« Je n’arrive plus à être heureux » : dans la tête d’une victime d'AVC

Par EMa , Mise à jour le 26/08/2024 à 06:00

Stéphane Limorté, 56 ans était conducteur routier national. Un métier qu’il aimait, mais qu’il ne peut plus exercer depuis ce mémorable 11 octobre 2021. Peu après 7h du matin, alors qu’il était au volant de son poids-lourd, il est victime d’un AVC. « Depuis ce jour, j’ai toujours peur qu'il y ait une récidive ou qu'il m'arrive quelque chose. Je vis dans l’angoisse ». Rencontre.

L’AVC est la première cause de mortalité chez les femmes (et la deuxième chez les hommes). Les signes avant-coureurs peuvent varier. Pour Stéphane Limorté, les symptômes ont été une perte de force et un engourdissement dans un bras. Cet événement a radicalement changé le cours de sa vie.

Lui qui avait réalisé le rêve de son enfance et consacrait sa vie à sa passion — conduire des camions — ne peut plus le faire aujourd’hui : « Depuis l’AVC, je n’ai plus le droit de travailler à cause de mes colères intempestives. Je suis également limité dans mes efforts. Je dois vivre avec cela. C’est douloureux… Cela me manque beaucoup. »

Un accident vasculaire cérébral, c'est la conséquences d'une perturbation brutale du fonctionnement d'une partie du cerveau :

  • Soit dû à l'interruption du flux sanguin (vaisseau bouché par un caillot)
  • Soit à la suite d'une hémorragie (rupture de la paroi d'un vaisseau et issue du sang dans le cerveau)

Impuissant face à ses émotions

Résidant à Langogne en Lozère, aujourd’hui, Stéphane Limorté est pensionnaire du Synapse (centre spécialisé dans la prise en charge des maladies du système nerveux au Puy-en-Velay), où il réapprend à vivre. Cela passe par des exercices cognitifs, langagiers, moteurs et sociaux. Physiquement, Stéphane est limité dans ses efforts depuis l’AVC. Un mal qui le ronge :

« Je n’étais pas un sportif de haut niveau, mais je m’entretenais. Je faisais un peu de VTT, j’aimais courir. J’ai un passé militaire, donc j’étais plutôt actif ; je faisais du triathlon en amateur avec des copains. J’ai toujours eu cette envie de bouger. Mais ce n’est plus possible. Comme tout le monde, normalement constitué, j’aime la vie et j’en profitais avant. Mais depuis mon AVC, je n’en profite plus de la même manière. Je vis avec l’épée de Damoclès au-dessus de la tête. J’ai toujours peur que cela récidive ou qu’il m’arrive quelque chose. »

« Un peu comme Hulk, [...] j’ai des éclats de colère. »

Mais c’est surtout émotionnellement que sa vie a changé : « Je vis dans la peur d’un éclat de colère, pour une raison ou une autre, qui pourrait gâcher ma journée. Si je peux me permettre une comparaison (désolé pour les fans de Marvel), c’est un peu comme Hulk. Quand il est calme, c’est un homme, un "monsieur-tout-le-monde", mais à la moindre contrariété, il se transforme en monstre vert. Je ne deviens pas vert, mais je frappe sur les murs et les portes de chez moi. Puis, en me calmant, je redeviens monsieur tout le monde. Je sais, c’est bizarre, je suis bizarre, mais qui ne le serait pas après avoir vécu quelque chose qui nous est imposé ? »

La quête du bonheur

Stéphane est marié, a trois enfants, et n’arrive plus à être heureux. Il s’en est rendu compte en vacances au Maroc avec sa femme et ses enfants :

« On y retourne tous les deux ans, car ma femme est marocaine. On avait tout pour être bien : j'étais au soleil, entouré des gens que j’aime, avec mes enfants qui jouaient, un véritable conte de fées. Mais j’ai peur qu’une réaction me fasse perdre le contrôle, que mes émotions me dépassent et que je fasse du tort à quelqu’un. Je vis dans cette angoisse. »

« J’ai cette bestiole qui me ronge et me rappelle à chaque instant que ma vie n’est plus comme avant. »

« Plusieurs fois, j’ai dit à ma femme de partir, car je ne la sentais plus heureuse, mais elle ne voulait pas. Elle voulait me soutenir et affronter cela avec moi. Et heureusement qu’elle est là, car sinon, je serais mort. Peut-être pas physiquement, mais je serais émotionnellement mort depuis longtemps. Il m’arrive parfois d’être heureux, mais c’est une joie éphémère, et ensuite, l’AVC revient. Cette bestiole me ronge et me rappelle à chaque instant que ma vie n’est plus comme avant. »

Le COVID dans le viseur

« Je vais peut-être me mettre beaucoup de gens à dos, mais je m’en fous. Pour moi, mon AVC est survenu à cause de la vaccination contre la COVID-19. Avant la vaccination, je n’avais jamais eu de problème. Pour moi, cela a été un déclencheur », lance Stéphane Limorté.

Pourtant, le vaccin contre la COVID-19 n’est pas associé à un risque accru de subir un accident vasculaire cérébral ischémique (AVCi), selon une enquête menée par l'Institut national de santé publique du Québec (INSPQ) en octobre 2023.

Écrire pour tenter de guérir

Pour retrouver du sens dans ce qu’il traverse, Stéphane a choisi d’écrire : « Depuis ma chambre d’hôpital, j’écrivais ce que je ressentais et ce que j’avais vécu depuis mon accident dans des carnets. Une aidante m’a fait remarquer que j’avais déjà rempli deux carnets et m’a suggéré de faire un livre, ce que j’ai fais. »

Il décrit son livre comme une thérapie, une façon de faire le deuil de cet AVC : « J’ai appris que le fait de mettre des mots sur un problème permet d’aller mieux, ne me demandez pas pourquoi, je n'en sais rien… »

Le livre est disponible à la Fnac du Puy-en-Velay. Il coûte 15 €, dont 6 € reviendront à l’association « Rebondir et S'épanouir », qui aide au développement du sport et de la culture auprès des personnes victimes de cérébrolésions (traumatismes crâniens suite à un accident, AVC, rupture d'anévrisme). Le reste servira au remboursement de l’impression des 200 exemplaires.

Association « Rebondir et S'épanouir »

L'association a pour but : d'organiser, de promouvoir et de développer des activités physiques, sportives et culturelles au profit de jeunes et d'adultes victimes de lésions cérébrales ayant entraîné des déficits et handicap divers.

Le siège social est fixé au Centre Social de Guitard, 1 rue Paule Gravejal, 43000, Le Puy-en-Velay.

Le site >ici<

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