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(1/2) L’Église face à ses démons : l’évêque du Puy évoque les scandales de la pédophilie
Zoomdici a rencontré Yves Baumgarten, évêque du Puy-en-Velay, pour aborder un sujet des plus sensibles. La lutte contre la pédophilie au sein de l’Église et la sexualité des prêtres.
L’article est scindé en deux parties. Ce premier volet aborde la pédophilie au sein de l’Église et les outils pour y faire face. Le second volet touchera l’un des piliers fondamentaux de l’Église catholique : le célibat des prêtres et leurs naturelles pulsions humaines.
L’évêché. Un beau jardin cerclé de voûtes romanes en pierres. Une fontaine asséchée au centre. Et puis la pièce. Grande et haute de plafond. Elle est percée de plusieurs longues fenêtres, laissant la lumière froide de décembre pousser les ombres dans les recoins des radiateurs.
À chaque pas, même les plus timides, l’antique plancher craque trop fort. Si fort que le bruit donne envie de fermer les yeux et de serrer les dents comme pour ne pas déranger le vide tout autour.
Sur un mur, celui où existait jadis un foyer de cheminée, trois portraits sont accrochés. Trois évêques, drapés de noirs ou de rouges, serrant les mains du Pape couvert de blanc. Henri Brincard, Luc Crépy et Yves Baumgarten. Et sur un autre mur, un christ. Imposant et couleur de bois. La poussière du temps sur son visage supplicié.
Monseigneur, comme on dit dans le jargon de l’Église, entre alors dans la pièce et s’assoit sur l’une des chaises disposées autour de la grande table. Yves Baumgarten et le journaliste se font face, un peu gênés, conscients des barbelés qui entourent le sujet du jour. La pédophilie au sein de l’Église et la sexualité des prêtres.
Si le journaliste s’attendait à une porte fermée, des bras croisés et une langue de bois, il n’en fut rien. « Nous sommes conscients de la gravité des faits, souffle Yves Baumgarten, en préambule. Et il est vrai qu’il est très douloureux pour nous d’accepter ce constat là ».
Comment l’Église réagit à ce phénomène criminel de pédophilie ?
« Je crois qu'il y a eu déjà un constat de vérité qui a eu lieu au niveau de l'Église de France. Elle a fait le choix de poser le problème en assemblée plénière avec tous les évêques de France. C’est une prise de conscience collective que nous abordons là. Et des paroles de vérité, aussi insoutenables soient-elles, ont été posées pour reconnaître cette actualité ».
« Ces faits monstrueux de pédophilie sont commis dans toutes les strates de la société. Mais il est vrai qu’ils ont été particulièrement présents, depuis de nombreuses années, au sein de l'Église ». Yves Baumgarten
« Ça n'enlève pas toutes les belles choses qui sont faites par quantité de prêtres et qui sont au service des gens. Et pour un maximum de transparence, nous avons mis en place cette commission indépendante sur les abus sexuels dans l'église (Ciase) avec, à son terme, le fameux rapport Sauvé ».
Vous attendiez-vous à ce que ce rapport soit aussi lourd ?
« Non et ce fut un constat très difficile et très pesant à encaisser. On n'en mesure jamais l'ampleur parce qu’on a du mal à recevoir ce genre de vérité. Avant d’être évêque au Puy, j'ai été vicaire général de Lyon. J'ai eu à gérer toute l'affaire Preynat Barbarin. J’étais donc bien au courant de tout ça depuis depuis 2014 à 2020. J’ai assisté à tout le procès. Quand les victimes prennent la parole et décrivent dans un grand silence ce qu’il s'est passé, on en sort écrasé ».
« En Haute-Loire, depuis l’année 1950, plusieurs dizaines de victimes ont été déclarées. Une quinzaine de prêtres ont été mis en cause ». Yves Baumgarten
Que devient un prêtre, aux yeux de l’Église, lorsque qu’il a été jugé coupable de pédophilie ou d’attouchements sexuels ?
« Sur le volet judiciaire, il est condamné si sa culpabilité est reconnue. Au sein de l’Église, des sanctions étaient prises contre le prêtre selon la nature et la gravité des faits. À présent, même quand les faits ne sont pas jugés graves, ils apparaissent inacceptables pour nous. Le mis en cause sera renvoyé de l'état clérical avec l’impossibilité d’acquérir des missions dans le ministère ».
« Les profils de séminaristes sont désormais passés au crible par un psychologue. Ce dernier peut alors dire fondamentalement si le candidat est un risque pour l’Église et la société ». Yves Baumgarten
Pour anticiper la présence d’un prédateur, n’existent-ils pas des outils, des formations, destinés aux prêtres en activité et ceux en devenir ?
« Quand ils sont au séminaire, ils ne sont pas encore prêtres. Pendant leurs sept ans de formation, il y a, surtout depuis le rapport Sauvé, des enseignements sur la pédocriminalité. Il y a également des protocoles différents comme l’interdiction de se retrouver seul avec des enfants. Nous avons également décidé la séparation des statuts. Par exemple, un directeur de colonie ne peut pas être prêtre comme il existait, jadis ».
« Il faut que nous soyons vraiment vigilants. Parce que vous savez, on a beau dire « risque zéro »… ça n'existe pas le risque zéro ». Yves Baumgarten
Et les victimes dans tout ça ?
« Il a été mis en place l'instance nationale de réparation et de reconnaissance (INIR), à la demande des évêques et financée par les évêques. En France, ce sont 1 600 dossiers qui ont été déposés. Les deux tiers ont été traités. La moyenne financière des réparations est de 35 000 euros, ce qui représente environ 60 millions d’euros, au total. C’est un effort conséquent pour tous les diocèses de France ».
« Jamais le denier de l’Église, c'est-à-dire le don des fidèles, n’est affecté à cette réparation ». Yves Baumgarten
D’où provient cet argent ?
« Je ne peux parler qu’au nom de celui du diocèse du Puy-en-Velay, car chacun décide de ses sources financières. Déjà, quand les prêtres décèdent, ils donnent automatiquement leur héritage. Autre revenu, si un prêtre a été reconnu coupable de crimes sexuels, il doit payer le préjudice jugé. Enfin, il nous est possible d’engager des ventes de biens immobiliers anciens qui appartiennent au diocèse. Dans tous les cas, jamais le denier de l’Église, c'est-à-dire le don des fidèles, n’est affecté à cette réparation ».
Vos commentaires
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2 commentaires
Zoom svp arrêtez d'employer le terme de pédophilie, utilisez "pédocriminalité". Il n'y a aucun amour dans ces comportements, uniquement de la prédation. Merci par avance.
L'obstination de l' église catholique à propos du mariage des prêtres se paye par la désaffection et la chute des vocations .et aussi par la condamnation implicite de cette absurdité par l'opinion .
Persister dans l'erreur est ,paraît-il ,diabolique .