Trouver un donneur compatible : un véritable combat
Contrairement aux dons de vie plus courants (sang, plasma, plaquettes), il est très compliqué de trouver deux personnes dont les profils HLA soient compatibles. Le profil HLA, de l'anglais human leukocyte antigen (antigènes des leucocytes humains), caractérise des molécules à la surface des cellules qui permettent l'identification par le système immunitaire. C’est une sorte de carte d’identité biologique. Si cette identification ne se fait pas, la greffe est rejetée par le corps du receveur. Lorsqu’un patient a besoin d’une greffe de moelle, on se tourne d’abord vers sa fratrie, car il existe 1 chance sur 4 d’être compatible avec ses frères et sœurs. Mais lorsqu’il devient nécessaire de trouver un donneur non apparenté au patient, la chance d’être compatibles entre deux individus pris au hasard est extrêmement mince : 1 sur 1 million.
"S’il n’y a pas de donneur, en gros, il n’y a pas d’issue favorable"
Ce sont les mots de David qui témoigne sur le site France Don de Moelle. Sa fille a souffert d’un lymphome anaplasique, maladie du sang affectant les globules blancs. L’inquiétude s’installe après le diagnostic : « est-ce qu’on trouvera un donneur […] suffisamment compatible pour que la greffe se passe dans de bonnes conditions, avec de bonnes chances de survie ? » Heureusement pour David et sa famille, Lysiane a eu la chance d’avoir un frère compatible avec elle. Le processus a été « surprenant de simplicité » et la fillette et sa famille ont pu retrouver « une vie complètement normale ».
Le registre France Greffe de Moelle
Géré par l’agence française de la biomédecine, le registre France Greffe de Moelle compte à l’heure actuelle… moins de 300 000 inscrits. Toutefois, ce même registre est membre de la WMDA (World Marrow Donor Association ou Association Mondiale des Donneurs de Moelle), qui rassemble au total plus de 33 millions de donneurs dans près de 60 pays. Malgré cela, il est parfois très difficile de trouver un donneur compatible : certaines personnes sont porteuses d’antigènes très rares et spécifiques, particulièrement compliqués à retrouver chez un donneur potentiel. C’est pourquoi chaque nouvelle inscription au registre compte.
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Mathias Malzieu, chanteur du groupe de rock français Dionysos, a eu besoin d'un don de moelle en 2014.
Photo DR/Thomas Bresson
-----"Il y a toujours un espoir. Mais pour ça, il faut qu’on soit tous donneurs."
Muriel, 33 ans, a fait un don de moelle osseuse. «Ça ne met pas notre vie en danger. Par contre, ça sauve la vie d’autres personnes », explique-t-elle sur le site France Don de Moelle. Pierre-Marie a donné également, il parle d’engagement moral vis-à-vis du patient, et le don pour lui était « un très beau moment » de « solidarité biologique ». Sandra, greffée en 2008, explique qu’elle y pense tous les jours : « tous les jours, je suis contente de me réveiller, […] d’aller travailler, […] de faire beaucoup de choses. Et je sais que, oui, c’est grâce à lui [le donneur] ». Hors des dons familiaux, précisons que le don, bénévole et gratuit, est également anonyme.
Les dangers du don de moelle, des idées reçues
Non, la moelle osseuse n’est pas prélevée dans la colonne vertébrale, il ne s’agit pas de moelle épinière. Il n’existe donc aucun risque d’être paralysé à l’issue d’un don de moelle osseuse. Celle-ci est principalement prélevée par aphérèse (par prélèvement dans le sang, donc, de façon similaire à un don de plasma ou de plaquettes), ou dans les os du bassin. Le prélèvement par cytaphérèse est rendu possible après un traitement stimulant la production des cellules de moelle osseuse, et les faisant passer vers le sang. Dans le deuxième cas, moins fréquent, le donneur est hospitalisé 48h. Le médecin décide du mode de prélèvement qui bénéficiera le plus au malade. Même dans ce second cas, la douleur résiduelle est absente ou minime et s’apparente dans le pire des cas… à celle d’un gros bleu. La moelle prélevée se reconstitue très rapidement et le donneur bénéficie par précaution d’un suivi médical approprié avant et après la procédure.
L’inscription, comment ça marche
Une fois que vous êtes informés sur le don et que vous avez réfléchi à l’engagement, vous pouvez effectuer votre pré-inscription en remplissant un formulaire en ligne. Si aucune contre-indication médicale n’est présente, une simple prise de sang ou un prélèvement salivaire est effectué pour déterminer votre profilage HLA. L’inscription sur le registre une fois validée, si un patient a besoin de votre don, des examens médicaux seront effectués pour s’assurer que le don ne présente pas de risques pour le donneur comme pour le receveur. Le don se fait 1 à 3 mois après l’appel. On ne donne sa moelle qu’une seule fois : après un don de moelle, le donneur ne redonnera que si le même patient besoin d’un don complémentaire dans les années suivant le don initial, ou si un membre de sa propre famille a besoin d’un don.
Le registre en chiffres en Auvergne Rhône-Alpes
En 2018, 18 303 nouveaux donneurs se sont inscrits dans toute la France. Dans notre région, on compte 3 359 nouveaux inscrits sur le registre, dont seulement 39% d'hommes. Cette proportion n'est pas idéale car les femmes ayant vécu une grossesse développent des anticorps spécifiques que les hommes n'ont pas, et les dons issus de ces derniers offrent généralement une meilleure tolérance du greffon chez les patients, sur le plan immunologique. L'objectif régional pour 2019 : recruter 3695 nouveaux donneurs, en essayant d'interpeller au maximum les moins de 35 ans (qui resteront inscrits au registre plus longtemps et auront donc plus de chances de sauver un malade compatible), et les hommes, qui sont moins mobilisés. Cependant, chaque inscription compte et le nombre fait la force et l'efficacité du système.
C.C.