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Forteresse de St-Vidal : entre ambitions, privatisation et contestation
Fin décembre 2018, une réunion publique a eu lieu à Saint-Vidal, comme il s'en fait régulièrement depuis que Vianney d'Alançon a racheté la forteresse de Saint-Vidal en 2016.
Il propose un tryptique inédit à l’échelle régionale qui alimente ce projet d’envergure : la réhabilitation des jardins, l’ouverture de quinze salles de la forteresse sous forme de déambulation à travers des moments clés de l’histoire régionale et enfin, un spectacle nocturne exceptionnel où se mêlent acteurs et figurants bénévoles, pyrotechnie et vidéo-projection.
Tancé par une "une poignée de fauteurs de trouble"
"Nous avons d'abord exposé le bilan de l'année", explique Vianney d'Alançon en référence à la réunion de fin décembre, "avec 40 000 visiteurs du 15 juin au 30 septembre", comme nous l'avions relayé fin novembre. Mais au moment d'évoquer les projets à venir, le ton change. "J'ai été pris à partie sur ma vie privée et insulté", nous confie le châtelain, "par une poignée de fauteurs de trouble, un microcosme d'opposants dont la violence est inquiétante", témoigne-t-il avant d'ajouter : "à la sortie de la réunion, beaucoup m'ont affiché leur soutien, en apparté tant ils ont peur de ce groupuscule".
Un accès aux chemins communaux seulement munis d'un badge
Au coeur de cette colère : le projet d'acquisition de parcelles sur la commune par l'association pour la valorisation du Velay, Auvergne et Gévaudan. "Acheter des terrains n'a jamais été interdit", se défend le président de l'association, mais là où le bât blesse, c'est qu'il souhaitait privatiser des chemins communaux, avec une zone à barrière à laquelle les riverains pourraient accéder seulement munis d'un badge. "On se sent dépossédés", tempête Bernard Monpo, le porte-parole de l'association Bien vivre ensemble au bourg de Saint-Vidal, "ça me paraît tellement gros, neuf hectares, c'est le triple de la superficie du bourg".
"La commune n'a pas de terrains à céder"
La majorité des habitants de Saint-Vidal s'oppose ainsi à "la privatisation de l'espace public", analyse le premier magistrat de la commune Gérard Gros qui se veut rassurant : "la commune n'a pas de terrains à céder ; en prêter en période estivale est possible, les vendre, il n'en est pas question".
Idem pour les écuries : même si elles sont en ruines, qu'il n'y a aucun projet communal et que la collectivité n'aurait pas les moyens de les restaurer, "il n'est pas question de les vendre", tout comme la tour et le pigeonnier, malgré les craintes des riverains.
Fin de la concertation ? "Il y a eu trop de violences, je suis vacciné"
Il faut dire qu'entre un projet porté par Vianney d'Alançon, auquel le maire est "très favorable", car il représente "des retombées économiques très positives", en référence à l'auberge communale devant le château ("le seul commerce à bénéficier des animations" selon Bernard Monpo), et les craintes de la population face au développement du projet, l'élu doit parfois faire le grand écart... "On demeure un garde fou pour la tranquillité de la population", prévient le maire qui craint que suite aux incidents dont le châtelain est victime, la concertation s'estompe.
Une crainte légitime puisque Vianney d'Alançon, qui assure que ces projets se font "en cohérence avec les habitants", nous a confié que ce sera peut-être la dernière fois : "ces incidents (ndlr : insultes et menaces lors de la dernière réunion) font qu'il n'y aura plus jamais de réunion publique, dans la concertation, comme on en fait depuis des années ; ça demande beaucoup d'énergie et il y a eu trop de violences, je suis vacciné".
Pneus crevés, déchets jetés, menaces physiques et écrites
Quant aux menaces, le châtelain assure en recevoir depuis six à sept mois, et de diverses natures : des serrures cassées sur sa voiture, des pneus crevés et des déchets jetés, mais aussi des menaces physiques et écrites (courriers anonymes).
"J'ai fait plusieurs dépôts de plainte, les services de gendarmerie sont avisés et une enquête est en cours", ajoute-t-il. Pour autant, il n'entend pas se laisser intimider et certifie qu'il a une majorité de la population à ses côtés dans la conduite de ce projet.
Des acquisitions de terrains privés bien avancées
Le propriétaire de la forteresse a aussitôt mis un terme au projet d'accès avec un badge le long de la Borne et à l'ambition d'acquérir des terrains communaux. Pour mener à bien son projet, Vianney d'Alançon envisage donc l'acquisition de terrains privés et il a mandaté la SAFER (société d'aménagement foncier et d'établissement rural) à cet effet.
"Si ce sont des terrains privés, ce n'est plus notre affaire, si ce n'est le cadre de la tranquillité publique", commente l'élu, mais il pourrait y avoir d'autres acquéreurs potentiels, car certains des terrains ont une forte valeur agricole.
----"Ici, ce n'est pas Le Puy du Fou !"
"St-Vidal, il faut le voir dans son jus", témoigne Bernard Monpo, "c'est un tout petit village avec des maisons enserrées autour du château, dans une petite vallée. Descendre à la Borne ne sera qu'un bon de cinquante mètres et le son remontera sur les villages de Locusol ou Grazac. On n'est pas en Vendée, où il reste encore une centaine d'hectares à De Villiers, ici, ce n'est pas Le Puy du Fou !".
-----Les projets sur lesquels travaille le châtelain
D'abord la création d'une brasserie artisanale historique, avec des animations et un spectacle à l'intérieur, mais aussi le développement de la permaculture (le projet qui serait le plus consommateur d'espaces), "un enjeu écologique et agricole très fort aujourd'hui et qui mériterait d'être développé en Haute-Loire", ajoute Vianney d'Alançon, et enfin de nouvelles zones de spectacles (plus bas, vers la Borne), qui remplaceraient les actuelles "en les éloignant du château pour qu'il n'y ait aucune nuisance supplémentaire". Notons qu'il s'agit seulement d'idées à valider par l'ensemble des acteurs.
Une association dénonce des gênes "absolument insupportables pour les villageois"
Bernard Monpo est le porte-parole de l'association Bien vivre ensemble au bourg de Saint-Vidal, une association qui a été créée cette année afin de "maintenir les conditions d'une vie harmonieuse dans notre village". La quarantaine de membres estime que "la réouverture du château au public a changé le quotidien de tous. Force est de constater que certaines gênes sont apparues : augmentation de la circulation automobile, utilisation de la pyrotechnie, sonorisation des jardins, etc.".
Lors de la réunion qu'il a tenue avec cette association, le propriétaire du château s'est engagé à supprimer les bornes sonores qui déroulent l'historique, de 9h à 19h. "Du matin au soir, c'était à devenir fou", témoigne Bernard Monpo, "on a fait le choix de vivre à 12km du Puy pour avoir aussi un peu de tranquillité, et on est en train de la perdre".
Idem pour la pyrotechnie, qui était devenue "absolument insupportable pour les villageois", selon le porte-parole de l'association, "une fois le 14 juillet, on est d'accord, mais là, c'est une quinzaine de feux d'artifice dans l'été, c'était beaucoup trop". A la place, Vianney d'Alançon s'est engagé à développer un système d'illuminations.
"Cette année, on ne fera aucune demande de subvention à l'agglo"
Enfin, parmi les tensions, demeure la question du bénévolat et des importantes subventions que l'association pour la valorisation du Velay, Auvergne et Gévaudan a touchées l'an passé. Le président rétorque : "si on voulait payer les bénévoles, c'est une subvention de 30 millions d'euros qu'il aurait fallu et non pas 300 000 euros ! Soyons sérieux, des subventions ont toujours été alloués aux entreprises qui créent des richesses et des retombées pour le territoire".
Il cite par exemple la salaison de Fix, qui a touché l'an dernier 300 000 € de subventions publiques sur un investissement de 950 000 € (pour moderniser la salaison, élargir le périmètre d'activité et créer deux emplois) ou encore le Roi de l'Oiseau, qui touche une subvention de fonctionnement, chaque année, "alors que nous, on a touché cette subvention pour amorcer un projet ambitieux et Saint-Vidal est devenu le troisième site touristique du département en fréquentation dès la première année d'exercice", se félicite-t-il, même si l'association Bien vivre ensemble au bourg de Saint-Vidal émet des doutes sur les chiffres annoncés.
"Cette année, on ne fera aucune demande de subvention à l'agglo du Puy, qu'on soit bien clair", conclut Vianney d'Alançon, "on a juste eu une subvention d'investissement pour le développement des spectacles". Quant au financement de l'association, "ce sont des mécènes privés comme Dassault ou Michelin qui ont été sollicités".
Maxime Pitavy
Pour aller plus loin La rédaction de Zoomdici avait déjà énoncé les principales attractions. Le projet, qui bénéficie de 300 000 euros de subventions de l'agglomération du Puy, avait suscité quelques interrogations et réserves de la part de l'opposition, mais il a bien été validé par la collectivité, alors que la Région débloquera 600 000 euros et le Département 300 000 euros, pour un total d'environ 1,2 million d'euros.
Alors que nous faisions le point sur les dernièrs avancées du projet et des spectacles estivaux, qui débutait en juin 2018, nous avons profité de notre rencontre avec Vianney d'Alançon début octobre pour l'interroger sur cette polémique. Vous trouvez ici sa réponse. Les plans 3D du jardin ont ensuite été dévoilés début décembre et on peut également citer les multiples soutiens de "célébrités" au projet de Vianney d'Alaçon. Enfin le projet de la forteresse nécessite des bénévoles mais aussi des professionnels. Quatre comédiens et un technicien de maintenance et d'opération spectacle étaient recherchés début février pour une période allant de mai à septembre. Zoomdici avait consacré un article lors de la venue des équipes de France télévision pour un reportage, qui révélait notamment une partie du spectacle nocturne.
En juillet dernier, en vidéo, Zoomdici vous proposait un voyage dans le temps au travers des quinze pièces du château ouvertes au public dans le cadre du spectacle déambulatoire "La Mémoire d'un peuple".
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