"C'est un projet innovant, une première en France, qui a pour objectif d'accueillir les personnes qui ont un trouble psychiatrique déjà antérieur aux troubles de l'âge". Valérie Mourier, directrice des établissements Sainte-Marie en Haute-Loire, se félicite de voir enfin ce projet aboutir après une dizaine d'années d'attente dans "les méandres administratifs".
Douze millions de Français sont concernés par la psychiatrie à des degrés divers
Un Français sur cinq peut être atteint par une maladie mentale, qui recouvre des pathologies très diverses : dépression, troubles obsessionnels compulsifs, anxiété et phobies, troubles alimentaires, schizophréniques ou bipolaires, autisme, etc.
À bien des égards, leur prise en charge reste aujourd'hui encore inadaptée et insuffisante. À l'horizon 2020, elles constitueront la première cause de handicap et d'invalidité dans le monde, selon l'OMS. Pourtant, il n'existe aucune structure en France adaptée à leur accueil au-delà de 60 ans. La première verra le jour en Haute-Loire au premier semestre 2021.
----De plus en plus nombreux
Cette population ciblée est en effet un peu plus nombreuse que par le passé puisque la personne souffrant d'un handicap mental bénéficie, comme le reste de la population, d'un allongement de l'espérance de vie. C'est donc une population plus jeune que dans un EHPAD classique qui devrait fréquenter la structure, avec par conséquent un turn-over moins prononcé.-----La nécessité d'équipes et de compétences bien spécifiques
C'est vraiment une population ciblée qui va être accueillie dans cet EHPAD (établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes) psychiatrique car l'accueil qui jusqu'à présent lui était réservé n'était pas vraiment adapté aux troubles qu'elle présentait. "C'est vrai qu'aujourd'hui, ce type de structure fait défaut dans l'accompagnement des personnes ayant des troubles psychiatriques et ayant atteint un certain âge", poursuit-elle.
Les équipes ne pouvaient pas les accompagner comme il le faut car des compétences bien spécifiques sont nécessaires et "ce sont des personnes beaucoup plus jeunes, beaucoup plus mobiles, et elles pouvaient mettre en difficulté et perturber les autres résidents, beaucoup plus âgés, dans un EHPAD classique".
Une offre graduée selon les besoins et pour aider aussi les aidants
Valérie Mourier, directrice des établissements Sainte-Marie en Haute-Loire, revient sur les grandes lignes du projet avec notamment l'accueil de soixante personnes de façon permanente, ainsi que six places en accueil temporaire, notamment pour aider les aidants, ainsi que trois places d'accueil de jour.
(Cliquer sur "Listen in browser" pour une écoute sur smartphone ou tablette)
Un bâtiment à remettre aux normes et au goût du jour
Si le projet a été inscrit au schéma départemental personnes âgées 2009-2013 du Conseil départemental et de la DDASS (direction départementale des affaires sanitaires et sociales, ce qui est aujourd'hui l'Agence Régionale de Santé), le permis de construire n'a été délivré qu'en 2018, pour une structure de 3549 m² d'emprise au sol et sur trois niveaux.
C'est tout un environnement qu'il faut adapter aux pathologies des patients, aussi bien en matière d'architecture que d'équipements. Le bâtiment, dont la démolition a débuté fin mai, verra sa première pierre déposée le 22 octobre prochain. Désaffecté depuis une vingtaine d'années, il ne répond plus aux normes d'aujourd'hui. Il ne pouvait pas être réajusté car il y avait beaucoup de dortoirs, par exemple, alors qu'aujourd'hui ce sont les chambres individuelles qui sont de mise. "L'idée, c'est de moderniser le site tout en gardant l'aspect visuel du bâtiment ancien", ponctue Valérie Mourier.
----Le financement en détail
Le coût total est de 6 692 000 € HT pour la seule partie immobilière (il faut y ajouter 600 000 € de mobilier), qui bénéficie d'un million d'euros de l'ARS, de 500 000 € du Conseil Départemental, de 300 000 € de l'Agglo du Puy et de 600 000 € de l'association Sainte-Marie. Le reste sera complété par un emprunt.
-----Un tarif qui sera à peu près identique aux autres EHPAD
L'établissement sera ouvert aux personnes plus de 60 ans souffrant de pathologies psychiatriques chroniques. Il faut que ces troubles psychiatriques soient bien antérieurs aux troubles générés par l'âge avancé du patient. Le tarif devrait être "à peu près identique aux EHPAD de Haute-Loire", dont le Département absorbe une bonne partie depuis l'initiative de Gérard Roche, ex Président de la collectivité, qui déplorait que sur une base de 55 € par jour, il soit très difficile pour les personnes d'assurer leur pension en maison de retraite et que ce soit très souvent aux familles de combler le déficit.
Le problème, c'est que l'impact du prix des constructions de ces établissements est reporté sur les prix de journée, à raison de 17 € par jour et par résident en moyenne. "C'est absolument scandaleux, ce ne sont pas les parents d'élèves qui payent les écoles ou les malades les hôpitaux", s'emportait-il.
Son successeur, Jean-Pierre Marcon, explique : "on a fixé une aide pour tous les EHPAD afin de sortir un prix journée moindre pour les familles du département. On le fera bien sûr pour ce nouvel établissement. Ce sera lourd financièrement mais c'est aussi notre rôle de solidarité sociale, c'est notre principale mission et on entend bien l'exercer jusque dans ces domaines".
L'établissement portera le nom de Marie Pia
En hommage à la mère supérieure qui a fait preuve d'un grand courage pendant la Seconde Guerre mondiale en protégeant des populations fragiles. Un courage qui lui a valu la légion d'honneur, alors que cette femme, très humble, a beaucoup fait pour le territoire et ses patients.
Maxime Pitavy