Nous avons d’abord rencontré Alain Astruc sur son VTT, de retour de balade sur la voie verte de Brives en grande conversation avec sa voisine Mme Joubert. « Quand on regarde le paysage, on n’imagine pas l’eau qui a dévalé par la conduite avant-hier. Moi, j’ai de la chance car ma maison, juste à côté, n’a pas été touchée mais celle de Mme Joubert a eu de l’eau dans tout son sous-sol. Et puis surtout, celle du jeune couple un peu plus bas a été complétement dévastée. Allez voir ! Eux qui avaient si bien arrangé la maison et ses abords ont été traversés par une véritable rivière. Vous irez voir les blocs de pierre qui se sont accumulés dans le fossé et que Maxime a sorti à la main ».
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Mme Joubert confirme et dit s’estimer chanceuse au regard du jeune couple : « Chez moi, à part le sous-sol qui a été infiltré... et ça n’était jamais arrivé, ce sont les gouttières qui n’ont pas résisté et qui ont été arrachées sur le devant sous la violence de la pluie. Elles sont à refaire ».
Ses enfants sont venus en urgence depuis la région lyonnaise pour lui donner un coup de main pour nettoyer et faire sécher les moquettes. Avec le soleil de ce dimanche, elles sont déjà sèches.
« Plus de peur que de mal, on va les reposer aujourd’hui » dit M. Joubert fils, « mais allez voir le jeune couple en bas, il y a un passage dans la clôture, ils ont été inondés comme jamais ça n’était arrivé. Pensez ! on est quand même haut par rapport à la Loire et le canal qui guide les eaux des anciennes voies ferrées n’avait jamais débordé jusqu’à aujourd’hui ».
On s’occupe nous-mêmes du chemin rural car jamais personne ne vient le faire
Alain Astruc complète : « Mais vous savez, avec mon voisin du dessus, chacun fait un peu l’entretien de tout le secteur derrière nos maisons. Le chemin qui passe est un chemin rural alors personne ne s’en occupe si on ne le fait pas. Chez mon voisin, il était déjà arrivé que l’eau ruisselle en torrents sur un côté de la maison, mais cette fois ça coulait des deux côtés jusque dans le chenal de la voie ferrée puis jusqu’en bas où une grille s’est bouchée. Les embâcles se sont accumulés et ça s’est mis à refouler puis l’eau a fini par emporter le portillon de la maison Augier jusque sur la route de Coubon qui a été coupée, elle aussi. Allez voir ! c’est impressionnant, le tas de cailloux que Maxime Augier a sorti pour déboucher la grille ».
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Effectivement juste après la division de l’ancienne voie ferrée, des personnes en contrebas sont affairées à nettoyer la terrasse d’une jolie villa rénovée avec soin. On imagine encore bien le torrent violent qui a déferlé là. Et pourtant, le jeune couple a déjà passé toute la journée de samedi à sortir les meubles du rez de chaussée et à nettoyer et faire sécher ce qui pouvait être sauvé. Peu de choses en vérité.
« Personne n’a répondu à nos appels »
On sent que le couple a repris un peu de courage ce dimanche matin, mais Marine avoue qu’elle est exaspérée parce qu’aucune autorité n’est venue les aider, ni les pompiers qu’elle a appelés plusieurs fois, ni la mairie qui avait mis en place un numéro d’urgence. « Les pompiers m’ont demandé si on avait un étage pour se mettre à l’abri et passer la nuit, c’est le cas car les chambres sont en haut, et puis c’est tout. J’ai aussi appelé le numéro d’urgence de la mairie samedi. Rien ! J’ai lu le soir sur Facebook que le numéro ne répondait pas suite à un problème technique. Il n’y avait pas d’urgence vitale, n’empêche, il faudra bien qu’ils me répondent dès lundi. Et puis, personne de la mairie ne s’est même arrêté pour prendre des nouvelles, ils sont pourtant passés plusieurs fois devant la maison. Je pense surtout à la suite, on est bien assuré mais ce serait mieux qu’il y ait un arrêté de catastrophe naturel. Quand nous avons acheté en 2016, on nous a dit que l’eau était montée une fois un peu plus haut que le portail d’entrée (en 1980) mais depuis il y a eu les travaux sur la Loire. On n’aurait jamais pensé que le danger allait venir d’en haut. Quand Maxime est arrivé jeudi vers 16 heures, l’eau traversait déjà le jardin puis c’est entré de partout. Il a bien essayé de canaliser l’eau mais il y en avait trop ».
Elle montre les photos qu’elle a prises durant le péril
« Maxime, dès qu'il est arrivé a remonté le flux d’eau pour voir ce qui se passait et là, il a rapidement compris que la grille d’écoulement du canal d’évacuation de l’ancienne voie ferrée était bouchée. J’ai une photo où on le voit en train d’enlever les embâcles et essayer de détourner le flux d’eau. Ça n’a pas arrêté l’eau chez nous mais au moins l’eau n’est pas passée par-dessus le mur des voisins. Il s’en est fallu de peu ».
Curieusement eux qui sont sur la trajectoire du ruisseau artificiel qui passe sous leur propriété n’ont pas été impactés. L’eau a suivi le mur en ciment pour trouver une porte de sortie vers le portillon de la propriété voisine. En-dessous de la maison, la route de Coubon a, elle, retrouvé un aspect complètement normal, le torrent d’eau a tout lessivé, la route, et aussi les trottoirs en cours d’aménagement. Ceux-ci n’ont subi aucun dommage à la surprise du maître d’oeuvre qui est passé, inquiet, dans la journée de samedi.
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« La Loire est encore « grosse » mais revient peu à peu à son niveau normal. Les travaux de creusement ont sans doute été une nouvelle fois utiles parce que ce n’est pas du tout la même chose plus bas du côté de Retournac et d’Aurec-sur-Loire à ce qu’on m’a dit », précise Maxime Augier.
Quand on examine la photo qu'a fait Marine, on constate qu'il a fait preuve d’un sang-froid assez extraordinaire, presque imprudent. Agenouillé dans le torrent, les deux bras dans l’eau turbulente, il débouche la grille et permet de détourner l'eau vers l'autre penchant. « J’ai d’abord tout débouché par le dessus puis quand il y a eu moins d’eau, j'ai curé le fond de l'aqueduc avec mes seules mains car je craignais qu’il ne pleuve à nouveau samedi ».
Un tas énorme de gravats relève les bords de l’ouvrage maçonné dans lequel continue à s’écouler le ruisseau assagi mais encore vigoureux deux jours après la pluie.
"En général ce caniveau est quasiment à sec"
L’artificialisation des sols sur le plateau qui surplombe le quartier de la Ribeyre et les constructions le long des anciennes voies y sont peut-être pour un peu, la puissance inhabituelle de cet épisode pluvieux aussi.
« En été, la plupart du temps c’est complètement sec », remarque la voisine qui s’est approchée pour mesurer ce à quoi ils ont échappé cette fois : « Ça n’avait jamais fait ça avant ».
« Avant vous savez, par ici il n’y avait que des jardins, c’était les ouvriers des usines de Brives qui les travaillaient. Il n’y avait pas toute cette végétation non plus », conclut quelqu’un.
T.C.