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Le Bac de philo, épreuve fondamentale pour certains, une hérésie pour d’autres

Par nicolas@zoomdici.com , Mise à jour le 14/06/2023 à 12:00

« Vouloir la paix, est-ce vouloir la justice ? » « L’art nous apprend-il quelque chose ? » Vous avez 4 heures. En Haute-Loire, ils étaient ainsi près de 1 650 lycéens à prendre la plume en ce mercredi 14 juin 2023 pour plancher aux choix sur deux dissertations et un commentaire de texte.

Un marronnier, en jargon journalistique, est un sujet d’article qui revient immanquablement chaque année. La rentrée des classes, la fête foraine, le Roi de l’Oiseau, les 15 km du Puy...et le bac de philo. Cette édition 2023, ce sont Levis-Straus, Adam Smith, le Bonheur, la Justice, l’Art et la Liberté qui ont été littéralement autopsiés « au plus grand bonheur » des 1 654 candidats altiligériens, embarqués dans le même bateau.

« Je ne suis pas du tout stressé car je n’ai pas révisé »

Sur place, Zoomdici a rencontré quelques uns des 362 matelots présents au lycée Simone Weil, avant qu’ils n’essuient la tempête de mots à grand coup de matière grise. Et chose est de constater que le stress...est resté dans la cale du navire. « Je ne suis pas du tout stressé car je n’ai pas révisé, confie un élève en bac technologique. Pour moi, le bac ne se joue sûrement pas sur la philosophie. C’est une matière de seconde zone à mon sens ».

Le sujet de l’épreuve de philosophie du bac général

  • Le bonheur est-il affaire de raison ?
  • Vouloir la paix, est-ce vouloir la justice ?
  • Explication d’une partie de La Pensée sauvage, texte de Claude Lévi-Strauss

Le sujet de l’épreuve de philosophie du bac technologique

  • L’art nous apprend-il quelque chose ?
  • Transformer la nature, est-ce gagner en liberté ?
  • Explication d’une partie de Théorie des sentiments moraux, texte d’Adam Smith

« C’est surtout que je ne comprends rien à la philo »

Pour Tristan, 17 ans, et Camille 18 ans, tous deux en cursus général, même constat. « Moi, j’y vais un peu à la « Wanegaïne  », partage le premier. Je n’ai pas entendu beaucoup de monde qui avait vraiment révisé. Ce n'est pas que je manquais de temps pour ça, mais c’est surtout que je ne comprends rien à la philo. C’est une matière qui reste très floue pour moi. »

Sa camarade Camille complète : « On verra bien. Cette épreuve n’est pas primordiale pour moi ».

Le bac ? C’est Napoléon Bonaparte qui le crée en 1808 après la constitution des lycées en 1802. Son étymologie, « bacca laurea », désigne en latin médiéval la « couronne de lauriers » remise aux vainqueurs. 

« Je trouve ça inadmissible que nous soyons notés coef 8 alors que c’est une matière que nous n'avons étudié qu’un an »

Le succès à l’épreuve reste pourtant sensible, car la note obtenue permet à l’élève de bonifier ses points d’un coefficient 8 pour la voie générale et 4 en voie technologique. Pour Lucas, candidat en cursus général, cette valorisation est un non-sens. « Je trouve ça inadmissible que nous soyons notés coef 8 alors que c’est une matière que nous n'avons étudié qu’un an, soulève-t-il. Coef 8 sur l’histoire-géo, matière qu’on pratique depuis le primaire et le collège, serait bien plus logique ! Là, avec la philo, on y va un peu au talent ! »

Il ajoute aussi : « Les rumeurs disent que c’est une matière approximative, que le prof juge selon son propre ressenti. Rien que ça démontre que ce n’est pas une matière juste ».

À la question de savoir comme se prépare une épreuve de philo au bac, Lucas répond : « Avec des vidéos Tiktok et Youtube. En cours, je ne pense pas que beaucoup d’élèves suivent attentivement ce qu’enseigne le prof ».

Lucas (au centre), avec ses copains, tous dans le même bateau pour la philo.
Lucas (au centre), avec ses copains, tous dans le même bateau pour la philo. Photo par Nicolas Defay

En chiffre, ça donne ça ▼

Ils sont 12 446 élèves à passer le fameux baccalauréat dans les quatre départements auvergnats en cette année 2023.
En Haute-Loire, 1 654 lycéens ont philosophé sur les 2 100 futurs potentiels bacheliers.
Le plus jeune altiligérien à passer le bac a 16 ans et le doyen, 21 ans. À l’échelle de l’académie, c’est un adolescent puydomois de 15 ans qui remporte la palme du plus jeune candidat. Le plus vieux a 50 printemps.

« Il y a tout lieu de penser qu'ils sont prêts pour l'épreuve d'aujourd'hui »

Yoanna Sauvant-Graindorge, proviseure du lycée Simone Weil, décrit quant à elle l’ambiance en ce matin du 14 juin 2023. « Il y a 362 élèves qui composent aujourd’hui. Donc, forcément, ça génère un peu de stress pour les équipes ».

Elle souligne le retour enfin à la normale du déroulement de l’épreuve : « Contrairement aux éditions précédentes, les élèves ont pu bénéficier d'une année entière sans distanciel, sans coupures importantes, dans un calendrier respecté. Il y a tout lieu de penser qu'ils sont prêts pour l'épreuve d'aujourd'hui ».

Saviez vous que le plus jeune bachelier de toute l’histoire du bac en France avait 11 ans et 7 mois durant les épreuves (en 2019). À l’opposé, Marcel Masegosa est, à 93 ans, le plus vieux candidat au baccalauréat de l'histoire. Il a décroché le sésame en 2015. (Source : aufutur.fr)

 Yoanna Sauvant-Graindorge aux cotés d'un enseignant avec les sujets encore scellés.
Yoanna Sauvant-Graindorge aux cotés d'un enseignant avec les sujets encore scellés. Photo par Nicolas Defay

« S'il y a bien une matière qui est fondamentale, c'est bien la philo »

Zoomdici lui a demandé ce qu’elle pensait de l’épreuve de la philosophie, matière sujette à critiques de la part des futurs bacheliers. « C’est une matière fondamentale ! On ne peut pas être un citoyen si on n'a pas d'éthique. Et la philosophie, cette spécificité française, amène tous nos jeunes à avoir de l'éthique, à avoir un esprit critique, à être capable de se poser des questions, de ne pas subir le monde mais de l’agir. Donc à mon sens, s'il y a bien une matière qui est fondamentale, c'est bien la philo. Tout le monde devrait en faire, jeunes et vieux ».

Le baccalauréat est institué pour les filles en 1919, soit cent onze ans après l’institution de celui des garçons en 1808. Il ne devient identique pour les deux sexes qu’en 1924. Enfin, ce n’est qu’en 1971 que les nouveaux lycées sont systématiquement mixtes. Quant à l’École polytechnique, fondée en 1794 par la Convention, elle s’ouvre aux filles en 1972. (source : gouvernement.fr)

« Avant d’ouvrir un paquet scellé, nous les faisons contresigner par des élèves »

Est-ce que les sujets peuvent être victimes d’une fuite avant l’heure fatidique ? « Ça ne risque pas d'arriver !, assure Yoanna Sauvant-Graindorge. Je peux vous promettre que tout est ultra-sécurisé. Les sujets ont été récupérés, scellés, il y a maintenant une bonne semaine. Ils ont ensuite été versés au coffre verrouillé. Ils restent sous la bonne garde de mon adjointe qui ne laissera entrer personne dans le lieu. Les sujets sont détenus ainsi jusqu'à leur ouverture. »

Et de terminer : «  Avant d’ouvrir un paquet scellé, nous les faisons contresigner par des élèves. Ceci pour justifier qu'il n'y a eu aucune fuite au préalable et à l’interne sur les documents ».

Dans le hall d'accueil du lycée Simone Weil, le stress ne semble pas être de la partie.
Dans le hall d'accueil du lycée Simone Weil, le stress ne semble pas être de la partie. Photo par Nicolas Defay

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