Sans eau ? C’est la fin de tout et de tous. Les déserts et les dunes de sables sont les miroirs d’une planète sans vie ou presque, ponctués seulement de spécimens aussi rares qu’éprouvés. Épargnés (pour l’instant) de cette réalité dantesque, nous nous promenons dans les belles montagnes de Haute-Loire, scarifiées ici ou là par maints ruisseaux et rivières aux creux des vallées verdoyantes.
Mais si le bruit de l’eau attire naturellement nos sens, les arbres immobiles courbés au-dessus des cours d’eau semblent moins attrayants. Et pourtant, sans eux, pas d’eau. Sans les amas de racines et de troncs, sans les ombres des branches et des feuillages, les rivières mourraient indéniablement, emportant dans leur lit de mort, la faune, la flore et tous les mammifères de la planète bleue.
« Ils épurent et filtrent l’eau en permanence »
« C’est ce qu’on appelle la ripisylve, explique Ludovic Beyeler, hydrobiologiste pour le Département, référent responsable de la cellule rivière. C’est la forêt qui suit, à fleur de son lit, un cours d’eau sur une distance plus ou moins longue ».
Sans nuance, l’expert assure que « les arbres ont un rôle extrêmement important vis-à-vis des cours d'eau et, par ricochet, pour nous tous. Nous avons besoin d'eau potable pour subsister. La ripisylve permet de préserver cette ressource capitale. Ils épurent et filtrent l’eau en permanence ».
Ludovic Beyeler analyse le taux d'oxygénation, le PH et bien d'autres caractéristiques.
Photo par Nicolas Defay
« Les arbres nourrissent les cours d’eau comme les cours d’eau nourrissent les arbres »
Ludovic Beyeler, passionnant et passionné scientifique, rappelle précisément les actions de la ripisylve. « Les arbres limitent l’érosion des bassins versants, épargnant aux cours d’eau une trop rapide dégradation, notamment durant un phénomène de crue. Ils confinent aussi les cours d’eau dans une chape de fraîcheur ».
Il poursuit : « D’autre part, la ripisylve va apporter un support à la biologie. C’est une aide essentielle au monde vivant, un corridor vert pour toute la faune inféodée aux rivières. Et les arbres sont autant d’abris pour les insectes et les animaux. »
Avant d’ajouter aussi : « Enfin, les arbres nourrissent les cours d’eau comme les cours d’eau nourrissent les arbres. »
Les résineux… à consommer avec modération
À propos de ce dernier point, les experts gardent une attention particulière sur les ripisylves mono-constituées. « Il est mieux qu’une forêt attenante à une rivière soit composée de plusieurs essences d’arbres, nous éclaire Ludovic Beyeler. Et surtout que ce ne soit pas uniquement des résineux qui trempent leurs racines, car ils peuvent détériorer la qualité de l’eau ».
Tout est lié et chaque élément ne peut survivre sans l'autre.
Photo par Nicolas Defay
La truite, dépendante des arbres
Selon l’hydrologiste, des écarts de température de l’eau, allant de 1,5 à 3 degrés, sont clairement démontrés dans une section de cours d’eau sans rispisylve et le même avec une ripisylve.
À ses côtés, Marie-Agnès Petit, présidente du Conseil départemental de la Haute-Loire, souligne à cet effet : « L’augmentation de la température est préjudiciable pour le poisson emblématique de la Haute-Loire qu’est la truite. Pour que nous puissions encore la voir occuper nos rivières dans les années venir, il lui faut des eaux fraîches et bien oxygénées. Il lui faut donc des arbres. Partout. »
