Difficile de prononcer les mots « tabous » devant le représentant religieux le plus haut placé du département. Frustration sexuelle, pulsion humaine, envie naturelle, pensée érotique…
Les mots sont enrobés de prudence pour ne pas choquer. Yves Baumgarten répond d’une voix grave aux questions avec le même tact, conscient de l’astringence des termes, de ces frontières verbales imposées tacitement entre lui et le journaliste.
Est-ce que le célibat des prêtres a une véritable raison d’être ?
« Je crois, en effet, à son bien-fondé. Il est ancré dans l'histoire de notre église. C'est un don de soi. Et l'Église est basée sur le don de la personne. Dans un couple, on se donne totalement à l’autre. Pour l’Église, on a fait le choix de se donner aussi totalement à Dieu ».
« Après, il faut savoir que le célibat des prêtres est sacré dans l'Église catholique romaine. Mais au sein de l'Église catholique en Orient, les prêtres, par exemple libanais, peuvent se marier. La tradition orientale n'est pas tout à fait la même que la tradition occidentale ».
Est-il possible que cette règle puisse évoluer et disparaître un jour ?
« Non, je ne crois pas. Cela fait tellement d'années qu'elle est entrée maintenant dans notre histoire et dans la religion. Je n'y crois pas et je pense qu’elle est précieuse. Un prêtre qui, à un moment donné, n'arrive plus à assurer ce célibat, peut quitter le ministère. C’est déjà arrivé et ça arrive encore. Cela ne veut pas dire qu'il est excommunié. Il quitte simplement le ministère ».
« Le célibat n'est pas une condamnation à vie qu'on impose aux prêtres. C’est un choix libre et un don de soi. Si c'est vu comme une contrainte, ça ne peut tenir très longtemps ». Yves Baumgarten
Un prêtre est avant tout un humain. Comment gèrent-ils ses besoins et ses envies sexuelles ?
« Comme tout homme, on a une tendance sexuée, c’est vrai. Je crois qu'un être humain a une certaine capacité à gérer ses pulsions sexuelles et à les vivre. Il serait mentir de dire que c’est facile. C’est un vrai combat. Mais, pour élargir la question, il y a des personnes qui vivent en couple et qui peuvent ressentir des pulsions vers d'autres personnes. Et pourtant, ils les gèrent et ne trompent pas leur compagne ou leur compagnon »
« La sexualité est un terme noble d’expression. Mais c’est aussi un combat pour tout être humain, aux ordres de Dieu ou pas. N’importe où, la sexualité doit être maîtrisée ». Yves Baumgarten
Et quand il se sent submergé par une pulsion sexuelle ou érotique contraire à ses convictions chrétiennes. Comment le prêtre agit-il ?
« Il y a deux dimensions de l’être humain. La dimension spirituelle. En ce sens, nous apportons un accompagnement parce que nous croyons que, pour gérer sa vie, la grâce de Dieu est indispensable. Et il y a la dimension psychologique. C'est l'aspect corporel, l'aspect biologique, l'aspect psychologique. Quand on ressent des tensions trop vives, il est nécessaire de consulter un psychologue et voir ce qu'il convient de faire. Dans le diocèse du Puy, nous salarions une assistante sociale qui possède un parcours de psychologue, justement pour accompagner tous les prêtres sur des questions comme celle-ci ».