Incontestablement, Laurent Wauquiez semble bien être la pierre angulaire de ce dossier qui devrait aboutir à la création d'une centaine d'emplois à Chaspuzac à moyen terme. Une bonne nouvelle pour tout le monde en soi .... sauf peut être ceux qui n'y ont pas été conviés.
Comme le développement économique est une compétence de la Région, nous l' avons contacté. Celle-ci déplore n'avoir été ni associée, ni informée, ni invitée lors de cette "séquence de communication", alors qu'elle est pourtant la collectivité qui a mis le plus d'argent au pot dans ce dossier (environ 640 000 €). Vient ensuite la communauté d'agglomération du Puy-en-Velay, qui financera les travaux de viabilisation du terrain. La somme est pour l'instant difficile à chiffrer car il faut attendre les appels d'offre. Le Conseil général soutient logistiquement et techniquement le projet grâce au comité d'expansion économique, mais à l'instar de la commune du Puy, il ne déboursera pas un euro dans l'opération.
"C'est clairement un coup politique, avec un intérêt électoral"
Philippe Wimart-Rousseau, le directeur de cabinet du Président de la Région Auvergne, n'a pas caché sa déception : "c'est clairement un coup politique, avec un intérêt électoral et une volonté manifeste d'écarter la Région, alors que le protocole veut qu'on invite l'ensemble des partenaires". Rappelons en effet que cette dernière est à gauche, quand le Puy et l'agglo sont à droite.
"C'est un clivage que l'on déplore", réagit-il, "René Souchon n'hésite pas à collaborer avec des élus de tout bord politique, comme en témoigne le développement du Très Haut Débit en Auvergne, mené de concert avec le Président Roche de l'UDI pour la Haute-Loire, ainsi que des présidents de l'UMP, du Front de Gauche et du Parti Radical de Gauche pour les autres départements auvergnats".
Pour Laurent Wauquiez, "ce comportement d'élus d'arrière-garde" ne justifie pas de polémique sur un dossier qui aboutit à ces créations d'emploi et rappelle que la première personne à remercier, c'est l'entrepreneur. Ecouter. {{audio2}}
----
Ces aides pour la création d'emplois sont donc étroitement liées au projet de Chaspuzac et sont issues du FIAD (Fonds d'Investissement Auvergne Durable), un crédit de la Région pour accompagner les TPE (Très Petite Entreprise) et PME (Petite et Moyenne Entreprise) dans une période où l'accès bancaire est compliqué. La Région affirme avoir déjà assisté plus de 300 entreprises depuis 2012 et créé près de 1 500 emplois grâce au FIAD.
-----Le projet immobilier budgétisé à plus de cinq millions d'euros
La Région se sent donc "totalement oubliée" dans cette affaire, alors qu'elle est pourtant impliquée financièrement, mais aussi dans le cadre de ses compétences, que ce soit sur le plan du développement économique ou celui de la formation. En effet, 300 000 € d'aides directes à la création d'emploi ont été alloués par le Conseil régional, suite à la délibération votée en session plénière à la Région en janvier 2012.
Le soutien au projet ne date donc pas d'hier pour la collectivité et on parlait précisément de 92 emplois à l'époque et d'un investissement immobilier d'environ cinq millions d'euros. Selon nos informations, cet investissement, à la charge de l'entrepreneur Loïc Thomas, serait finalement un peu plus conséquent.
Quoi qu'il en soit, pour le Président Souchon, il s'agit de "goujaterie" et rien ne prouve que Laurent Wauquiez a fait venir cette entreprise : ce n'est qu'une "appropriation de plus". Ecouter. {{audio3}}
340 000 € pour la formation : "chacun fait son job"
Le second volet sur lequel intervient le Conseil régional est celui de la formation : depuis 2011, plus de 250 000 euros ont été alloués à la formation des employés de la maroquinerie et la somme de 88 328 € est prévue pour 2014. Au total, ce sont donc 102 stagiaires qui seront financés pour un peu plus de 340 000 €.
Pour l'instant, les 96 salariés de la maroquinerie du Puy ont entre 20 et 57 ans, avec une moyenne d'âge d'environ 35 ans. 90 % de ces salariés sont issus d'un autre secteur que celui de la maroquinerie d'ou la necessité d'une formation.
Le maire du Puy explique au micro de Zoomdici que "chacun fait son job", à propos du financement de la formation par la Région. Il en profite pour déclarer qu'il souhaite voir la Région "sortir des projets et amener des entreprises sur le territoire". Ecouter. {{audio1}}
La participation du Conseil général
Reste enfin à définir la participation du Conseil général de la Haute-Loire, car même s'il ne s'agit pas de sa compétence, le Département a soutenu logistiquement et techniquement le projet grâce au comité d'expansion économique, qui avait notamment permis de trouver de nouveaux locaux à Taulhac pour agrandir l'entreprise. Ce même comité a également accompagné l'entrepreneur dans ses démarches pour obtenir les 300 000 euros de subventions à la Région.
Loïc Thomas avait même confié dans le magazine du Conseil général : "ce comité est d'une aide très précieuse, il a grandement contribué à mon intégration et m'a accompagné dans les démarches administratives comme la recherche de financements. Ce comité est très disponible et d'une efficacité absolue".
----
Ce vendredi, les élus de la communauté d'agglomération ont validé la cession du terrain au profit de la Maroquinerie du Puy. Le dépôt du permis de construire pour cette implantation à Chaspuzac devrait être réalisé fin mars pour que les travaux de terrassement puissent débuter cet été avec en ligne de mire un début d'activité fin 2015.
-----Des relations entre l'agglo et la Région compliquées...
Le Président de Région René Souchon doit se rendre en Haute-Loire ce vendredi. Les relations avec l'agglo (et la mairie du Puy) ne semblent donc pas vraiment en voie de s'apaiser car ce dossier reste en travers de la gorge de l'éxécutif régional : "il y avait très probablement un intérêt électoral à agir vite et sans nous", suppose Philippe Wimart-Rousseau, "mais la réalité des faits, c'est que la Région fait beaucoup sur ce dossier, elle est chef de file en matière de développement économique et de formation professionnelle, c'est donc très décevant de ne pas avoir été invité...".
De son coté Laurent Wauquiez considére qu'il faut désormais "prendre de l'altitude" et le député-maire "ose espérer que personne ne fait de polémique sur cette question : l'initiative est 100 % ville du Puy et communauté d'agglomération, c'est nous qui avons monté le projet. Après, je me réjouis que la Région accompagne la formation et maintenant, j'espère qu'on va continuer d'avancer et de sortir des projets pour le territoire".
La maroquinerie du Puy refuse la Webtv du Président Souchon...
Reste que le malaise semble profond cette fois-ci, même si René Souchon veut lui aussi rester constructif, dans l'intérêt du territoire : "on nous accuse souvent à droite de faire preuve de sectarisme, si c'était le cas, j'arrêterais les subventions à cette entreprise, mais je ne le ferai pas, dans l'intérêt de l'entreprise et des salariés... En plus, la terreur qui règne sur le Puy est telle que pour mon déplacement vendredi en Haute-Loire, j'avais demandé à faire ma webtv depuis la maroquinerie, qui a refusé...".
Pour quel motif ? "La crainte de la mairie évidemment ! Que voulez-vous, je ferai ma webtv depuis une autre entreprise mais quand même Le Puy et son agglomération, c'est un territoire un peu particulier... On s'approprie régulièrement le travail des autres".
D'autres exemples "d'appropriation"
Car si la plaie semble plus profonde avec cette affaire de la maroquinerie, c'est qu'elle semble être la goutte d'eau qui fait déborder le vase car tout récemment, la Région s'est sentie oubliée sur d'importants dossiers, comme le Très Haut Débit ou le CFA de Bains, alors qu'elle avait apporté d'importantes subventions.
"J'ai vu le Président du Conseil général il y a quelques jours", rapporte René Souchon, "il était offusqué, comme de nombreux élus, que la communauté d'agglomération du Puy s'approprie complètement la réalisation sur le très haut débit, alors qu'elle n'y est strictement pour rien puisqu'il s'agit de la compétence du Département et de la Région ! Idem pour le CFA de Bains, où je me rendrai vendredi : l'agglo s'approprie certes la maîtrise d'ouvrage mais elle oublie les financements de Région, qui sont quand même de l'ordre de 7,5 millions d'euros !".
Maxime Pitavy