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AESH : « Je veux me battre pour ce métier ! »

Par nicolas@zoomdici.com , Mise à jour le 04/10/2023 à 06:00

Mardi 3 octobre, les Accompagnants d’Élèves en Situation de Handicap de Haute-Loire ont suivi pour certains l’appel national à la grève. En dehors de l’actualité syndicale, Zoomdici a recueilli les mots de Claire-Lise David Dos Santos, AESH depuis 16 ans. Un témoignage qui teinte de passion cette vocation aussi irremplaçable qu’inconsidérée.

Elle a 46 ans et habite à Tence. Et pourtant, elle ne veut pas quitter le dispositif ULIS d’Yssingeaux du collège Jean Monnet qu’elle rejoint tous les jours pour s’occuper de ses 13 élèves en situation de handicap. Quand son entourage lui dit de passer le concours « d’instit », elle répond que non, « que j’aime mon métier d’AESH, qu’il est nécessaire et que je veux me battre pour lui ».

Et quand on lui demande ce qu’est ce métier pour elle, elle dit que c’est comme « mettre des plumes, au fil des années, sur le dos des élèves en souhaitant plus que tout qu’ils s’envolent un jour pour réussir leur vie d’adulte ».

Après avoir décroché un Deug en droit et occupé des professions diverses et variées, Claire-Lise David Dos Santos met un pied dans l’univers de l’Éducation nationale en 2007. « Pendant deux ans, je suis restée à la Segpa du Chambon-sur-Lignon, explique-t-elle. Et après au lycée Emmanuel Chabrier à Yssingeaux en tant qu’AED à mi-temps (Assistante d’éducation) ».

Elle poursuit : « En 2011, j’ai intégré l’ULIS (unité localisée pour l'inclusion scolaire) de Jean-Monnet à Yssingeaux. Et j’ai obtenu mon CDI en 2015 pour un contrat de 24 heures hebdomadaires d’AESH. »

« J’ai même réussi à franchir la barre des 1 000 euros une fois »

Si le salaire horaire est au moins égal au Smic, la paie à la fin du mois dépasse rarement les 1 000 euros à cause du peu d’heures contractualisées. C’est typiquement du temps partiel imposé qui positionne alors les professionnels sous le seuil de pauvreté.

D’autre part, si les AESH envisagent de compléter leur temps libre par un travail supplémentaire, elles doivent demander l’autorisation à l’Éducation nationale. Chose qui est loin d’être garantie par l’Inspection académique pour le 1er degré ou le Rectorat pour le second degré.

« Je suis bien lotie par rapport à beaucoup de mes consœurs (94 % des AESH sont des femmes, NDLR), note Claire-Lise. Car, du haut de mes 16 ans d’ancienneté, je gagne environ 980 euros par mois. J’ai même réussi à franchir la barre des 1 000 euros une fois ! »

En 2021, le seuil de pauvreté correspond à un revenu net inférieur à 1063 € par mois ou 34 € par jour (Source Insee)

« Ils seraient totalement démunis et perdus sans nous ! »

Le métier d’AESH consiste à accompagner les élèves porteurs d’un handicap. Ces derniers peuvent être immergés dans un dispositif spécialisé ou inscrits dans une classe ordinaire. Claire-Lise David Dos Santos s’occupe en ce sens de 13 élèves répartis de la 6ème à la 3ème au Collège Jean-Monnet à Yssingeaux. Autisme, troubles du comportement, troubles cognitifs, visuels ou auditifs, les enfants sont alors aidés au quotidien.

« Sans les AESH ?, reprend Claire-Lise. Impossible de faire classe ! Certains élèves ont de très grosses difficultés. Ils seraient totalement démunis et perdus sans nous dans des classes surchargées ! Parfois, il faut juste notre présence pour les rassurer ».

« Quand le lien est fait, presque tout est fait »

Au-delà de l’aide scolaire donnée aux élèves en inclusion, un paramètre capital est constamment utilisé. « L’empathie, souffle Claire-Lise. Chaque enfant a son caractère, son handicap et son histoire. Nous les connaissons par cœur à force de rester avec eux. Nous anticipons leur angoisse et nous savons comment réagir, quoi leur dire et quels gestes adopter à l’instant ».

Elle ajoute : « Ces enfants là comptent sur notre bienveillance. Parfois, il faut un long moment avant qu’ils nous fassent confiance. Mais quand le lien est fait, presque tout est fait ».

« C’est totalement déshumanisant pour l’AESH et surtout pour les enfants suivis »

Sur le sujet, les AESH dénoncent ainsi les PIAL qui sont les Pôles Inclusifs d’Accompagnement Localisé. L’objectif des PIAL est de répartir les interventions des AESH en fonction des besoins des établissements et des élèves et de mutualiser les moyens.

« C’est totalement déshumanisant pour l’AESH et surtout pour les enfants suivis, assure Claire-Lise David Dos Santos. Encore une fois, il est parfois difficile d’établir un lien avec l’élève. Avec les PIAL, les AESH doivent être flexibles et peuvent passer d’école en école en fonction des besoins. Les enfants seront accompagnés par des AESH différentes, mettant à mal ce lien de confiance et la bulle de protection construite autour d’eux ».

« Je suis certain que nous sommes les gouttes d’huile qui font que les engrenages fonctionnent »

Claire-Lise David Dos Santos, à l’instar des 400 AESH en Haute-Loire et des 130 000 en France, demande que cette profession soit enfin reconnue par un vrai statut, que le salaire soit digne et que leur situation accapare plus de stabilité. « Nous avons aussi besoin de formations pour tel ou tel handicap, lance Claire-Lise. Car c’est le genre de compétences qui ne s’improvisent pas ».

Elle termine par ces mots : « Nous faisons un métier où l’humain détient une très grande part. Mais c’est un métier qui a besoin de moyens. Car je suis certaine que nous sommes les gouttes d’huile qui font que les engrenages fonctionnent, discrètes petites mais sans qui s’arrêterait cette grande machine de l’inclusion scolaire ».

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