Petite enfance : le secteur privé, sauveur ou dévastateur ?

Par CSe , Mise à jour le 03/10/2023 à 06:00

Voici environ un mois que la rentrée est passée, avec son lot d'émotions... et de polémiques. Le secteur de la petite enfance n'a pas été épargné puisqu'il a du faire face à la question : « Comment réagir face à sa privatisation ? » Alors qu'à l'échelle nationale, de nombreuses places et professionnels manquent pour accueillir au mieux les enfants, Zoomdici a enquêté sur la situation en Haute-Loire. 

En ce mois de septembre 2023, le secteur de la petite enfance est de nouveau secoué par une polémique autour de sa privatisation. À l’échelle nationale, le président de la Fédération du Service aux Particuliers (FESP), Brice Alzon expliquait début septembre : « En ce jour de rentrée, il semble surtout important de souligner que nous manquons en France de plus de 150 000 berceaux pour accueillir les jeunes enfants et permettre aux parents de maintenir leurs activités professionnelles. Sur ce secteur, plus de 60 000 postes sont à pourvoir. C’est ici que la polémique se pose ! »

Pourtant, le 6 septembre, l’Union nationale des associations familiales (Unaf), publiait son communiqué : « Voyant rouge sur le modèle économique des crèches privées lucratives », faisant suite au dernier rapport de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas), commandé par l’État et diffusé en avril.

Une course à la rentabilité

Celui-ci dénonçait les dérives « d’un système débridé », parmi lesquelles des coûts « exorbitants » pour les familles et une logique de rentabilité « au détriment de la qualité ». En effet, l’Igas n’était dans son rapport que « les charges de personnel dans les EAJA du secteur marchand ont diminué de 2 % entre 2012 et 2021 alors qu’elles augmentaient dans les secteurs publics et associatifs (respectivement 18,5 et 11,4%). Ce ne peut s’expliquer que par un emploi de personnel moins qualifié et en nombre inférieur par enfant. »

"illisible, inefficace et inégalitaire"

Pour assainir le système, l’Unaf évoque notamment l’encadrement du coût pour les familles pour toutes les structures financées sur fond public, en généralisant un barème de participation fixé selon les revenus. L’organisme propose également une profonde réforme du Crédit d’impôt famille pour les entreprises. Un dispositif que l'organisme considère "illisible, inefficace et inégalitaire". Enfin, elle soutient l’Igas et l’IGF dans leur demande de juillet 2016 pour le calcul des coûts horaires des micro-crèches Paje et des heures d’accueil assurées par le secteur privé lucratif. « La complexité des circuits de financement engendre un flou qui ne peut que conduire à une dérive des coûts. »

Interrogée par Zoomdici, la présidente de l'Union départementale des associations familiales, Marie-Andrée Blanc dénonce « le manque de personnel et le niveau de leur qualification dans les crèches privées lucratives représente un danger pour les enfants. De plus, dans de telles structures, on sait que certaines dépenses peuvent être amputées. Par exemple, le rapport Igas démontre par le témoignage de certains personnels, que le nombre de repas nécessaire par enfant n'était pas toujours respecté, comme le nombre de couches, etc. »

Lucy Kendrick, Marie-Andrée Blanc et Laurianne Lonjon Photo par Clara Serrano

Différentes solutions

Elle a par ailleurs tenu à souligner : « Il y a quelques années, lors de l'explosion du scandale Opea dans les Ephad, nous avions communiqué sur cette problématique et nous annoncions déjà dans notre communiqué de presse que le prochain scandale concernerait le monde de la petite enfance. Malheureusement, c'est quelque chose qui est arrivé. » Avant de nuancer : « L’udaf ne s’oppose pas à l’implantation de crèches privées. Au contraire, elles permettent de proposer une offre de services pour le plus grand nombre. En revanche, il faut impérativement les réguler. »

En effet, pour la présidente de l'organisation départementale, mais aussi nationale, l'important est de défendre l'intérêt des familles. Pour cela, différentes stratégies sont à mettre en place : « D'abord, très souvent dans ces établissements, le reste à charge pour les familles est de 1 000 euros par mois. Qui est capable actuellement de donner une telle somme tous les mois ? Certainement pas la classe moyenne ! », dénonce-t-elle. Elle évoque ainsi la nécessité d'offrir aux parents davantage de solutions de garde pour leurs enfants : 

« Il faut permettre aux parents de s'occuper de leurs propres enfants. C'est la première méthode de garde en France mais il faut leur en donner les moyens, en réformant les congés parentaux. »

Il s'agit du premier mode de garde en France, la garde à domicile par les parents eux-mêmes est permise par les congés parentaux. L'udaf défend cependant une réforme de ce système, proposant, pour les familles qui le souhaitent, une durée plus courte mais une meilleure indemnisation : « C'est une certitude : les jeunes familles aspirent à s'occuper de leur enfant durant la première année suivant la naissance. Avec les 429 € d'indemnisation accordés, il est impossible de vivre dans de bonnes conditions sans que le second parent ne soit forcé d'assumer les dépenses de la famille. »

Le second mode de garde le plus répandu est le recours à une assistante maternelle. Il faut cependant selon l'organisme une meilleure reconnaissance de ces métiers qui souffrent d'un manque important de personnel. 

Qu'est-ce que l'Udaf

L’Udaf représente les familles de Haute-Loire, elle défend leurs intérêts, donne des avis aux pouvoirs publics et propose des services d’aide également destinés aux enfants et leurs parents.

L'organisme propose entre autres des activités et de nombreuses autres actions pour soutenir les parents, les enfants, les aidants. Tous les services sont entièrement gratuits.

La Loire est un territoire associatif

Grâce à son caractère très associatif, le département de la Haute-Loire dispose de nombreuses crèches de ce type, qui échappent ainsi à ce système lucratif. Cela permet à la fois aux parents de contrôler les coûts restant à charge, mais aussi les pratiques de ces crèches. « Pour preuve, nous regroupons à l'Udaf 74 associations adhérentes, ce qui représente environ 7 000 familles. Sur la communauté d'agglomération du Puy-en-Velay, ce sont une majorité d'associations qui sont à la tête des établissements de la petite enfance » précise madame Blanc. 

Le conseil d'administration y est composé de parents, ce qui permet un lien direct avec la présidente de la crèche et sa direction, pour faire remonter les difficultés et les problèmes. 

 

Contacté, Brize Alzon, représentant de quelque 1400 crèches et micro-crèches privées sur toute la France n'a pas donné suite à nos sollicitations. 

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