Elle, c'est Catherine Crouzet, 56 ans, caissière à Auchan Brives-Charensac depuis 26 années. En temps normal, elle accueille plus de cent clients par jour avec autant de "bonjour", de "au revoir", de sourires face à d'autres sourires, supportant comme elle peut les soupirs des impatients ou le mépris des ignorants. "Mon rôle est de procéder à l'encaissement des produits mais pas seulement, indique-t-elle humblement. Je suis avant tout à l'écoute des gens, je les informe sur quoi que ce soit et je gère tous les aléas qui peuvent survenir comme l'absence d'un prix, un problème de carte bancaire et bien d'autres choses encore". Assise durant des heures entre sa caisse et le tapis roulant, elle fait en sorte d'être égale du premier au dernier venu. Car même si la fatigue ou la douleur des épaules érodent son corps et son esprit, le client n'y peut rien. Elle veut que tous soient satisfaits, du service et d'elle-même.
Un plein de reconnaissance
Si le confinement a bloqué les projecteurs sur le personnel soignant, ces derniers exerçant subitement les premiers rôles dans ce film dramatique, il a en même temps mis en exergue l'activité de Catherine Crouzet et de tous ses collègues. "Nous avons des clients qui nous offrent des fleurs ou des chocolats, partage-t-elle, enthousiaste. Régulièrement, nous avons des mots de remerciements qui nous sont envoyés. Au passage en caisse, beaucoup nous soutiennent et nous remercient d'être là malgré tout ce qu'il se passe. C'est très gentil de leur part. Et surtout, c'est très reconnaissant." La reconnaissance. Malgré les heures sombres que le pays traverse, quelques miettes de lumière s'extirpent du chaos. Comme tous ces caissiers et ces caissières qui ont troqué leurs fonctions de figurants pour devenirs des acteurs reconnus.
"Alors oui, j'ai ressenti de la peur. Véritablement"
"Nous nous sommes sentis en danger durant les premiers jours du confinement, confie Catherine Crouzet. On voyait bien que plein de gens restaient chez eux pour se protéger du virus. Et comme tout le monde, on ne savait pas grand-chose de la situation et de la gravité de l'épidémie. D'autant plus qu'il y avait ce problème de gants et de masques. Alors oui, j'ai ressenti de la peur. Véritablement." Rapidement, la direction équipe le personnel pour continuer le service et permettre aux gens de s'alimenter. "Mon appréhension s'est dissipée au moment où toutes les mesures ont été prises pour nous protéger, souligne-t-elle. La direction nous a donnés des gants, des masques, du gel hydro-alcoolique en quantité. Nous possédons même des visières et des parois en plexiglas autour des caisses. Il a fallu un peu de temps pour s'adapter à ces nouveautés mais nous sommes bien conscients qu'elles nous protègent, nous et tous les clients du magasin".
Faire en sorte que les gens n'oublient pas
Entre les parterres de larmes, de morts et de souffrances, des espoirs se fraient toujours un passage. Celui de la fin du monstre, celui des leçons à tirer de ce cauchemar ou encore celui de la mémoire. Catherine Crouzet espère justement que les gens n'auront pas la mémoire courte. "Je souhaite vraiment qu'une fois tout ça derrière nous, les clients continuent d'agir avec les caissières comme ils le font aujourd'hui. Ce respect, cette considération, cette attention. C'est bien plus précieux que n'importe quoi. D'autre part, cette épreuve a renforcé nos équipes de travail. La direction s'est révélée très solidaire du personnel et tout le monde s'entraide quelle que soit la fonction." Alors, si les applaudissements sont destinés principalement aux blouses blanches, n'oubliez pas de faire quelques claps de main à tous ces visages discrets, présents depuis le début dans ce combat planétaire.
Cet article s'inscrit dans notre série de portraits de travailleurs mobilisés mais oubliés pendant cette crise sanitaire.
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Tous les deux jours, Zoomdici donnera un coup de projecteur à une profession différente.