Depuis le début de la semaine, les promeneurs regardent d’un œil étonné l’installation de deux grandes cuves à côté du bassin ponot. Des barrières sont posées vers la petite fontaine publique. Et surtout, le niveau de l’eau baisse dangereusement dans le vieux bassin de 1 200m² et d’une profondeur d’environ un mètre.
« Il me semble que cela remonte à 1994 la dernière fois que la municipalité a effectué le vidage et le curage complet du bassin, nous apprend Jean-François Exbrayat, adjoint au maire du Puy-en-Velay et chargé du cadre de vie. Pour vider l’eau en surface, les agents ont ouvert la trappe en forme de guillotine. Elle s’évacue ainsi progressivement dans le réseau pluvial de la ville avec l’autorisation de la DEA (Direction de l’eau de l’Assainissement, Ndlr). » Quant à l’eau injectée dans le bassin, elle provient du réseau d’eau... potable.
Carpe, gardons et carassins dorés
Avant de récurer le sol assurément tapissé de boue, de feuilles mortes et de débris en tout genre, quatre membres de la Fédération Départementale de Pêche de la Haute-Loire interviendront pour recueillir tous les poissons présents. « D’après ce qu’on a pu observer, nous nous attendons à collecter des carpes, des gardons et des carassins dorés (poisson rouge, Ndlr), détaille le pêcheur Nicolas Stéphane. Pour la quantité, on ne sait absolument pas. Il est également possible de rencontrer d’autres espèces que des personnes auraient rejetées là et peut-être même des spécimens non désirables comme des tortues de Floride par exemple. »
« Nous utiliserons la technique électrique pour les regrouper »
Pour le protocole de capture, les professionnels envisagent deux solutions. L’épuisette et la pêche électrique. « Lorsque le niveau d’eau sera suffisamment bas, il nous sera plus facile de voir les poissons et de les collecter avec l’épuisette, confie Sylvain Béal, de la Fédération de Pêche 43. Nous utiliserons la technique électrique pour les regrouper. Il s’agit de former une sorte d’arceau électrique qui contraint les poissons à s’éloigner de ce champs et à se réunir en un point précis. »
Loin des procédés utilisés pour les pêches au chalut électrique, décriés par nombre d’associations et de pays à travers le monde, celle choisie par les pêcheurs au Jardin Henri-Vinay n’est risquée que pour les utilisateurs. « Pour le poisson, il n’y a aucun danger, assure Nicolas Stéphane. Ce n’est absolument pas létal. Par contre, les pêcheurs doivent faire attention à eux à manipulant les champs électriques ».
Trop d’attente entre le curetage précédent et celui-ci
Que vont devenir les poissons ? « Tout ce qui est présent dans une eau close comme le bassin du Jardin appartient à son propriétaire, nous éclaire encore Nicolas Stéphane. Le propriétaire est la Ville du Puy. Elle peut alors faire ce qu’elle veut des poissons. L’idée est de les récupérer, les mettre dans les cuves annexes en attendant que le nettoyage des boues soit terminé, puis de les replacer dans le bassin. Seuls les plus abîmés seront détruits. »
D’après lui, une surpopulation serait surprenante car les poissons se régulent entre eux et s’équilibrent constamment. « Peut-être devrons-nous tout de même mettre moins de poissons afin d’améliorer leurs conditions sanitaires », partage-t-il. Selon son expertise, il conseille à la Ville du Puy de ne pas attendre aussi longtemps pour cureter le bassin. « La dernière fois, c’était il y a 26 ans, mentionne le professionnel. Je pense que tous les dix ans serait bien plus adapté. Car lorsqu’il y a trop de matières organiques, cela entraîne un problème d’oxygénation ».
Ce processus provoque alors une eutrophisation qui est caractérisée par une croissance excessive des plantes et des algues due à la forte disponibilité des nutriments.
Plus de deux décennies d’objets insolites
Concernant le nettoyage des boues et de tout ce qui est posé sur le sol, c’est l’entreprise « Val-Vert Assainissement » de Polignac qui sera en charge de les récolter. Après avoir été analysées, les alluvions seront ensuite épandues sur un terrain du camp d’Eycenac. Que trouveront-ils alors caché dans la fange depuis toutes ces années ? « Sûrement des cannettes ! », suggère Sylvain Béal. « Ou des armes de poing », propose un journaliste présent. Mais pourquoi ne pas penser à un trésor de pièces d’or et d’argent, histoire de rêver un peu en ces temps aussi troubles que l’eau du bassin...
Nicolas Defay