Grenelle des violences conjugales : quelles attentes dans le département ?

, Mise à jour le 27/11/2020 à 08:58

Dans le cadre de ce Grenelle des violences conjugales et jusqu'au 25 novembre, date de la journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes, plusieurs groupes de travail seront chargés de réfléchir à des solutions et à leur mise en oeuvre, pour lutter contre les violences conjugales.

Dès ce mardi, à l'issue de la première rencontre organisée à Matignon en présence de 80 personnes -- ministres, avocats, représentants des force de l'ordre, familles de victimes, associations, etc. --, les premières mesures d'urgence pour renforcer la protection des victimes ont été annoncées par le Premier ministre, Edouard Philippe (Retrouvez la vidéo en bas d'article).

>> A lire : Violences faites aux femmes : lâcher de ballons en hommage aux victimes

Cette opération d'envergure se poursuivra pendant trois mois à Paris mais également sur l'ensemble du territoire français. En Haute-Loire, un Comité local d'aide aux victimes se réunira dès ce mercredi en présence des représentants de l'Etat, des organismes pour les prestations familiales, des instances judiciaires, des collectivités territoriales et d'associations. Parmi ces dernières, le Centre d'information sur le Droit des Femmes et des Familles de la Haute-Loire (CIDFF 43).


Zoomdici a rencontré Elodie Arsac, coordinatrice du CIDFF 43, pour comprendre les enjeux et les attentes concernant ce Grenelle des violences conjugales sur le département. (Photo © Zoomdici - S.Ma)

Que représente ce Grenelle des violences conjugales lancé ce mardi 3 septembre par le gouvernement, pour le CIDFF 43 ?
Elodie Arsac : Tout d'abord un triste constat, 101 femmes décédées en France depuis le début de l'année. Les chiffres sont en constante augmentation. Cela permet que ce sujet soit remis au coeur des préoccupations.

Au niveau départemental, constate-t-on également une augmentation du nombre de victimes de violences conjugales ?
E. A. : Si on regarde sur les trois dernières années, au niveau du nombre de victimes que nous avons pu accompagner, il est clair qu'il y a une augmentation. Le CIDFF 43 a accompagné 99 victimes de violences conjugales en 2017. 152 en 2018 et on est déjà à 81 victimes accompagnées entre le mois de janvier et le mois de juillet 2019.

Comment explique-t-on cette augmentation ?
E. A. : La parole s'est peut-être un petit peu libérée suite au mouvement "Balance ton porc", peut-être que notre service est un peu plus connu, qu'on fait peut-être plus appel à nos associations. Je crois qu'il faut bien se rappeler aussi l'origine des violences conjugales. On est dans une société qui est vraiment sur un modèle patriarcal, de domination des hommes sur les femmes. On a longtemps pensé que tous les hommes étaient bien supérieurs aux femmes et notre société s'est construite là-dessus. Donc on a vraiment une division sexuée que ce soit dans l'emploi, les comportements, les compétences, etc. Et puis dans les situations extrêmes, des violences au sein du couple et dans la famille. Notre action repose vraiment dans la lutte contre les inégalités, et en premier lieu sur la prévention, notamment auprès des jeunes, en milieu scolaire, pour éduquer à l'égalité fille-garçon.

(Cliquer sur "Listen in browser" pour une écoute sur smartphone ou tablette)

Quelles sont vos attentes concernant ce Grenelle des violences conjugales ?
E. A. : D'abord dans le milieu scolaire, il faut former les professionnels de l'Education à cette thématique-là et nous donner aussi, en tant qu'association, les moyens de pouvoir développer des outils de prévention et participer à des temps forts dans les établissements scolaires, auprès des parents également. 
 
Le répérage et l'orientation. Je pense qu'il faut qu'il y ait une réelle lisibilité de l'organisation, tant pour les professionnels, quel que soit leur champs d'intervention que pour les personnes. Pour qu'elles puissent savoir où s'adresser, où trouver de l'aide, où trouver un soutien. C'est aussi former les professionnels à repérer et à réorienter les personnes pour qu'elles ne restent jamais sans soutien.

Ce que nous attendons aussi et pour qu'il y ait une bonne prise en charge des victimes, c'est qu'il y ait un travail en coopération, entre associations, avec les forces de l'ordre, etc. Depuis un an, par exemple, nous avons une permanence au commissariat du Puy, chaque lundi après-midi. Le fait que les équipes se connaissent permet de travailler davantage dans la complémentarité. Du coup, sur des situations d'urgence, on sera beaucoup plus réactifs et la prise en charge sera beaucoup plus fluide. Il faut également renforcer ce travail-là avec les élus. La question est abordée dans le cadre du CISPD (Conseil Intercommunal de Sécurité et de Prévention de la Délinquance, Ndlr), mais il faut continuer à former les élus sur ces questions.

Autres attentes, c'est aussi qu'on conforte les moyens qui sont donnés à nos associations de terrain. On parlait de l'augmentation du nombre de victimes accompagnées, mais aujourd'hui, il faut bien se dire que nous, sur le pôle "lutte contre les violences", n'avons ni les ressources humaines ni financières suffisantes pour faire face au nombre de demandes. (Le CIDFF 43 compte sept salariés qui doivent gérer les pôles "accès au droit", "lutte contre les violences", "insertion professionnelle" et "éducation et formation à l'égalité", Ndlr). Heureusement notre équipe est investie et ne compte pas ses heures.

Et puis, punir davantage les auteurs de violences conjugales, notamment pour lutter contre la récidive. On constate qu'il y a des auteurs qui peuvent reproduire le même schéma sur plusieurs victimes.

On parle d'auteurs, et les auteures ?
E. A. : Nous sommes moins sollicités par les hommes victimes de violences conjugales. On en suit quelques-uns. On ne sera pas tout à fait sur le même type de violences. Parfois on n'est pas directement sur de la violence physique mais plus psychologique ou économique. Je pense aussi que c'est encore plus difficile pour les hommes de franchir la porte de nos associations. Dans l'image, ça reste tabou et plus difficile à assumer pour un homme.
Propos recueillis par Stéphanie Marin

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