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Brioude

Ce que veulent les femmes : six témoignages sur le chemin parcouru, et à parcourir

, Mise à jour le 27/11/2020 à 08:40

Catherine Fourcherot, sous-préfète de l’arrondissement de Brioude, a accueilli six invitées aux parcours bien différents, mardi 8 mars, à l’occasion de la Journée internationale des femmes. Qu’elles soient chef d’entreprise dans le bâtiment, pompier volontaire, gendarme, agricultrice ou chef de service dans le secteur médicosocial, qu’elles aient dû batailler ferme pour se faire une place ou aient toujours été encouragées, toutes ont témoigné de leur parcours et livré leur ressenti quant à l’égalité entre les hommes et les femmes. Ou l’inégalité.

"Le constat, c’est que les femmes n’ont pas tout à fait les mêmes droits que les hommes"
« Si l’égalité était réelle, on n’aurait pas besoin de cette journée », a souligné Catherine Fourcherot en préambule. « On aura gagné le jour où on ne la fera plus. Pendant le 20e siècle, la femme était sous tutelle. Elle se libère et peut être libre de son corps, libre de travailler, grâce à des lois, comme celle du 4 août 2014 sur l’égalité réelle. Mais il y a les textes et il y a la réalité. Le constat, c’est que les femmes n’ont pas tout à fait les mêmes droits que les hommes. Il y a une grande disparité au niveau des salaires, les stéréotypes demeurent et les femmes s’autocensurent beaucoup. On gagnera le jour où les hommes investiront vraiment la sphère familiale et où les femmes seront libérées des tâches domestiques ».

Une affaire de choix
Ce jour-là, les femmes pourront vraiment choisir leur voix. Car choisir, toutes en ont convenu, est le plus important des droits auxquels les femmes aspirent. Choisir de déléguer l'éducation de ses enfants pour s'épanouir professionnellement sans être traitée de mère indigne. Ou choisir, à l’inverse, de tirer un trait sur une carrière prometteuse pour se consacrer à sa famille sans être accusée de manquer d’ambition.

Maryline Porche, 40 ans, gendarme à Brioude
"Je ne suis gendarme que depuis 8 ans. J’avais travaillé comme surveillante en collège et le contact avec les ados m’avait plu. Alors quand on m’a parlé de la Brigade de prévention de la délinquance juvénile, j’ai passé le concours. Ca n’a pas été facile de retourner à l’école à 32 ans et de marcher au pas militaire, mais j’ai serré les dents et j’ai découvert un métier que j’adore. Dans la Gendarmerie, les inégalités homme-femme sont moindres. Nous, on a l’égalité des salaires, et on peut passer les concours internes de la même façon. On a même retiré la limitation de taille. Evidemment il reste les différences physiques. Le mis en cause n’hésitera pas à s’en prendre à la petite femme fluette alors qu’il ne va pas aller se frotter au collègue homme de 110 kilos. Moi, par exemple, je ne vais pas entrer au GIGN. Mais je n’ai jamais rencontré de barrière masculine. Au contraire, on m’a toujours encouragée, et je n’ai pas l’impression de devoir me battre au quotidien. J’ai montré qui j’étais et mes collègues savent que je sais faire mon boulot".

Christine Vazeille, 50 ans, chef d’exploitation agricole à Saint-Just-près-Brioude
"Qu’une femme soit dans l’agriculture, ce n’est pas nouveau, mais avant elles étaient toujours mises un peu de côté. L’image de l’agricultrice, il y a 30 ans, était mal perçue. On se demandait quel pouvait être l’aboutissement professionnel d’une femme dans une ferme. L’homme était aux commandes, il négociait, achetait… Moi qui n’y connaissais rien à l’agriculture et qui venais de la ville, j’ai eu la chance d’avoir un mari qui était sorti un peu de chez lui. Il m’a laissée faire mes preuves, m’a fait confiance, et peu à peu j’ai eu de plus en plus de responsabilités. Aujourd’hui je négocie comme mon époux et mon associé, chacun de nous dans son domaine. Le tout c’est d’arriver à trouver une reconnaissance et de se dire que chacun a son rôle à jouer pour faire tourner l’entreprise. Et à l’heure actuelle, on travaille beaucoup sur les moyens de s’équiper pour que ce soit plus facile, pour moins abimer son corps. Mais c’est valable aussi pour les hommes. Ils sont aussi fragiles que nous".

----Des avancées... très récentes
1944 : les femmes obtiennent le droit de vote et en usent un an plus tard pour les élections municipales.
1965 : les femmes obtiennent le droit de travailler et d’ouvrir un compte bancaire à leur nom sans l’autorisation de leur mari.
1967 : la loi Neuwirth légalise la pilule contraceptive.
1975 : la loi Veil légalise l’interruption volontaire de grossesse.-----

Marianne Amorelli, 46 ans, chef de service à l’Entraide Pierre Valdo

"Je travaille dans le secteur médico-social, secteur essentiellement féminin dans lequel, quand un homme postule, les directeurs lui sautent dessus. Quand on a un éducateur petite enfance homme, c’est merveilleux, et finalement on prend des hommes parce qu’il en faut. Ces messieurs qui sont embauchés ne devraient pas l’être sous prétexte que ce sont des hommes mais pour leurs compétences. Quand les femmes arrivent à des postes à responsabilités, elles doivent prouver au jour le jour qu’elles les ont, les compétences. Pour que les choses avancent, il faudrait qu’elles l’intègrent et arrêtent de se justifier tout le temps. Quand on a besoin de dire « je suis le chef de service », c’est qu’il y a déjà un problème. A Saint-Beauzire, où j’accompagne actuellement les migrants accueillis à Léo Lagrange, je n’ai jamais eu aucun souci. Je pense que c’est une question de posture".



Laurence Jouve, 48 ans, pompier volontaire à Brioude
"Je suis pompier volontaire depuis 3 ans. Ça faisait longtemps que j’en avais envie, mais les choses de la vie ont fait que ce n’était pas possible. J’étais ambulancière, seule à la maison… Aujourd’hui je suis aide-soignante en psychiatrie en nuit, ce qui me laisse du temps. Et maintenant ma fille est grande. On pense beaucoup à nos enfants en premier et à notre carrière après. C’est un choix. Pour moi ça n’a pas du tout été un sacrifice d’élever ma fille. Aujourd’hui je peux exercer ma vocation de pompier. A Brioude, nous sommes une dizaine de femmes volontaires. En secourisme, tout se passe bien, mais en incendie c’est plus difficile de trouver sa place. Il n’y a pas de différence au niveau des interventions, on fait les mêmes tâches que les hommes, et on est bien accepté, mais on doit faire nos preuves plus que les hommes. Il faut toujours montrer qu’on est à leur niveau, ce n’est jamais acquis".

Annie Lagarde, 55 ans, secrétaire générale de la sous-préfecture de Brioude
"J’ai d’abord travaillé dans le privé avant de passer le concours des collectivités territoriales et de travailler dans des petites mairies de campagne. La fonction publique nous ouvre ces portes-là : si vous voulez, vous pouvez ! On a des passerelles, et j’ai souvent été encouragée par des hommes. J’ai passé des concours, ai été chef de bureau en préfecture, et je suis secrétaire générale ici depuis un an. C’est un univers très intéressant et très ouvert, avec la possibilité d’avoir des patrons jeunes et dynamiques. Cerise sur le gâteau, nous sommes actuellement deux femmes, avec Catherine Fourcherot comme sous-préfète. Ça donne un autre élan au métier, avec des perspectives différentes. Aujourd’hui on voit que ça se féminise dans les services de l’Etat. Mais dans nos professions, il faut quand même qu’on ait du caractère".

Carole Tixier-Fournier, 41 ans, chef d’entreprise dans le bâtiment
"Je travaillais dans la communication et j’ai été licenciée à la naissance de mon fils, il y a 12 ans, par un directeur général homme. J’ai retrouvé du travail, et à la naissance de ma fille, il y a 10 ans, j’ai senti une sorte de tension. Alors en 2008, sur le conseil de mon mari, j’ai racheté l’entreprise de plâtrerie, peinture et cheminée déco de mon père. Je suis arrivée comme un cheveu sur la soupe, j’ai joué au Monopoly. Je me suis associée avec le bras droit de mon père pour avoir les compétences techniques. Il gère le technique et le matériel, moi l’administratif et les relations humaines. J’ai laissé de côté l’éducation de mes enfants, je ne leur ai pas donné le bain, j’ai fait le choix de ne pas les élever. Je n’ai pu réussir que parce que mon mari était là et qu’il y a eu un réel partage des tâches domestiques. Je m’épanouis pleinement dans mon métier. Il faudrait que les femmes arrêtent de culpabiliser et de se mettre des barrières, qu’elles aient le droit et la possibilité de choisir".

I.A.

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