Le Président de l'association Dominique Chaudy reconnaît volontiers les difficultés financières de la partie fourrière de la structure, qui n'a pas réussi à redresser la barre malgré le licenciement économique de l'un de ses salariés (ils sont désormais cinq) en 2013.
Les raisons sont multiples : "déjà, la SPA de Polignac paie un loyer pour ses locaux, ce qui n'est pas le cas de bon nombre d'associations, notamment les sportives, mais aussi tous les frais inhérents à la structure, comme l'éclairage, le chauffage, etc.".
Surtout, il reste en Haute-Loire environ 130 communes qui n'ont pas de convention de fourrière et qui ne participent pas au financement de ce service public, qui est de 0,70 € par habitant et par an sur notre territoire.
Les communes qui n'ont pas de convention fourrière doivent se débrouiller seules en cas de problème. Pourtant, elles sollicitent parfois la SPA pour intervenir. "On leur fait payer au prix fort avec une amende forfaitaire", dévoile Dominique Chaudy, "c'est quand même idiot, pour 0,70 € par habitant... Et si un accident avec un animal errant intervient, les assurances ne marchent pas", souligne-t-il avant d'ajouter : "parfois, ça se règle à coups de fusil, c'est une vraie carence".
Près de 40 % du budget de la SPA provient de ces subventions
Pour bien comprendre ce déficit, il faut analyser le financement de la structure. Déjà près de 40 % des recettes proviennent des subventions (donc des conventions de fourrière) des communes. Environ 30 % proviennent des adhésions des militants et de la cession des animaux contre un don (120 € par chien hors stérilisation), ce second volet étant marginal car il faut parfois nourrir une bête des années avant de la céder, la plus value est donc tout à fait relative...
Viennent ensuite près de 15 % des recettes issues des "contorsions fiscales", des différents legs et donations, ainsi que des manifestations organisées par l'association. Enfin le Conseil général assure les 10 % restants. Mais à l'heure de faire les comptes, il manque encore 30 000 euros par an pour équilibrer le budget, un trou qui serait comblé par la participation des 130 communes n'ayant pas de convention de fourrière selon Dominique Chaudy.
L'agglo octroie une subvention exceptionnelle de 20 000 €...
La communauté d'agglomération du Puy-en-Velay a voté lors du conseil communautaire du jeudi 19 juin dernier l'attribution d'une subvention exceptionnelle de 20 000 €. Une première depuis 20 ans. "C'est un bel appui mais ce n'est pas la panacée", nuance le Président de l'association, "jusqu'alors, ils s'étaient contentés du minimum légal en payant la fourrière".
Outre cette subvention exceptionnelle de 20 000 €, les élus de l'agglomération du Puy ont décidé de maintenir la subvention fixée à 0,70€/an/habitant en 2013. Le tarif reste donc inchangé pour 2014 et il est appliqué sur la base d’une population de 58 405 habitants. Son montant sera donc précisément de 40 883, 50 € pour l’année 2014.
... et divise par cinq la redevance requise à la SPA
La SPA de Polignac a également sollicité une aide de la collectivité pour son loyer et les frais inhérents à sa structure. La Communauté d'agglomération du Puy met à disposition l'espace animalier situé sur la commune de Polignac moyennant le versement d'une redevance annuelle. Cela comprend un refuge pour animaux et les lieux affectés aux fourrières municipales.
"Compte tenu du vieillissement des bâtiments, et les frais d'entretien que cela va générer, la redevance est baissée à 2 880 € TTC contre 10 939,76 € TTC l'an dernier", nous explique Michel Joubert, Président de l'agglo. Le choix des élus a notamment été guidé par la volonté de "permettre à l'association de poursuivre son activité dans de bonnes conditions et de maintenir ses emplois".
----Dominique Chaudy est Président de la SPA depuis quatre ans. "180 communes n'avaient pas de convention de fourrière à ma prise de fonction, elles ne sont plus que 130 aujourd'hui donc on va dans le bon sens, c'est une avancée budgétaire pour nous, même si ce n'est pas encore suffisant", nuance-t-il.-----"On ne peut pas chaque année compenser les mauvais élèves du département"
Mais la communauté d'agglomération du Puy se sent bien seule pour épauler la SPA et a sollicité le préfet pour qu'il demande à ces 130 communes "hors-la-loi" une participation financière. Toutes auraient refusé, hormis Saint-Paulien. "On ne peut pas chaque année augmenter notre participation pour compenser les mauvais élèves du département", proteste Michel Joubert.
Mais le préfet semble démuni face à cette problématique : "rien ne permet de forcer une commune à participer au financement de ce service public, que ce soit dans le code rural ou dans le code général des collectivités territoriales", détaille Pierre-Yves Houlier, directeur adjoint de la Direction Départementale de la Cohésion Sociale et de la Protection des Populations(DDCSPP), "car on ne peut pas intervenir dans le régime de libre administration des collectivités".
Médiateur ou spectateur ?
Le préfet est pourtant censé être un médiateur dans cette affaire... mais il semble bien démuni. Ce qui signifie qu'il demeure spectateur ? "Non non, il va porter ces informations auprès des mairies concernées mais il ne peut que rappeler le droit aux communes concernées, il ne peut pas imposer tel ou tel système", nous répond le directeur adjoint de la DDCSPP. Autrement dit, il ne peut que convaincre, car il ne dispose pas d'outils pour contraindre.
Pourtant, le directeur de la SPA nous assure que ses services ont fouillé et fini par trouver un article de loi, émanant du ministère de l'agriculture, "qui oblige le préfet à inscrire d'office le budget fourrière pour ces communes hors la loi. Donc nous, on a troué un levier, le texte existe et il a non seulement le pouvoir de le faire, mais surtout le devoir". Impossible cependant de mettre la main dessus, le texte découlerait d'un montage juridique complexe.
----Il existe trois fourrières conventionnées en Haute-Loire : La Troupe, une structure privée à Saint-Pal-de-Mons, la SPA de Brioude et la SPA de Polignac. Il existe différentes façons de rendre le service sur sa commune :
* Soit en régie directe : la mairie décide d'organiser le service elle-même avec ses propres moyens (service communal ou inter-communal).
* Soit en délégation de service public (DSP) auprès d'une structure privée.
* Soit en délégation de service public (DSP) auprès d'un système de structures associatives à qui elle confie le marché, comme c'est le cas pour la SPA de Polignac.-----Augmenter les subventions ou baisser les coûts de fonctionnement ?
Le Président de l'agglomération du Puy-en-Velay résume l'impasse actuelle : "notre collaboration avec la SPA a malgré tout donné satisfaction, mais les coûts deviennent exorbitants. Alors est-ce que la SPA doit trouver d'autres moyens de gestion pour la fourrière ? C'est à voir. Il faut améliorer le fonctionnement, que ce soit en baissant les coûts de la structure ou en obtenant la participation financière de ces communes. Et même pourquoi pas les deux combinés", conclut-il.
Mais le Président de la SPA, qui compte cinq salariés et une quarantaine de bénévoles, ne voit pas comment baisser les coûts de fonctionnement : "notre déficit s'explique surtout par des obligations supérieures à la charge de travail. Il nous faut du personnel qualifié, il y a les astreintes, on est ouvert toute l'année, même les jours fériés. C'est comme une ferme, il faut une présence quotidienne avec minimum deux personnes sur place en permanence". Quant à tailler dans la masse salariale, il juge l'option inenvisageable : "on est déjà sur le fil, depuis le licenciement économique, on travaille à cinq et on ne respecte plus la réglementation... ça ne signifierait rien d'autre que l'abandon de la structure".
Maxime Pitavy