Il y a 5 ans, la préfecture de la Haute-Loire s'embrasait

Par Nicolas Defay , Mise à jour le 01/12/2023 à 06:00

Samedi 1er décembre 2018. Une date qui restera gravée à jamais dans l’Histoire du Puy-en-Velay. Ce jour-là, la préfecture altiligérienne est prise d’assaut par des milliers de Gilets jaunes. Gaz lacrymogène contre cocktail Molotov, forces de l’ordre contre forces de la rue, la tension du mouvement atteint un paroxysme. Et le symbole de l’État s’enflamme.

Comme une vague jaune qui se brise contre un rocher. Et plus elle se brise dessus, plus des lézardes apparaissent sur le monolithe institutionnel. Ce jour de l’acte III des Gilets jaunes, samedi 1er décembre 2018, ils sont des milliers à se retrouver au cœur de la cité pavée.

Des milliers de manifestants, drapés de leurs chasubles fluo, emblème de la contestation populaire à l’œuvre dans tout le pays, qui font face à la préfecture de la Haute-Loire et, par extension, aux instances étatiques.

Une marée jaune devant la préfecture du Puy-en-Velay.
Une marée jaune devant la préfecture du Puy-en-Velay. Photo par Nicolas Defay

Des scènes de chaos

Devant les lourdes grilles de l’établissement, des pneus sont entassés, entremêlés de palettes en bois et de barrières Vauban. Au dessus, des jets et des projectiles fusent dans l’air, lacrymogènes, pavés, grenades de désencerclement, pierres, mobiliers urbains, poubelles, bouteilles en verre.

Odeur de caoutchouc brûlé, odeur des gaz et des liquides inflammables. Fumée des bouches qui respirent dans le froid, fumée des foyers qui brûlent ici et là. Hurlement de colère, de peur et de douleur.

Le Puy et le pays entier se sont embrasés des mois durant sous la bannière jaune fluo.
Le Puy et le pays entier se sont embrasés des mois durant sous la bannière jaune fluo. Photo par Nicolas Defay

« De manière de plus en plus violente et incontrôlée »

Alors qu’une délégation de sept Gilets jaunes est reçue en fin de journée par le préfet de l’époque, Yves Rousset, les flammes s’invitent à l’anarchie. Vers 19 heures, des cocktails Molotov sont envoyés contre le bâtiment public et en atteignent plusieurs parties. Les ailes droite et gauche de l’immeuble central sont incendiées, tout comme l’annexe de gauche contenant des locaux administratifs.

« Par petits groupes, de premières attaques contre les grilles de la préfecture se sont enchaînées de manière de plus en plus violente et incontrôlée », avait partagé dans un communiqué, le préfet de Haute-Loire, Yves Rousset, au lendemain des violences.

Il rajoutera également : « Les manifestants ont empêché les camions de pompiers d'y accéder. » Pour circonscrire les brasiers, les forces de secours passent alors par le jardin Henri Vinay.

Les Gilets jaunes, à l'intérieur de la cour d'honneur de la préfecture du Puy-en-Velay.
Les Gilets jaunes, à l'intérieur de la cour d'honneur de la préfecture du Puy-en-Velay. Photo par Nicolas Defay

Les CRS en marche de combat

Aux alentours de 21 heures, une centaine de CRS arrive sur les lieux des affrontements. Certains prendront position à l’intérieur de la préfecture quand d’autres formeront une barrière humaine et lourdement équipée devant les grilles du bâtiment.

Une équipe cheminera ensuite à travers le labyrinthe de rues et de ruelles ponotes pour traquer les derniers casseurs et sécuriser les espaces.

Le ciel rayé par les tirs des gaz lacrymogène sur la place du Breuil.
Le ciel rayé par les tirs des gaz lacrymogène sur la place du Breuil. Photo par Nicolas Defay

La fin de l’histoire

L’épilogue de ce sombre chapitre ponot comprend de nombreuses victimes dans les deux camps. Dix-huit gendarmes et policiers seront blessés en ce 1er décembre 2018. Un manifestant sera défiguré à jamais, un œil emporté par un fragment d’une grenade de désencerclement. 250 000 euros de dégât seront estimés suite aux incendies.

Et le lundi 9 mars 2020, entre les murs du Tribunal judiciaire du Puy-en-Velay, quatre incendiaires seront alors condamnés à des peines comprises entre six mois et trois ans de prison ferme.

La cité anicienne, en ce premier jour de décembre 2018, s'inscrira alors pour toujours dans les livres de l'Histoire du Puy, de celle de la France, de celle de sa République. 

Des policiers, des Gilets jaunes. Des humains.
Des policiers, des Gilets jaunes. Des humains. Photo par Nicolas Defay

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6 commentaires

sam 02/12/2023 - 07:20

Il y a 5 ans, par populisme débile, LW offrait le café à tous ces gens qui, avec leur misère intellectuelle et leur paresse, s'installaient sur nos ronds-points et brûlaient la préfecture. Ces mêmes gens qui aujourd'hui, insoumis ou fachistes tagguent nos rues et défient la République ... LW semble désormais absent parmi eux mais on doit se souvenir qu'il a bien soufflé sur les braises.

ven 01/12/2023 - 21:51

Lire ou relire l'excellent réquisitoire du préfet Rousset. Factuel de la 1ere à la dernière page, il aide à comprendre le rôle de celui qui un samedi précédent avait troqué la parka rouge pour un gilet jaune...

ven 01/12/2023 - 15:24

La conclusion de cet article est pleine de (bon) sens. Du côté gilets jaunes, il y avait des éléments perturbateurs qui ont obéi à un instinct d'écrire l'histoire ; mais vouloir cramer le préfet et son entourage comme des poulets, est-ce écrire une belle page d'histoire ? La présence d'élus de premier plan n'autorise pas l'irréparable. Le phénomène de l'entrainement ne suffit pas à excuser les débordements.     

ven 01/12/2023 - 14:19

quelle honte pour notre ville et nos concitoyens. Au cours de nos voyages dans l'hexagone, nous rencontrons des personnes qui nous parlent de cet incendie. Merci à nos politiques d'avoir encouragé cet outrage manifeste et d'avoir incité ces agités à faire preuve d'une conduite inqualifiable. 

ven 01/12/2023 - 14:06

N'oublions pas qu'une des racines du mouvement gilets jaunes fut le profond mépris dont on fait preuve les politiques envers les gens de la "cambrousse". Il y a la France d'en haut et les autres. On peut reprocher ce qu'on veut à LW, mais qui a fait mieux que lui pour les territoires ruraux ?

ven 01/12/2023 - 11:30

Nous n'oublierons pas de rappeler , le moment venu, à M. Wauquiez qu'il avait revêtu le gilet jaune, ce jour-là pour encourager ces attaques et à M. Chapuis qu'il avait préparé le café !

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