale jusqu'à Yssingeaux. Pourquoi ?
Le mieux : organiser un referendum local. On verra alors si les protozadistes se plient au concept démocratique....
La question n'est pas d'être écolo ou pas. La question est : faut-il dépenser 200 millions d'euros pour gagner 2 minutes de trajet ? Selon moi, il y a d'autres priorités : la N102 pour rejoindre l'autoroute à Lempdes sur Allagnon, la N88 jusqu'à Mende, la N102 pour rejoindre l'Ardèche. Et je ne parle ici que de la Haute-Loire. Dans l'ensemble de la région AURA, il y a largement plus prioritaire que ces 10 km pour contourner Le Pertuis et St-Hostien. Utilisateur régulier de la portion Le Puy/St-Etienne, la section actuelle de St-Hostien au Pertuis ne m'a jamais posé de problème. Alors pourquoi ne pas envisager 2 petites déviations comme le suggèrent certains et mettre l'argent économisé dans un autre projet ailleurs ?
Une ZAD pas démocratique ? Bien au contraire .. rien ne l’est plus !
Les articles sur cette déviation suscite toujours beaucoup de commentaires.
Deux positions irréconciliables, deux visions du monde antagonistes .Seule porte de sortie possible, créer des déviations au niveau des deux villages concernés. Ce ne serait pas terrible au niveau de l'environnement,mais ce serait moins pire....
Mais comme Wauquiez en fait une affaire personnelle,ce n'est pas gagné.
Une ZAD est toujours une mauvaise solution et n'a rien de démocratique.
Dommage que ce projet provoque tant de haine (surtout politique)? Plutôt de s'opposer systématiquement, il faudrait trouver des solutions, par exemple faire le viaduc à 2 voies (et non 4), comme c'est déjà le cas sur certains viaducs entre St Etienne et le Puy (Pont de Lignon, Bessamorel). S'opposer va retarder le projet de 10 ou 20 ans (comme pour le contournement du Puy). La Haute-Loire a encore besoin d'être désenclavée (égalité d'aménagement du territoire) et il n'y a pas d'alternative vue le relief. (les trains ne peuvent pas aller plus vite).
Inutile d' être devin pour comprendre que l'objectif de ces installations était de préfigurer la création d' une ZAD avec occupation permanente par des opposants habitués à ces actions: montage des abris, mise en route d' un potager, et toute la belle saison pour se préparer à un blocage durable du chantier..Les services de l' état connaissent la musique..
Détruire des cabanes construites illégalement à la hâte sur un terrain privé devrait paraître choquant ? C'est toujours pareil, en France, dès qu'un projet local ne convient pas à quelques-uns, ils font un appel national à tous les squatteurs et on voit les vans colorés s'installer et s'approprier le terrain. La plupart de ces marginaux ne connaissaient pas "Le Pertuis" il y a un mois et ne savent même pas ce que les "bobos" qui les dirigent défendent. ... Si ce projet ne convient vraiment pas, n'y aurait-il pas la solution d'évincer de leur poste ceux qui l'ont préparé ? Au vu de ce que soulève cette affaire, je ne comprends vraiment pas pourquoi Jadot n'est pas président de la République et Célinne Gacon députée, maire et présidente de Région ?
Rien de tel pour alimenter la colère !
On sent poindre la ZAD tant redoutée ..
si nous étions en 1976 ce projet serait moderne et novateur ! Nous sommes en 2021 ... et ce projet est d’un autre temps !
Soutien total aux opposants !
Félicitations !!! Enfin une action rapide et efficace, il ne faut surtout pas laisser s'implanter durablement ce groupe minoritaire lesquels sont contre tout mais prêt à tout et surtout à bloquer une décision démocratique et utile pour une majorité d'utilisateur.
Je ne suis pas sur que certaines personnes au service de l'état maitrisent bien la langue française . Dans la réponse la préfecture parle de "déconstruction" c'est à dire selon Wikipédia "une activité de démantèlement sélective et réfléchie d’éléments bâtis". Je ne pense pas que ça corresponde tout à fait à l'oeuvre des deux pelleteuses qui ont travaillé cette nuit.
Et sinon, ça coûte combien aux contribuables de faire intervenir 2 pelleteuses à 21h30 le lundi de Pentecôte ? Sans compter les gendarmes...
Moi j appel cela de la démocratie.....ce n est pas une minorité sois disant écolos qui vont dicter leurs lois.....partout ou ils ont mis les pieds ça été le bordel......pas de ça chez nous .
Merci au CRS et préfet d avoir fais respecter la loi et donc la démocratie.
Puissent les riverains s'informer et comprendre que deux petits contournements seraient plus malins, plus accessibles et pratiques pour eux, moins ravageurs et moins couteux que 10 kilomètres de 2X2 voies avec 13 ouvrages d'art dont un viaducs de 300 mètres de long.
Le chantier routier le plus cher en France actuellement : plus de 200 millions pour 10 petits kilomètres et pour gagner 2 minutes entre Saint-Etienne et Le Puy ! Vive l'argent magique !
Pour deux petits contournements de Saint-Hostien et du Pertuis, on pourrait faire beaucoup de choses avec la monnaie ! Encore faudrait-il que ceux qui prétendent nous gouverner ne veuillent pas laisser leur trace sur le territoire à n'importe quel prix !
Bienvenue en "démocratie" : pressions exercées par l'État pour acheter les terrains, appropriation avant même la vente, destructions, destructions, destructions,...
Symbole très fort en effet, ce terrain dévasté par la toute puissance des machines. Celline Gacon a raison, c'est bien le mépris qui s'exprime dans cette ridicule démonstration de force que la Préfecture nomme avec une gêne évidente une "déconstruction".
Ce qui se "déconstruit" ici c'est l'écosystème de l'humanité.
Des routes pour des machines, froides et mortes, pour gagner deux minutes sur un trajet de deux heures. Pour aller où ? Pour gagner quoi ? Les habitants du Pertuis et de St Hostien ont sous les yeux leur avenir si ce projet funeste de "déviation" aboutissait, la boue et le désert stérile d'un lieu autrefois beau et fertile. Ils seraient les premières victimes dans ce monde déconstruit par la toute puissance des machines.
Le terrain appartient à l’etat, il est donc normal que les cabanes soient détruites! Fallait les construire dans leur propre jardin sinon ???.
Et non la région ne les soutient pas! Ni les riverains... une minorité qui prend une bien trop grande place dans les médias. Vivement l’avis du conseil d’etat, les régionales, et on en parle plus, en avant les travaux!
Il est tout de même curieux que la Région mette un panneau "La Région soutient votre combat" alors que sur les 226,5 millions d'euros que coûte le projet , 198 millions sont financés par la Région ? Cherchez l'erreur ?