Ecoliers, collégiens et lycéens réunis pour un cross vivifiant au Pôle La Chartreuse
Au Puy, on a les boules
Depuis vendredi, les villes du Puy et de Brives-Charensac accueillent les championnats de France de Sport-Boules. Organisé par le comité départemental de la boule lyonnaise, il réunit les sommités du milieu, dont certaines viennent de Haute-Loire. Nous sommes allés à la rencontre des organisateurs, des arbitres des joueurs et des passionnés afin d'en savoir un peu plus sur ce sport qu'il ne faut surtout pas confondre avec la pétanque. Au risque de faire perdre la boule à ceux qui le pratiquent.
Le centre de la cité pavée, du côté de la préfecture et de l'école Michelet a des allures d'immenses clos, ces terrains ombragés généralement rattachés à un débit de boisson et consacrés au jeu de boules. Robert Verdier, chapeau vissé sur la tête et cigare de compétition entre les doigts prend l'ombre sous les platanes, devant le théâtre. C'est le président du comité bouliste départemental mais également le président du comité d'organisation de cette 95e édition du championnat de France de quadrettes et de triplettes. Il a l'air comblé. Le public est au rendez-vous.
La boule lyonnaise, c'est quoi exactement ?
Ne dites surtout pas à Robert qu'il joue à la pétanque. Vous risqueriez de vous faire recadrer plus ou moins poliment.Confondre la Lyonnaise avec la pétanque, c'est comme mélanger la belote et le tarot, les torchons et les serviettes. Un blasphème.
" C'est une discipline sportive de haut niveau de lancer " Robert Verdier, président du CBD
Aussi appelée sport-boules, la boule Lyonnaise se distingue effectivement de la pétanque sur bien des aspects. Il ne s'agit pas d'un loisir de vacanciers mais d'un sport. Le président insiste : " C'est une discipline sportive de haut niveau de lancer dans laquelle on tire en course d'élan ou en course continue. L'objectif final c'est la performance en précision. Elle sollicite de nombreuses capacités physiques, énergétiques et techniques".
La discipline est devenue un sport en tant que tel à partir de 1850 . Pour Marie - Françoise le Dantec, responsable de l'arbitrage pour cette édition 2023, cela s'explique par le fait que " les terrains de boules originels ont petit à petit dû déménager dans les stades sportifs ce qui les a forcément rapprochés du milieu de la compétition". Du coup ce sport, qui s'inscrit dans un championnat international comme n'importe quel autre sport, "ne se joue pas n'importe où et il est bien plus normé et cadré que ne l'est la pétanque".
" Les règles de la boule lyonnaise sont très précises, (...) du coup son terrain doit être délimité en conséquence " Marie-Françoise Le Dantec, arbitre
L'arbitre poursuit : " Chez nous, on ne parle pas de cochonnet. Le principe du jeu est de placer les boules le plus près possible d'un objectif, qu'on appelle le but. L'adversaire essaie ensuite à son tour de placer les siennes encore encore plus près de ce but ou d'enlever celles qui le gênent"
Jusqu'ici ça ressemble quand même beaucoup à la pétanque. On vise, on tire ou on pointe. Sauf que, insiste Marie-Françoise Le Dantec, " les règles de la boule lyonnaise sont très précises en ce qui concerne le tir et le marquage de boules et du coup son terrain doit être délimité en conséquence, contrairement à la pétanque à laquelle on peut jouer presque n'importe où. La gestuelle des joueurs n'a rien à voir non plus avec celle de la pétanque. Au sport-boules, les participants ont le droit de courir sur une distance de 7,5 m de long, alors qu'à la pétanque ils restent fixes, dans un périmètre limité".
Vous l'avez ? En fait c'est surtout une histoire de terrain de jeu et de règles un peu plus strictes.
" Les boules n'ont rien à voir entre-elles " Un vendeur sur le Breuil
Mais la différence qui saute rapidement aux yeux des non initiés, qui se promènent sur le Breuil, entre les stands de vendeurs de boules, c'est la taille des boules. La lyonnaise semble bien plus grosse et plus lourde que la boule de pétanque. Chose que nous confirme, un des vendeurs : " Les boules n'ont rien à voir entre elles. Le diamètre maximum d'une boule de pétanque c'est 80 mm et son poids peut varier entre 600 et 800 grammes. Elle est constitué de deux hémisphères en acier qui sont soudés entre eux. La lyonnaise par contre, est bien plus grosse et plus lourde. Son diamètre peut aller jusqu'à 110 mm et elle peut peser jusqu'a 1300 grammes. On la fond d'un seul bloc".
Du coup, la boule lyonnaise est aussi plus chère. Les prix démarrent à 70 euros pièce environ alors que vous trouverez dans le commerce un jeu complet de boules de pétanque pour 40 euros. Alors, la lyonnaise serait-elle plus élitiste que la pétanque? Pas forcément. Le monde de la boule est parfois surprenant.
Pétanque versus Lyonnaise
" La pétanque devient hyper branchave " Alain, lyonnais, passionné de boules
Alain est venu de Lyon pour assister aux trois jours du championnat. C'est un passionné de la boule. Qu'elle soit de pétanque ou lyonnaise, même s'il avoue finalement avoir une préférence pour cette dernière. Sa ville d'origine nous permet de supposer qu'il sait de quoi il parle. Il reconnait facilement que beaucoup de clichés entourent encore la pétanque : " On la perçoit comme le sport populaire par excellence, c'est indéniable. Plein de gens l'associent encore aux apéros anisés et aux grillades avec le bruit des cigales en arrière fond. Les plus méchants ou ceux qui lisent encore Cabu en feront même l'apanage du beauf. Pourtant à Lyon , et je pense qu'on peut élargir à toute la France, la pétanque devient hyper branchave. A Lyon, il y a même depuis quelques années, un mini festival électro-pétanque. Le rendez-vous de tous les bobos".
" Les terrains de Lyonnaise ont disparu. Par contre, les pétanqueurs ont investi les lieux " Alain
C'est donc dorénavant la pétanque qui aurait le vent le poupe, dans la ville d'origine de la lyonnaise. De quoi perdre la boule pour Alain et les amateurs de Lyonnaise : " A La Croix-Rousse, on avait le haut-lieu de la Boule Lyonnaise, le Clos Jouve. Il y avait plusieurs terrains sur lesquels j'allais jouer avec mon grand-père et ses amis quand j'étais gamin. Aujourd'hui, c'est devenu un jardin, c'est dommage, les terrains de Lyonnaise ont disparu. Par contre, les pétanqueurs ont investi les lieux".
" C'est pas la guerre entre nous, on s'entend très bien " Robert Verdier
Robert Verdier n'est pas lyonnais, mais solignacois. Il dresse un peu le même constat : " Les clos, ces endroits sur lesquels on pouvait jouer à la Lyonnaise étaient rattachés à un bistrot. Il y en avait donc plein à Lyon. Je crois qu'aujourd'hui, il n'en reste plus qu'une vingtaine". La pétanque a pris le dessus. C'est indéniable. Un constat amer pour le président du comité départemental de sport-boules de Haute-Loire qui refuse malgré tout de dénigrer la pétanque : " C'est pas la guerre entre nous, on s'entend très bien".
La situation se confirme au niveau des chiffres. D'après Robert Verdier " au niveau national, on compte environ 42 000 licenciés pour la lyonnaise, alors que pour la pétanque on en compte 200 000 de plus. Même rapport en Haute-Loire, 850 contre 3000". Une explication?
" La pétanque est beaucoup plus médiatisée que la Lyonnaise " Robert Verdier
Le solignacois poursuit : " Je pense qu'il s'agit avant tout d'une question de médiatisation. La pétanque est beaucoup plus médiatisée que la lyonnaise, alors qu'on a rien à leur envier. Nos compétitions ne sont jamais retransmises en direct mais en différé. Et en plus on doit payer pour ça. Les compétitions de pétanque, elles, sont retransmises en direct sur la chaine de l'Equipe, alors que nous on doit souvent se contenter de retransmission sur Youtube".
Un réel succès populaire pourtant
" A chaque fois qu'on organise le championnat au Puy, c'est un réel succès populaire " Robert Verdier
Il est 14 heures en ce samedi après-midi caniculaire. Les compétitions du championnat de France de Sport-Boules viennent de reprendre. Le Breuil, le parking Michelet et le jardin Henri Vinay sont noirs de monde. Il faut croire que la lyonnaise attire malgré tout le ponot. De quoi redonner espoir au président : " A chaque fois qu'on organise le championnat au Puy, c'est un réel succès populaire. C'est l'évènement de l'année pour notre sport. On accueille sur trois jours plus de 2000 joueurs et joueuses venus de toute la France. 432 équipes dont 64 équipes féminines. On s'attend à une fréquentation d'environ 4000 personnes".
Catherine, Nicole et Virginie sont licenciées au club de Chalon-sur-Saône. Ex championnes du monde en 2004, elles ont été éliminées cette année en seizième de finale. Elles gardent le moral malgré tout :" On est super contentes de jouer ici. La ville est super belle. On sent un réel engouement de la population et puis l'organisation est au top ". Un peu de valeur ajoutée de la part des organisateurs : la mise en place d'un marché de produits locaux, histoire de mettre en valeur le terroir et de faire découvrir aux joueurs mais également au public toutes les facettes de la gastronomie locale. La triplette de joueuses de Chalon a adoré.
Des locaux dans la compétiton
La Haute-Loire est bien représentée dans la compétition. De nombreux boulistes originaires du département sont effectivement présents au sein des différentes équipes qui s'affrontent. Certains parmi eux ont d'ailleurs l' ambition de briller sur leurs terres. C'est le cas des frères Chirat, Alexandre et Grégory, qui comptent parmi les références mondiales du Sport-Boules. Ils sont désormais licenciés au club de Saint-Vulbas et Annecy, mais sont passés tous les deux par le club de Brives-Charensac. A tout juste trente ans, Alexandre est déjà trois fois champion du monde et 27 fois champion de France. A l'heure où nous écrivons cet article, et ne disposant pas de boule ... de cristal, nous ne savons pas s'il aura renouvelé la performance.
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