L’annonce a fait l’effet d’une explosion sur les ondes. Le grand chef de Système U, Dominique Schelcher, a soufflé dans les micros du Grand entretien de France Inter le constat suivant : « Ce qui va se passer, ce n'est pas un mois de mars rouge : il va y avoir malheureusement de l'inflation pendant tout le premier semestre 2023, il va être sous tension ».
Avant de rajouter : « Jusqu'à présent, le chiffre est de 14 à 15 % d'inflation alimentaire : mon pronostic ce matin, c'est une inflation malheureusement supplémentaire, dans les semaines et les mois qui viennent, d'environ 10 % ». Autrement dit, le consommateur déboursera 25 % de plus qu’il y a un an pour avoir les mêmes produits.
« C'est 15 % de hausse qui nous sont demandés par les industriels »
Actuellement, les grandes surfaces sont en plein bras de fer avec les industriels de grandes marques. « C'est 15 % de hausse qui nous sont demandés par les industriels. Nous, on discute ». Les négociations devraient se terminer mardi 28 février en soirée. « Nous avons l’obligation légale de trouver un accord », précise Dominique Schelcher.
« Si nous n’avions pas pris sur nos marges depuis la crise du Covid, l’inflation serait bien plus importante que ce qu’elle est aujourd’hui ». Dominique Schelcher
Motus et bouche cousue
Pour rétrécir l’angle de l’article dans un spectre local, nous avons bien tenté de joindre les directeurs de Super U d’Aiguilhe, d’Yssingeaux et de Langeac. En vain.
Auchan à Brives-Charensac nous a invité à voir avec la communication nationale. Et pour la direction de Casino#hyperFrais (ex-Géant Casino) à Vals-près-le-Puy : « Nous ne partagerons ni donnée ni aucune information sur ce sujet ».
Quand à la direction de Casino à Chaspuzac : « Je ne peux rien vous dire. Les groupes sont justement en pleine négociation avec les industriels. Nous, de notre côté, nous n'avons pas la main dessus ».
« Là, on parle de plusieurs années d’inflation alimentaire. C’est certain ! »
Seul Fabrice Falgère, professionnel qui connaît bien l’univers des Grandes Surfaces étant lui-même directeur de l’Intermarché de Chadrac, a bien voulu nous éclairer sur le sujet. « Oui, je pense que Dominique Schelcher voit juste sur ce chiffre de 10 % de plus concernant l’inflation alimentaire à venir dans les jours prochains ».
Mais à la différence du directeur général de Système U qui pronostique un simple premier semestre difficile, Fabrice Falgère évoque un temps beaucoup plus long. « Vu comme c’est parti, ce n’est pas en six mois que la courbe va s’inverser, déplore-t-il. Là, on parle de plusieurs années d’inflation alimentaire. C’est certain ! »
Quand l’énergie enflamme tout le reste
D’après le site france-inflation.com, site qui tient à jour de manière extrêmement rigoureuse toutes les hausses de prix d’innombrables produits en France, l’énergie a augmenté de 22.8 % sur les 12 derniers mois. Cette inflation impacte tous les produits sans exception et notamment la production et la distribution des articles alimentaires. Toujours selon le site, le prix de l’alimentaire en général accuse une élévation de 13.3 %.
« De toute ma carrière de directeur, je n’ai jamais vu une montée des prix aussi importante ! », affirme Fabrice Falgère
Les produits dits du « distributeur », la solution ?
Sur les négociations entre les grands distributeurs et les industriels, le directeur d’Intermarché de Chadrac souligne ceci : « Les prix des produits des marques nationales vont indéniablement s’envoler, se désole Fabrice Falgère. De notre côté chez Intermarché, nous avons la chance de posséder 70 usines. Elles nous fournissent ainsi en produits « distributeurs ». Ces derniers sont alors proposés entre 15 à 20 % moins chers que les grandes marques nationales ».
À la question d'une éventuelle carence de produits dans les rayons des supermarchés, Dominique Schelcher rassure : « Il n’y aura pas de pénurie à venir dans les jours prochains ».
« Ce n’est pas la quantité dans le caddie qui diminue. Ce sont les produits qui y sont mis dedans ».
Dans ce contexte d’inflation grandissante, Fabrice Falgère constate d’ailleurs un changement d’habitude des consommateurs. « Ce n’est pas la quantité dans le caddie qui diminue, lance-t-il. Ce sont les produits qui y sont mis dedans. Les gens vont chercher la moindre occasion et c’est tout à fait normal. Ils vont plutôt choisir les marques moins chères, avec des offres qui impliquent l’achat d’une plus grande quantité, mais à un prix final moins onéreux. »
Il termine avec cette analyse qui semble dans la logique du contexte : « Je pense que les consommateurs vont progressivement délaisser les articles de grandes marques bien trop sujets à cette inflation qui n’est pas prête de s’arrêter ».