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L’église des Carmes en confession à la Chambre Régionale des Comptes

Par nicolas@zoomdici.com , Mise à jour le 12/04/2023 à 15:30

Comme pour l’affaire du Marché couvert au Puy, l’église des Carmes est passée à l’isoloir de la Chambre régionale des Comptes pour s’absoudre de tous ses péchés. Les experts ont ainsi soulevé plusieurs zones d’ombres en la maison du Seigneur.

La Chambre Régionale des Comptes ? Quesako ? C’est une juridiction administrative financière française chargée de vérifier les comptes des collectivités locales. Elle est composée de magistrats, de rapporteurs, de vérificateurs et d’administratifs. En gros, ils fouillent et refouillent tous les recoins des comptes d’une institution (Mairie, Com com, Com d’agglo…) pour y déceler le moindre dysfonctionnement de gestion. Et ce qu’ils ont trouvé ne s’apparente pas à quelques grains de poussières cachés sous les tapis de la mairie, mais plutôt à des gros sacs de détritus posés ici ou là.

« La commune bénéficie d'un soutien financier marqué de la région Auvergne-Rhône-Alpes »

Pour les points positifs, le Rapport de la Chambre Régionale des Comptes (CRC) admet tout de même une situation financière satisfaisante de la municipalité ponote. « La collectivité se caractérise par un endettement qui demeure soutenable », est-il mentionné. Il est ajouté aussi : « La commune bénéficie d'un soutien financier marqué de la région Auvergne-Rhône-Alpes, en termes de subventions d'investissement. De 2017 à 2021, la région a ainsi alloué quelque 16,4 millions de subventions d'équipement au Puy ».

« De 2017 à 2021, les décisions attributives ont atteint un montant cumulé de subventions de 16 373 779 euros au titre de différentes opérations, avec un taux de subventionnement allant de 10 % à 80 % ». Rapport de la CRC

Ce rapport est disponible au grand public depuis jeudi 6 avril 2023, après avoir été présenté en Conseil municipal vers 20 heures. Vous pouvez le parcourir sur le site de la Chambre régionale des Comptes à partir de ce LIEN. Analyses, rappel à la loi et observations composent en grande majorité le document épais de 58 pages.

Des sous et des prières

Sans revenir sur le dossier phare qui traite l’affaire de la Délégation de Service Public (DSP) du Marché Couvert, sujet qui a fait l’objet de deux articles précédemment, partons aujourd’hui pour un voyage qui relie le saint cœur du Puy aux belles pierres indonésiennes. Les magistrats de la Chambre régionale des Comptes ont ausculté le lourd dossier de la rénovation de l’église des Carmes.

Après un détail de son historique démontrant une succession de choix pas forcément judicieux de la municipalité notamment avec l’entreprise retenue pour faire les travaux, le rapport diabolique rappelle les avenants successifs nécessaires pour terminer l’édifice sacré.

Le rapport souligne la liquidation judiciaire de l’entreprise choisie par la Ville, un an après seulement la signature du contrat. « La situation financière des candidats réalisée par la commune s'est contenue à la seule revue du chiffre d'affaires, note la CRC. Elle n'a pas étendu son analyse à la revue de l'ensemble des indicateurs d'appréciation de la situation financière et du bilan de la société, malgré un chiffre d'affaires de la société s'érodant rapidement ».

Les pierres de la discorde

La Chambre semble aussi interpelée sur l'origine des pierres dites « brèches volcaniques », identiques aux pierres anciennes de l'édifice issues de carrières locales. Cette exigence a été soutenue par les services de l'État, en l'occurrence la direction régionale de l'action culturelle.

« Alors qu'aucune carrière de France n'était en capacité d'approvisionner l'intégralité des besoins en matériaux du chantier au regard du volume de pierres nécessaire et des contraintes de taille et de qualité requise », s’étonnent les experts de la CRC.

Quand la facture d’origine fait des petits

Du coup, c’est parti pour un petit voyage en Indonésie où la pierre est dense et bon marché...enfin au début. Si en 2016, le m³ de cailloux asiatiques taillés valait 2 740 euros, il avoisine les 8 000 euros fin 2022. Un budget bien trop lourd pour terminer le chantier. La solution se trouve alors sous le soleil de Turquie où les pierres possèdent, selon les architectes responsables des travaux, les mêmes caractéristiques que la brèche volcanique de Velay.

Conséquence ? On efface tout et on recommence. Des 1,4 millions d’euros de départ (facture demandée par la première entreprise qui a fait faillite), la douloureuse grimpe à 3.5 millions d’euros.

Un candidat en redressement judiciaire peut candidater à un appel d’offres

Pour sa défense, le Maire du Puy Michel Chapuis indique la complexité de prévoir de tels aléas. « Concernant la solidité financière de l'entreprise Le Compagnon (entreprise qui a fait faillite, Ndlr), (…) son chiffre d'affaires était certes en baisse sur la période 2013-2015 mais tout de même supérieur au montant de cette opération ».

Il ajoute sur le sujet : « De plus, l'élimination d'un candidat dont le chiffre d'affaires diminue voire placé en redressement judiciaire, n'apparaît pas comme un motif suffisant au vu de la jurisprudence actuelle ». Une affirmation certifiée par différents sites qui abordent le chapitre législatif des Marchés publics.

Pierre qui roule...

Pour la pénurie des pierres nécessaires à la rénovation, Michel Chapuis lance que « la Commune a souhaité poursuivre et achever ces travaux largement engagés, dans un objectif de valorisation patrimoniale de cet édifice classé ».

Il conclut avec cette analyse : « Par ailleurs, il est à souligner que le reste à charge financier pour la Ville est à relativiser compte tenu de l'obtention de financements complémentaires notamment de la part de l'État (300 000 euros) ».

« Croyez-moi, je ne suis pas fier qu'elles ne proviennent pas de nos terres. Mais aucune extraction n'est effective chez nous. Ce chantier a vraiment joué de malchance. Mais ce chantier, il faut le finir ! », avait insisté Michel Chapuis dans un article de Zoomdici daté du 22 décembre 2021. La messe est dite. 

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