Si la chaudière n’a toujours pas posé sa première pierre, elle enflamme déjà les esprits. Après plusieurs actions organisées par le collectif anti-incinérateur dans la zone d’activité de Polignac, puis une première manifestation au Puy samedi 10 septembre, les opposants continuent de souffler sur les braises de la contestation en se regroupant face à la préfecture ce mercredi 14 septembre.
Ils sont environ 150 habitants du bourg et des villages attenants, sympathisants des communes voisines ou encore élus du Conseil municipal présents pour signifier leur colère quant à la future construction d’une « chaudière environnementale » dans l’un des « beaux villages de France ».
« À quatre reprises, ils ont annulé leur rendez-vous. Pourquoi ? On ne sait pas »
Pour dénouer les ficelles de ce dossier explosif, revenons deux ans en arrière. « En septembre 2020, les gérants de la société Altriom sont venus en mairie pour nous parler de leur projet, explique Georges Valladier, 1er adjoint à Polignac. Ils avaient alors quatre idées. Construire un méthaniseur, une chaudière CSR, un projet sur les granulés de bois et une usine de carton. Ce jour-là, on leur a dit clairement que nous ne prendrions aucune décision sans l’avis de la population ».
Il continue : « Ils nous ont alors proposé de rencontrer les habitants de Polignac à quatre reprises. Et à quatre reprises, ils ont annulé leur rendez-vous. Pourquoi ? On ne sait pas. Et puis le 13 juillet, deux permis de construire sont arrivés dans les boites aux lettres de la municipalité. La méthanisation et la chaudière. Nous les avons refusés en bloc tant les dossiers étaient imprécis et opaques ».
Demande d’une étude d’impact et d’une enquête publique
La suite ? Elle se trouve entre les murs du bâtiment d’État. Ce mercredi 14 septembre, une délégation de trois personnes est alors invitée par le préfet Eric Étienne pour qu’il puisse entendre la crainte des habitants et les requêtes du collectif. « Nous avons demandé à ce qu’une étude d’impact soit faite pour évaluer les rejets toxiques que ces installations dégageraient à longueur de journée, livre Evelyne Cornut, Présidente du Comité de protection de l’environnement de Polignac. Et également le dépôt d’une enquête publique pour que la population ait accès à la totalité du dossier. »
Elle complète aussi : « Nous avions peur que le Préfet signe les permis de construire comme ça, sans prendre en compte la colère des opposants. Mais il nous a certifié qu’il n’avait pris aucune décision et qu’il allait recevoir tous les acteurs concernés par le projet »
Suite à la rencontre avec le préfet, les opposants aux projets d’Altriom ont eu gain de cause sur la mise en place d’études approfondies par l’Autorité Environnementale. Une enquête publique sera également déclenchée.
« Il faut plutôt repenser la base du problème et produire moins de plastiques »
Au-delà du projet en lui-même, Evelyne Cornut met en exergue l’incohérence de la chaudière CSR. « L’installation souhaitée par Altriom a pour vocation de brûler des plastiques non recyclables et des bois B (Déchets de bois faiblement traités, peints ou vernis, Ndlr). De nombreuses études démontrent que les rejets sont dangereux et toxiques. Mais quel en est le sens de tout ça ? Il faut plutôt repenser la base du problème et produire moins de plastiques plutôt que bâtir encore et encore des structures pour encaisser nos déchets ».
Elle insiste en ce sens : « Cette chaudière dite environnementale, qui est d’ailleurs toute sauf environnementale, va à contresens de ce que veut engager le gouvernement pour réduire nos déchets ! ».
Georges Valladier partage sa propre analyse sur le dessein d’Altriom. « L’entreprise trie les déchets mais les cimenteries ne veulent pas de leurs CSR (Combustibles solides de récupération). D’autre part, leur compost n’est pas homologué. Les dirigeants sont ainsi embarrassés de toute cette matière inutilisable. Une telle chaudière leur permettrait de pallier ce problème là ».
« Les études d’impacts commandées par la préfecture plus l’organisation de l’enquête publique vont bloquer les projets d’Altriom pendant des mois. Même si nous sommes contents de ce moratoire, nous n’allons certainement pas baisser la garde ! » Evelyne Cornut
« Pourquoi s’obstinent-ils à fournir des documents d’une opacité déroutante ? »
L’ensemble de l’équipe municipale est vent debout contre les projets montrés du doigt. Tout comme de nombreux habitants. « Nous avons peur pour nous, nos enfants et les générations futures, s’exprime l’un des opposants. Ce n’est pas possible que cet incinérateur soit construit. Nous n’en voulons pas et nous maintiendrons la pression jusqu’au bout. »
Il conclue avec une série de questions : « Pourquoi n’y a t-il eu aucune communication sur les projets de la part des dirigeants ? Pourquoi s’obstinent-ils à fournir des documents d’une opacité déroutante ? Si tout est propre comme ils le prétendent, pourquoi ne le prouvent-ils pas avec des études complètes et officielles ? »