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Baudelaire, un itinéraire étonnant, du golfe de Guinée au Puy-en-Velay
Il porte le même nom que l'auteur des Fleurs du Mal, chantre des idéaux inaccessibles et des bonheurs fugitifs, ce qui le rend presque aussi célèbre que son homonyme, du moins dans certains quartiers du Puy où son bon caractère et sa joie de vivre sont appréciés de tous.
Baudelaire Tene nous raconte son étonnant parcours, des plages de sable fin des côtes camerounaises jusqu'à la Haute-Loire.
Un destin haut en couleurs et tout en contrastes.
Peux-tu nous parler de ta ville d'origine?
Je viens de Kribi où je suis arrivé quand j'avais 9 ans. Ma famille est originaire des hautes terres de l'ouest du Cameroun, le pays de Bamilékés.
Kribi est une communauté urbaine du Cameroun, chef-lieu du département de l'Océan dans la région du Sud. C'est une importante station balnéaire connue pour ses plages de sable blanc et son port. Il doit y avoir 70 000 habitants environ en comptant la ville et les villages des alentours.
Elle est un point stratégique du trafic maritime dans le Golfe de Guinée et le terminus de l'oléoduc transportant le pétrole brut depuis les champs pétrolifères de la région de Doba au sud-ouest du Tchad.
Le port en eaux profondes de Kribi a commencé à se construire à partir de 2015. À terme, le port sera plus grand que celui de Douala et bénéficiera d'une profondeur maritime plus importante pour accueillir de plus gros navires. Il est prévu également l'aménagement de terminaux spécifiques, entre autres les terminaux aluminium, hydrocarbures, alumine, minéralier, gaz naturel liquéfié, etc.
Comment vivais-tu là-bas?
J'étais taximan et guide touristique. J'ai commencé avec une moto-taxi pendant cinq ans. Il faut dire que c'est un petit paradis là-bas!
Les chutes de la Lobé sont à proximité de la ville et il y a une route intérieure, à travers la forêt littorale, jusqu'à Lolodorf.
Le tourisme dans le littoral de la province du Sud du Cameroun (Département de l’Océan) se développe depuis le bitumage de la route Edéa-Kribi en 1990 ; il est désormais l'un des principaux secteurs d'activité de la ville.
Les grandes plages de sable blanc et des paysages naturels comme les chutes de la Lobé (l'un des rares exemples dans le monde où un fleuve se déverse en chutes dans la mer) attirent les touristes, pour la plupart des résidents de Yaoundé et Douala mais aussi des Camerounais de la classe aisée. De nombreux investissements à but touristique et résidentiel, la plupart de petite échelle, se développent sur le littoral de Kribi.
Que faisais-tu visiter aux touristes?
Parmi les sites touristiques de la région de Kribi, on compte le village de pêcheurs de Londji, baie au nord de Kribi de haute valeur écologique par la présence de mangroves et par sa proximité aux embouchures du Nyong et de la Lokoundje, le fleuve Lobé et ses chutes, les plages de Grand Batanga, le site éco-touristique d'Ebodjé, station de suivi des tortues marines, le parc national de Campo-Ma’an et les parages habités par les peuples pygmées Bagyeli-Bakola le long des routes de Bipindi-Lolodorf, notamment la colline de Bidjouka.
Comment as-tu décidé de venir vivre en France?
Le plus simplement du monde : j'ai rencontré une touriste française à Kribi. Nous nous sommes connus, nous nous sommes mariés et comme ses parents étaient du Puy-en-Velay, je suis venu ici. C'était en 2011.J'ai d'abord travaillé dans une boîte d'intérim, comme manoeuvre de chantier puis dans le nettoyage. Puis j'ai appris à faire de la peinture et à m'occuper des espaces verts. J'ai aussi travaillé dans la sécurité et comme éboueur.
L'adaptation a été difficile?
Le plus dur, ça a été le climat. Il fait froid l'hiver ici. Et puis il a fallu s'intégrer. Les repas, les relations avec les gens, le rythme du temps, tout change. Il a fallu s'adapter. Ce n'est pas la même culture. J'ai assez vite joué au football dans une équipe de vétérans. Ca a aidé à mon intégration.
Et puis quand tu as tout quitté c'est difficile de trouver du travail et de se faire à une nouvelle vie.
Quelque chose te manque de là-bas?
Oui, la nourriture! Kribi est réputée pour ses restaurants à spécialités «fruits de mer». C'est vrai que la nourriture au Cameroun est excellente: j'aime donc les plats traditionnels sauf ceux qui prennent une éternité à cuisiner. Ce que j'aime c'est un bon ndolè avec des miondo, de bonnes crevettes, du saumon fumé ou un plat de mbongo avec du macabo rouge. Mais la grande spécialité du Cameroun ce sont les énormes crevettes ou gambas (elles ont d'ailleurs donné leur nom au pays). Heureusement en France et au Puy-en-Velay on trouve facilement des magasins africains.
Dans un ordre plus privé, ma famille me manque. J'ai laissé deux enfants au pays, ils ont 14 et 12 ans.
Comment imagines-tu ton avenir? en France ? au Cameroun?
Pour l'instant mon avenir est en France. J'ai une carte de résident valable dix ans et renouvelable. Cependant le Cameroun et Kribi en particulier se développent comme je l'ai expliqué. J'ai peut-être une expérience à valoriser là-bas. Il faudra voir les opportunités. Je pourrais y retourner en créant quelque chose. Je n'ai que 46 ans.