Une bêêêlle journée avec les brebis noires du Velay à Cussac-sur-Loire

Le 12 mai 2025, une vingtaine de personnes se sont réunies au Puy-en-Velay à l’appel d’Alliance VITA pour exprimer leur opposition au projet de loi sur la fin de vie. Un positionnement tranché, à rebours de l’opinion publique majoritaire, qui soulève des questions éthiques, pratiques et philosophiques.
Alliance VITA ? C'est un peu Contre tout
Alliance VITA est une association du mouvement « pro-vie » en France militant principalement contre l'avortement, l'euthanasie et contre toute union juridique entre personnes de même sexe. En savoir plus : Wikipédia.
L'Assemblée nationale a entamé, ce lundi 12 mai 2025, l'examen en séance publique de deux propositions de loi, l'une sur les soins palliatifs et l'autre sur la fin de vie.
Raphaëlle de Rorthays, responsable locale de l’association, alerte sur les implications du texte, qu’elle considère comme « un basculement culturel irréversible ».
Interrogée sur le respect de la liberté individuelle du patient, elle recentre aussitôt le propos : « on est là vraiment pour exprimer notre refus de l'euthanasie, du suicide assisté ».
« Le vrai enjeu, c’est l’accès aux soins palliatifs »
“En Haute-Loire, il n’y a pas de véritable unité de soins palliatifs”, rappelle Raphaëlle de Rorthays. Pour elle, tant que cet accès n’est pas garanti sur tout le territoire, permettre une aide à mourir pose un problème éthique fondamental. « On ne peut pas proposer à une personne de mourir, si elle n’a pas pu être accompagnée correctement jusqu'au bout. »
« Le vrai scandale, ce n’est pas l’absence d’aide à mourir, c’est l’absence d’accès aux soins », résume Raphaëlle de Rorthays.
« Aujourd’hui, 50 % des personnes qui auraient besoin de soins palliatifs n’y ont pas accès. Dans ces conditions, parler de liberté de choix n’a pas de sens. »
Une inquiétude partagée par de nombreux acteurs, y compris favorables au texte, qui plaident pour un développement concomitant et prioritaire des soins palliatifs. Le gouvernement affirme d’ailleurs vouloir investir, en plus, un milliard d’euros d’ici 2034 dans ce secteur. Environ 50 % des personnes ayant besoin de soins palliatifs n’y auraient effectivement pas accès, selon la Cour des comptes.
Clause de conscience : des garanties jugées insuffisantes
Raphaëlle de Rorthays exprime une autre préoccupation : la clause de conscience. « Le texte dit qu’on peut refuser de faire l’acte, mais qu’on doit orienter vers quelqu'un qui va le faire. Ce n’est pas une clause de conscience, c’est une injonction à collaborer. »
Le projet de loi prévoit bien une clause de conscience pour les soignants, sur le modèle de celle qui existe pour l’IVG. La nuance repose sur l’obligation d’orientation : il ne s’agit pas de pratiquer l’acte, mais d’assurer la continuité du droit du patient. Ce point soulève des débats éthiques, notamment chez les professionnels qui craignent d’être contraints de participer indirectement à un processus qu’ils désapprouvent, même s'ils sont majoritairement pour.
Une posture compassionnelle, mais un refus du libre arbitre
Derrière le discours centré sur l’écoute et l’attention à la souffrance, l’association campe sur une ligne inflexible.
Tout au long de l’entretien, Raphaëlle de Rorthays insiste sur l’écoute, la souffrance, le lien humain, la solidarité. Ce discours empreint de chaleur humaine masque toutefois un principe non négociable : le refus catégorique d’une aide à mourir, même encadrée, même exceptionnelle.
À aucun moment, la possibilité d’un choix individuel encadré n’est envisagée pour elle. Une personne qui demande à mourir ? C’est forcément qu’elle n’a pas été assez écoutée, assez aimée, assez soignée. Sa demande est toujours lue comme un symptôme, jamais comme une expression libre.
Défendre les femmes... en leur interdisant l'avortement
Ce refus du libre arbitre dans la souffrance est pourtant central dans les revendications des partisans de l’aide à mourir. Et il fait écho à d’autres positions historiques d’Alliance VITA, notamment dans son opposition farouche à l’IVG. Là aussi, l’association prétend défendre les femmes contre l’« avortement par détresse », en leur proposant une « écoute », mais sans jamais leur reconnaître le droit de choisir.
"Indépendamment de son géniteur, Dieu a un projet avec cet enfant issu d'un viol". Inès de Franclieu, pro-vie
Cet argument rappelle ceux d'Inès de Franclieu, spécialiste de l'éducation affective et sexuelle, qui partage sur le site du Salon Beige, site caractérisé de catholique traditionaliste, pro-vie, opposé à l'euthanasie, au suicide assisté, à l'avortement, au mariage homosexuel et à la « théorie du genre ».
Inès de Franclieu analyse ainsi : "Dans le cas du viol, il est important de différencier deux aspects. D’une part, il y a ce terrible crime brutal commis contre une femme. D’autre part, il y a cet enfant, aimé de Dieu, qui a été conçu. Indépendamment de son géniteur, Dieu a un projet avec cet enfant issu d'un viol. Aussi terribles que soient les blessures qui ont été infligées à la mère, l’enfant peut devenir un motif de consolation pour elle et lui apporter une nouvelle espérance".
La sacralisation de la vie
Pour Alliance VITA, le soin doit aller jusqu’au bout, sans exception. Même quand la médecine reconnaît ses propres limites. Même quand les soignants eux-mêmes, parfois, témoignent de situations où l’acharnement ou la souffrance deviennent indignes.
L’aide à mourir n’est pas vue comme une option extrême dans un parcours de soin difficile, mais comme une transgression pure. « Donner la mort n’est pas un soin », répète la responsable locale. Cette phrase, devenue slogan, exclut d’emblée toute possibilité de nuance.
« Nous, ce que nous exigeons, c'est une loi de programmation pour le grand âge, une loi de grand soin, une loi de programmation pour des soins palliatifs. »
Ce positionnement repose sur une logique bien connue : la sacralisation de la vie biologique, coûte que coûte. C’est une constante dans les combats d’Alliance VITA. La vie est sacrée. La volonté individuelle, elle, passe après.
« La loi doit offrir un cadre sécurisant pour que les personnes, jusqu'à leur dernière minute, soient accompagnées et soulagées. Sans acharnement thérapeutique, mais sans donner la mort. »
Alliance VITA ne s’oppose pas seulement à la légalisation de l’euthanasie. Elle refuse son existence même comme débat légitime. Et en recourant à des formules vagues, mais lourdes de charge émotionnelle (« socle de la société », « basculement culturel irréversible »), elle mobilise des ressorts plus émotionnels et identitaires qu’un débat éthique ouvert.
Vos commentaires
Se connecter ou s'inscrire pour poster un commentaire
1 commentaire
Pauvre France!
Quand est-ce que Retailleau va dissoudre ces dangereux groupuscules sectaires?