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Antenne 4G/Mazeyrat d’Allier: une erreur de droit pour remettre tout en cause ?

Par nicolas@zoomdici.com , Mise à jour le 16/08/2022 à 15:30

À quelques jours du 23 août, date à laquelle le relais 4G de Mazeyrat se doit d’être coupé suivant la dernière décision de justice, le rapporteur public a rendu, ce mercredi 10 août, ses conclusions devant le Conseil d’État. Il s’oppose à cette suspension à cause...d’une erreur de procédure judiciaire.

« Ce n’est même pas sur le cœur de l’affaire qu’ils ont discuté mais sur un problème de protocole judiciaire, se désolent Géraldine et Frédéric Salgues, le couple propriétaire du Gaec du Coupet. Ils n’ont pas parlé de notre cheptel en proie à une mortalité anormale malgré des dizaines d’analyses réalisées. Ni de notre production de lait qui s’est effondrée depuis la mise en marche de l’antenne au mois de juillet 2021. Ni encore de nous, des répercussions sur notre vie et notre avenir et de cette fatigue mentale qui nous accable ».

Ils ajoutent : « Nous savons que rien n’est joué car c’est seulement l’avis du rapporteur public. Mais nous sommes clairement dégoûtés par ce qu’il se passe, toute cette lenteur, ces hauts et ces bas. Nous n’en pouvons plus ».

« Notre avenir ? Je ne sais pas. On n’arrive plus à se projeter. Mon fils Nathan a eu son bac cette année. Il avait le projet de reprendre la ferme et de s’installer ici. Tout est compromis à présent ». Géraldine Salgues

Le 23 août, relais coupé ou pas

D'après le jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand rendu le lundi 23 mai : « Il est enjoint à l’État et à la SA Orange d’arrêter le fonctionnement de l’antenne de radiotéléphonie mobile implantée sur la commune de Mazeyrat d’Allier, ainsi qu’à tous les opérateurs, pendant une durée de deux mois, à compter d’une date arrêtée en concertation avec l’expert judiciaire, M. Puyt, en lien avec le préfet de la Haute-Loire, aux fins d’organisation de la sécurité et des appels de secours dans la zone concernée, la cessation de fonctionnement devant être effectif dans un délai de trois mois au plus ». Soit le 23 août 2022, précisément.

Selon le site conseil-etat.fr et celui de dalloz.fr, le rapporteur public est un membre de la juridiction administrative ayant pour mission d'exposer publiquement, et en toute indépendance, son opinion sur les questions que présentent à juger les requêtes et sur les solutions qu'elles appellent.

Ses noms d’autrefois ? Le commissaire du roi et Le commissaire du gouvernement

La fonction de rapporteur public a été créée au sein du Conseil d'État par les ordonnances des 2 février et 12 mars 1831. Sa dénomination à l'époque est « maître des requêtes faisant fonction de ministère public » ou « commissaire du roi ». Mais l'appellation sous laquelle cette fonction reste la plus connue, celle de « commissaire du gouvernement », avait été introduite sous la seconde République en 1849. Elle subsistera jusqu'en 2009, date à laquelle elle sera remplacée par celle de « rapporteur public », qualification moins ambiguë que la précédente pour les juridictions administratives et en 2015 pour le Tribunal des conflits.

« Il propose la solution qui, suivant sa conscience, lui paraît la plus appropriée »

Le rapporteur public expose d’abord les circonstances du litige, l’ensemble des arguments échangés entre les parties pendant l’instruction et les questions posées par l’affaire. Il rappelle les règles de droit applicables au litige et les décisions existantes en lien avec l’affaire (la jurisprudence) qui pourraient orienter la solution.

Puis il fait connaître son appréciation sur ces points et propose la solution qui, suivant sa conscience, lui paraît la plus appropriée.

Une fois l’audience publique terminée, la décision est mise en délibéré. Le rapporteur public peut assister au délibéré, sauf si une des parties s’y oppose. Cependant, il ne fait pas partie de la formation de jugement et ne participe donc pas à la prise de décision.

Il appartient aux seuls juges qui statuent sur l’affaire de décider s’ils suivent la proposition du rapporteur public ou s’ils adoptent un jugement en tout ou partie différent de cette proposition.

« D’après son analyse, nous aurions dû attendre la réponse de la préfecture »

Orange comme tête de pont et les trois autres opérateurs partageant l’antenne (Bouygues Télécom, Free et SFR) s’opposent à la décision de justice du 23 mai. Le 10 août, entre les murs de la plus haute juridiction administrative, le rapporteur public n’a alors pas remis en cause la réalité de l’hécatombe à l’œuvre dans le Gaec du Coupet mais s’est uniquement concentré sur une erreur de droit pour neutraliser l’ordonnance du tribunal.

Selon lui, la procédure pour que le relais soit arrêté même de façon temporaire n’a pas été respectée. « D’après son analyse, nous aurions dû attendre la réponse de la préfecture avant d’aller porter l’affaire devant le tribunal administratif, déplore Géraldine Salgues. Pourtant, c’est le préfet lui-même qui nous a dit de nous lancer dans cette voie et dans ce délai ».

« Si Orange et les autres sont certains que le mal ne vient pas du relais, alors pourquoi ne le prouvent-ils pas justement en arrêtant les émissions ? » Frédéric Salgues

« Étrangement, il n’y a aucune mouche dans la salle de traite. C’est normal ça ? »

Cela fait maintenant plus d’un an que le Gaec du Coupet regarde cette antenne de la discorde, implantée à 250 mètres de l’exploitation. « Nos bêtes continuent de mourir de façon inexpliquée, partage le couple. Récemment, c’est un veau et trois vaches qui se sont ajoutés à la cinquantaine de bêtes mortes. Notre production de lait, c’est la catastrophe. Étrangement, il n’y a aucune mouche dans la salle de traite. Aucune ! C’est normal ça ? »

Frédéric Salgues confie encore : « Nous avons effectué toutes les analyses possibles, opérées par des experts, sur la teneur de la terre, de la nourriture, des médicaments pour les bêtes, de l’eau, du lait...tout ! Il n'y a que les nuisances possibles de l’antenne qui n’ont pu être vérifiées car les opérateurs se refusent à couper les ondes quelques temps. » Il demande alors : « Si Orange et les autres sont certains que le mal ne vient pas du relais, alors pourquoi ne le prouvent-ils pas justement en arrêtant les émissions ? »

« Nous ne sommes pas contre le progrès, ni l’implantation des antennes si cela peut améliorer les communications. Et s’ils la déplacent pour que les nuisances s’arrêtent enfin, alors nous serions bien entendu satisfaits ». Le Gaec du Coupet

« Pour l’instant, nous attendons. Et nous agirons en fonction »

La FDSEA Haute-Loire, (Fédération Départementale des Syndicats d'Exploitants Agricole), dans l’aventure depuis le début pour défendre le Gaec, s’exprime peu sur le sujet. « Le rapporteur public n’a fait que son travail, finalement, livre Anne Rogues, Directrice de la FDSEA 43. C’est tout a fait normal et nous l’avions prévu. Maintenant, nous attendons avec la plus grande attention le délibéré du jugement qui devrait logiquement être mis à notre connaissance avant cette date du 23 août. Pour l’instant, nous attendons. Et nous agirons en fonction ».

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