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Maison d'arrêt du Puy (2/2) : Se former pour préparer la sortie
Le 1er janvier 2023, la réforme du travail en milieu carcéral est entrée en vigueur. Depuis près de 30 ans des détenus de la Maison d'arrêt du Puy propose un CAP Cuisine. Une formation qui permet à 8 détenus de préparer leur réinsertion dans la vie professionnelle.
11heures dans les cuisines de la maison d'arrêt du Puy. Les 8 étudiants s'activent derrière les fourneaux situés dans les sous-sols de l'établissement. Certains épluchent des légumes, d'autres préparent une compote de pommes maison tandis qu'un dernier groupe confectionne des mouillettes de pâte feuilleté au paprika qui seront servies avec des oeufs cocottes. Les sourires se lisent sur les visages de tous ces hommes présents et la bonne ambiance règne en maitre dans la cuisine. C'est ici qu'une cinquantaine de repas sont préparés chaque jour pour l'ensemble des détenus de la maison d'arrêt du Puy.
8 détenus inscrits en CAP cuisine
Pour cette année, 8 hommes âgés de 21 à 40 ans ont été sélectionnés pour suivre le CAP cuisine. Pendant 9 mois, ces derniers suivent le même cursus que les étudiants du lycée des métiers Jean Monnet du Puy. Seule différence : leur lieu d'apprentissage. Une formation développée en partenariat avec le Greta du Velay, un centre de formation continue, qui existe depuis déjà 30 ans. Bien entendu, tous les détenus ne peuvent pas intégrer ce CAP, certaines conditions sont à respecter. " Nous lançons un appel à candidature. Ensuite, nous nous réunissons en commission disciplinaire unique. On vérifie que le détenu a un certain niveau d'écriture, lecture et de culture générale. La décision est forcément prise en fonction de son comportement et de l'avis des enseignants et encadrants. On tient également compte de sa catégorie pénale. Ils passent également devant un médecin pour être certains qu'ils ont les capacités physiques", détaille Mathieu Cyril, chef d'établissement.
Chaque détenu perçoit un petit revenu d'environ 200 euros. Une somme touché suite à la signature d'un contrat pédagogique entre le GRETA et ceux souhaitant étudier. " Il s'agit d'une petite rémunération financée entièrement par la Région. Ils touchent environ 2,50€ l'heure", précise Sabine Karupovic, responsable secteur hôtellerie et restauration au GRETA du Puy. Après décision favorable, les détenus sélectionnés ont une période d'essai de 6 semaines.
3 jours par semaine pour apprendre à cuisiner
Trois fois par semaine, les lundis, jeudis et vendredis, Steve Gaucher, formateur du Greta se rend à la maison d'arrêt du Puy. Il enseigne aux 8 détenus sélectionnés pour le CAP Cuisine. C'est la première année qu'il exerce dans ce cadre un peu particulier. "Au début, il a fallu s'adapter. Il y a des protocoles pour l'ouverture des coffres où se trouvent les couteaux, les économes. Au départ, ça effraie un peu. On reste toujours vigilants mais aujourd'hui je ne les vois plus comme des détenus mais comme des stagiaires. Lorsque je les entends dire maintenant je ferai mes pizzas maison je me dit que j'ai tout gagné", livre l'enseignant avec gentillesse. Pâte à choux, pâte brisée ou encore pain burger, les 8 hommes découvrent toutes les bases de la cuisine. " Lors de l'évaluation, ils devront préparer un menu pour 4 personnes en effectuant un plat et une garniture et une entrée ou un dessert", détaille le formateur.
Quand ils ne sont pas derrière les fourneaux, ils sont en classe. Bertrand Fraisse, professeur de l'établissement leur enseigne les maths, le français, l'histoire géographie, l'anglais ou encore la physique chimie. " Cela leur impose un rythme de vie. Pour certains c'est un effort. Leur emploi du temps est bien chargé. Tous les matins ils sont en cuisine et l'après-midi en classe excepté le mardi matin", détaille l'enseignant.
" C'était un mal pour un bien. Ici j'ai trouvé ma passion"
Une formation qui permet à de nombreux détenus d'oublier partiellement ce quotidien pesant. C'est le cas de ce jeune âgé de 29 ans. Ce jour là, il confectionne des mouillettes de pâte feuilleté au paprika avec sérieux et concentration. Arrivé depuis peu à la Maison d'arrêt du Puy, il n' pas hésité à postuler à cette formation. " Ce sont d'autres détenus qui m'ont parlé de cette formation. Je suis reconnaissant de la suivre. ça me permettra de démarrer une nouvelle vie à ma sortie. j'ajoute une corde à mon arc", confie-t-il. La cuisine, un domaine dans lequel il souhaite poursuivre à sa sortie de détention. " J'aimerais continuer dans cette voie à ma sortie. Je pourrai préparer des bons petits plats à ma fille. Suivre sa formation ça me permet aussi d'avoir une remise de peine", précise-t-il. Avec son petit salaire, ce trentenaire peut s'acheter des cigarettes et quelques denrées alimentaires au sein de la maison d'arrêt.
A ses côtés, un autre jeune, lui âgé de 23 ans, prépare le repas. Lui est arrivé il y a deux mois seulement. " Venir ici, c'était un mal pour un bien finalement. J'ai trouvé ma passion. Quand je cuisine, ça m'occupe je pense à autre chose. Chaque soir, je me remémore ce que j'ai appris dans la journée et je relis le cahier dans lequel je note tout", conclut-il. Les 8 détenus en formation seront évalués en mai pour l'obtention de leur CAP.
Une formation pour découvrir l'écoconstruction
Depuis 2021, un autre cursus est proposé aux détenus de la Maison d'Arrêt du Puy. Même principe que le CAP Cuisine, seuls 7 d'entre eux peuvent suivre l'enseignement. " Pour cette formation tout comme pour le CAP cuisine, ils suivent un tronc commun avec un apport théorique notamment en mathématiques", précise Bertrand Fraisse, enseignant de la maison d'arrêt du Puy. Il s'agit d'un cursus à destination de détenus n'ayant pas forcément d'expérience dans le secteur du bâtiment pour une durée de 30 à 40 heures. Parfois au cours de la formation, des sorties hors les murs sont prévues par le formateur. " J'ai eu l'occasion d'en emmener certains construire un mur en pierres sèches. D'autres ont repeint certains espaces communs de la Maison d'arrêt. C'est gratifiant ! ", conclut le professeur.